Jusqu'à preuve du contraire, Djaballah, au même titre que les autres concurrents, a été sévèrement battu par les urnes. L'argument d'une «fraude intelligente» demeure une critique «philosophique» à défaut d'attestation matérielle. Le candidat islamiste qui a cru obstinément figurer dans un second tour «certain», aura à faire face à un cycle d'incertitudes. En effet, on ne peut s'empêcher de s'interroger si Djaballah sera en mesure de garder l'illusion d'être le leader de la première force politique du pays avec un score de 4,84% qui sonne comme une défaite. La tâche s'annonce d'une extrême rudesse. Il est de coutume que les défaites politiques - l'expression semble valable du fait que la fraude n'est pas avérée - s'accompagnent de chamboulements internes. Et c'est le cas d'El Islah qui ne saurait admettre sa stature sur l'échiquier politique national réduite à un stade insignifiant. Ce même parti qui s'est imposé en tant que force incontournable à l'Assemblée populaire nationale a mis dans son escarcelle des centaines de communes et maintenu la flamme d'un islamisme finissant après le scénario chaotique de 1991. Autrement dit, les résultats obtenus par Djaballah sont en net recul comparativement aux exploits individuels réalisés par les militants de se-cond rang. Certains osent le dire à demi-mots : «On s'est trompé de peuple.» A bien lire entre les lignes, on aboutit à l'aveu d'une mauvaise campagne ou du moins une campagne négligente de certaines réalités de la société algérienne. L'électorat islamiste tant convoité ne s'est pas bousculé aux urnes et les appels de quelques dirigeants de l'ex-FIS à soutenir la candidature de Djaballah, sont restés sans écho. Ce sentiment d'échec est partagé par nombre de hauts ca-dres du parti. «Il est évident que le score de 83% ne peut être justifié par la fraude. Même si celle-ci a eu lieu, il n'en demeure pas moins que le peuple a fait son choix», nous a affirmé l'un des responsables d'El Islah au lendemain de l'annonce des résultats. A la lumière de cet état des lieux, Djaballah va-t-il revoir sa stratégie ou continuera-t-il à se cacher derrière le spectre de la fraude? Les réactions de son éminence grise feront sans doute la part des choses. A présent, l'homme fort d'El Islah semble entretenir l'homogénéité du groupe en se prémunissant de toute contestation interne. Que ce soit son directeur de campagne ou son chargé de communication, le mot d'ordre est le même : «La spoliation.» Mais qui sait de quoi sera fait demain, de surcroît en politique?