De l'argument de «la fraude intelligente», Djaballah est passé à d'autres révélations aussi graves qu'inconcevables. Seize jours après la présidentielle, le leader d'El-Islah, M Djaballah, revient à la charge pour clamer à qui veut l'entendre que «El-Islah est plus fort que jamais», et que les résultats qu'il a obtenus au scrutin «ne reflètent point mon ancrage réel au sein de la société». C'est autour de ces deux points qu'il a axé son intervention, avant hier, au club El-Moudjahid devant la commission de suivi des élections. De l'argument de «la fraude intelligente», Djaballah est passé à d'autres révélations aussi graves qu'inconcevables. En fait, est-il pensable que des éléments armés affiliés à des groupes terroristes aient menacé des citoyens de Collo en vue de les amener à voter en faveur de Bouteflika? C'est à travers ce nouveau prisme que le malheureux candidat a tenté, désespérément, de rehausser son aura. Comme il s'est exercé à «prouver logiquement» que l'écrasante victoire du président de la République ne saurait être «saine». «Au temps du parti unique, le président passait à 85%, en 1999 malgré le fait qu'il (Bouteflika Ndlr) était son concurrent, il a eu moins de 74% des suffrages. Et au moment où l'on s'attendait à un deuxième tour, Zerhouni vient de décider autrement en donnant Bouteflika vainqueur à plus de 84%, c'est invraisemblable !», s'est-il indigné. A cet effet, il a pris à témoin les candidats Sadi et Benflis, avec lesquels il était en conclave le jour des élections et qui «m'ont annoncé que l'ensemble de leurs permanences parlaient d'un chassé-croisé entre moi et le président-candidat». Et la résonance a été donnée par les cadres locaux du parti, venus des quatre coins du pays, où chacun évoquait les «entorses» constatées de visu. Mais, probablement, l'intention de Djaballah transcende le souci électoral. Avec la présence de son état-major et ses représentants des quarante-huit wilayas, il y a lieu de penser qu'il s'est agi d'une réplique tacite aux dissidents de l'Ouest, dirigés par le député Aada Fellahi, qui ne cessent de crier à l'effritement du mouvement. Sans les citer nommément, le chef du MRN n'a pas manqué de décocher des flèches à ses adversaires, considérant le leitmotiv de leur dissidence «non fondé». Selon ses dires, quoique vague sur le sujet, le différend serait dû à «l'alliance» tissée avec le candidat du RCD. Connaissant l'intégrisme outrancier de certains éléments, le côtoiement d'un laïc a été perçu comme un renoncement à l'une des constantes du parti. «Faux», a riposté Djaballah. Pour lui, il n'a jamais été question de «s'allier» à Sadi, et leurs rencontres fréquentes tout au long de la campagne électorale n'étaient qu'une «coordination technique» sans plus. Ce qui est, à ses yeux, tout à fait «légal» et du point de vue politique et du point de vue religieux. Ces mises au point semblent produire l'effet contraire. Hier, une dizaine de cadres de la région de Chelghoum El Aïd, une daïra de Mila, ont jeté l'éponge pour dénoncer «les agissements» du maire d'obédience El-Islah. Dans un communiqué parvenu à notre rédaction, les dix démissionnaires, signatures et numéros de cartes d'identité à l'appui, ont regretté la «complaisance» de la sphère supérieure du mouvement, laquelle, a-t-on lu dans le document, a attribué au dit élu la qualité de «meilleur maire d'Algérie au lieu de le sanctionner». Décidément, la dissidence de Aada Fellahi est en train de faire tache d'huile.