Plusieurs manifestations hostiles à M. Erdogan ont été signalées depuis septembre, mais de façon nettement plus dispersée. La police turque est intervenue dans la nuit de vendredi à samedi à Ankara pour disperser des étudiants qui s'opposaient au début des travaux contestés de construction d'une route sur leur campus universitaire. Sur ordre de la municipalité de la capitale turque, les engins de terrassement, protégés par d'importants effectifs des forces de l'ordre, sont entrés en action vers 22h 00 locales et ont commencé à déraciner des arbres pour permettre le passage d'une route au milieu d'un parc de l'université technique du Moyen-Orient (Odtu). Rapidement prévenus du coup d'envoi des travaux, des dizaines d'étudiants se sont rassemblés devant les grilles de l'établissement, a précisé l'agence de presse Dogan. La police a fait usage de gaz lacrymogènes pour les disperser. Le recteur de l'université Odtu, Ahmet Acar, a vigoureusement dénoncé l'opération de la municipalité. «L'Odtu a donné son feu vert au projet de route mais nous n'approuvons pas ce raid nocturne», a déclaré hier, M. Acar, cité sur le site internet du quotidien Hürriyet. «Nous allons porter cette affaire devant la justice». De son côté, l'ONG Greenpeace a dénoncé dans un communiqué de son antenne turque les pratiques «antidémocratiques et inacceptables» de la municipalité d'Ankara. Ce projet d'aménagement contesté, qui prévoit la destruction de quelque 3000 arbres, agite l'université technique du Moyen-Orient d'Ankara depuis plusieurs semaines.Début septembre déjà, les forces de l'ordre sont intervenues à plusieurs reprises pour disperser des manifestations d'étudiants et de défenseurs de l'environnement opposés à ces travaux. Le mois dernier, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan avait balayé ces critiques d'un revers de main. «Sans route, vous ne pourriez même pas aller à l'université», leur avait-il lancé. «Allez vivre dans la forêt. Nous, nous avons besoin de routes pour relier les gens», avait-il ajouté. Cette polémique intervient après les manifestations antigouvernementales qui ont embrasé la Turquie en juin, parties de la mobilisation d'une poignée d'écologistes contre la destruction annoncée d'un petit jardin public d'Istanbul, le parc Gezi, proche de la place Taksim. Le gouvernement islamo-conservateur de M.Erdogan a sévèrement réprimé cette fronde, qui a mobilisé des dizaines de milliers de personnes pendant plus de trois semaines dans de nombreuses grandes villes du pays. Plusieurs manifestations hostiles à M.Erdogan ont été signalées depuis septembre, mais de façon nettement plus dispersée. L'Union des médecins de Turquie a recensé 6 morts et plus de 8000 blessés depuis le début de la contestation. Plusieurs milliers de personnes ont également été arrêtées. Dans un rapport publié au début du mois, Amnesty International a dénoncé des «violations des droits humains à très grande échelle» lors de la répression de ces manifestations.