Le président afghan Hamid Karzaï devait se rendre demain au Pakistan pour demander notamment à son voisin de libérer des prisonniers taliban avec l'espoir que ces derniers l'aideront à convaincre les rebelles de négocier la paix. L'influent Pakistan est considéré comme un acteur clé pour mettre fin à 12 ans de conflit en Afghanistan à l'approche, l'an prochain, de la présidentielle afghane et du retrait de la plupart des 87.000 soldats de l'Otan qui soutiennent le gouvernement de M.Karzaï. La visite de M.Karzaï visera également à améliorer des relations toujours méfiantes entre les deux pays, Kaboul accusant Islamabad de soutenir les taliban afghans pour étendre son influence en Afghanistan en déstabilisant son gouvernement. Le Pakistan s'inquiète de son côté de voir l'est afghan devenir une base arrière pour ses propres rebelles, les taliban pakistanais du TTP. Le Pakistan est un allié historique des taliban afghans, qu'il avait aidés à prendre le pouvoir à Kaboul en 1996, et nombre de ces rebelles ont trouvé refuge chez lui après fin 2001 et le renversement de leur régime par les Occidentaux menés par les Etats-Unis, qui ont installé M. Karzaï au pouvoir. Mais Islamabad est également depuis 2001 officiellement allié des Etats-Unis, et a à ce titre arrêté certains cadres taliban afghans réfugiés chez lui. Il a toutefois longtemps rechigné à libérer ces prisonniers devenus importants pour Kaboul et Washington qui, faute d'avoir vaincu militairement les rebelles afghans, cherchent à négocier la paix avec eux. Islamabad a finalement commencé à partir de la fin 2012 à libérer des taliban (26 au total, en deux fois) à la demande de Kaboul, qui espère voir les ex-détenus convaincre la direction des taliban d'entamer des discussions. Ce geste n'a toutefois pas permis de débloquer les choses, et une timide amorce de processus de paix a capoté en juin dernier après l'ouverture d'un bureau des taliban afghans à Doha, au Qatar, une vitrine qui a ulcéré au plus haut point le président Karzaï. Kaboul espère désormais plus de libérations. «Nous allons demander la libération de prisonniers taliban écroués dans les prisons pakistanaises pour différentes raisons, et qui sont intéressés par les pourparlers de paix», a dit Mohamed Ismaïl Qasemyar, un haut responsable du Haut conseil pour la paix (HCP), un organe gouvernemental afghan créé par M.Karzaï pour tenter un rapprochement avec les taliban, et qui sera aussi du voyage au Pakistan. La délégation afghane demandera notamment la libération du mollah Abdul Ghani Baradar, ancien bras droit du mollah Omar, le chef des taliban afghans, a indiqué M.Qasemyar. «L'armée pakistanaise et des leaders civils ont une influence sur les taliban», nous allons donc parler avec eux des façons d'user de cette influence pour nous aider à amener la paix en Afghanistan», a-t-il souligné. Le mollah Omar a récemment fait preuve d'ouverture en affirmant dans une rare déclaration que les taliban ne cherchaient pas à «monopoliser» le pouvoir en Afghanistan après le départ des soldats de l'Otan. Mais les taliban refusent toutefois un dialogue direct avec le président Karzaï, qu'ils considèrent comme une «marionnette» des Etats-Unis. L'ambassadeur d'Afghanistan à Islamabad, Omar Daudzaï, a espéré cette semaine que le Pakistan allait contribuer «honnêtement à ouvrir la voie à des négociations avec les taliban», tout en soulignant que ce processus devait être ensuite «mené par les Afghans». «Le Pakistan a un intérêt véritable à une paix durable en Afghanistan. Il soutient entièrement le processus de paix et de réconciliation afghan et aussi les pourparlers de Doha», souligne de son côté le ministère pakistanais des Affaires étrangères.