Si elle a suscité la joie à Alger, elle a provoqué l'enclavement à l'est. Pour Alger, elle n'a jamais été aussi blanche, du moins depuis 1999, qu'elle l'a été dans la matinée d'hier. Les Algérois se sont réveillés les yeux éblouis par des chutes de neige remarquables. A Ben Aknoun, Bouzaréah, Hydra et bien d'autres quartiers, le paysage aux reflets multicolores s'est laissé dominer, tôt le matin, par une blancheur inaccoutumée. Un spectacle à la limite de l'exotisme. Peu importe le froid. Des cohortes humaines ont tenu à assister à ces scènes inédites qui nécessitent ordinairement des randonnées dans les montagnes. Aux premières heures de ce jour de Achoura, des dizaines de gens emmitouflés dans leurs plus chauds habits sont sortis dans les rues en vue de profiter, jouer ou contempler cette neige si rare, si enchanteresse. Etrangement, personne ne s'est plaint de la rudesse de telles conditions climatiques. Tout le monde a eu les yeux rivés sur cette ville vêtue de blanc en l'espace de quelques minutes. Ce fut un moment de bonheur intense. Dans certains endroits élevés, les quantités accumulées témoignent de l'abondance des chutes. A Ben Aknoun, par exemple, des couches blanches ont recouvert le bitume ainsi que les toits des constructions. La communauté estudiantine, surtout celle du Sud, s'en est donnée à coeur joie. Par groupes éparpillés, les étudiants s'en sont régalés. Les jeunes gens qui voyaient de près le décor pour la première fois n'ont pas raté «l'événement». Les mains gantées, les têtes coiffées de bonnets, ils ont merveilleusement animé une journée pas comme les autres. Le même mouvement a été constaté à Bouzaréah. Cette cité perchée sur les hauteurs d'Alger a eu plus de chance que le reste des agglomérations. Selon les échos qui nous sont parvenus, tous les coins se sont habillés de blanc donnant lieu à une liesse juvénile sans précédent. Du haut des immeubles, sur les trottoirs, dans les cafétérias, des centaines de personnes ont bien joui des splendides panoramas. Les plus téméraires sont allés jusqu'à défier la dureté de la nature afin de saluer cette neige fort ostensiblement. Avec un degré moindre, Hydra s'est vu visitée par la neige. Là également, le gel matinal n'a pas empêché les Hydriotes de se lever de bonne heure pour découvrir Hydra new-look. La neige a touché aussi des villes comme Ain Taya et Kouba. Malheureusement, le spectacle n'a duré que le temps pris par le soleil pour surgir. Les passages pluvieux ont, pour leur part, contribué à la «tâche». La capitale, à l'image de toutes les régions côtières, détient le faible record d'enneigement. Selon certaines mémoires rafraîchies, depuis l'indépendance il n'y a neigé que trois fois: en 1967,1975 et 1999. Les services météorologiques ont expliqué cette tombée de neige par la vague de froid qui s'est abattue sur le Nord du pays. Rien que pour avant-hier, la neige a été annoncée à 200 mètres au-dessus du niveau de la mer. Ces chutes de neige aussi bien à Alger qu'ailleurs s'ajoutent à une pluviosité très abondante. En fait, l'Algérie a rarement connu une pluie aussi fréquente que cette année. En revanche, si la neige a fait le bonheur des Algérois, il n'en est pas de même ailleurs. A Tizi Ouzou, la Protection civile a signalé la coupure de toutes les routes joignant les localités situées à plus de 500 mètres d'altitude. La même source a fait savoir qu'un problème de ravitaillement en produits alimentaires et en combustibles pour le chauffage peut se poser étant donné que la population habitant les zones montagneuses ne s'attendait nullement à ce climat. Bouira est confrontée à une situation identique à celle de Tizi Ouzou. «La parure blanche» a perturbé et la circulation automobile et le quotidien des citoyens. Ces derniers ont été contraints de s'enfermer chez eux au chaud. Un communiqué de la Gendarmerie nationale a fait état de plusieurs axes routiers bloqués à travers différentes wilayas. Toutefois, aucune communication n'a indiqué des dégâts humains ou matériels. A présent, l'enclavement demeure la seule conséquence inquiétante.