«Il y aura toujours de la marginalisation au niveau du rap» Rappeur émérite, guidé par la sagesse, et connu pour ses textes et punchlines percutantes, hauteur de titres ayant fait le buzz, El-Matador, de son vrai nom Mohamed Benjedbar, rappeur marseillais d'origine algérienne, a abordé avec nous dans cet entretien l'univers du rap et les clichés qui l'entourent. Il nous a fait part de sa joie et fierté de se produire en Algérie, et nous a révélé ses futurs projets. L'Expression: El-Matador, pour ceux qui ne te connaissent pas, peux-tu te décrire en quelques mots? El-Matador: Je suis El-Matador, rappeur de Marseille, d'origine algérienne. Je suis né en France mais mes parents sont nés en Algérie, j'ai fait trois albums, avec de nombreux titres qui ont été tournés à la radio et télévision. Ma particularité à moi, c'est que je me suis fait connaître à travers des musiques de films que j'ai faites comme Taxi 4 et 300 (spartiates). J'ai reçu une révélation au trophée du hip-hop en 2008. Pour mon dernier album (poussière d'étoile) qui est sorti, j'ai tenté l'aventure en indépendant. Aujourd'hui, on se débrouille comme on peut, avec les moyens du bord. On utilise beaucoup l'outil internet. Justement, Internet s'est avéré un outil indispensable pour un artiste, surtout pour un indépendant... Exactement, moi je crois que sans Internet, je n'aurai pas pu faire ce que je fais aujourd'hui. J'ai bien compris l'outil, j'arrive à faire des morceaux qui vont parler d'eux-mêmes, comme le morceau Polémiquement incorrect ou encore Les beurettes aiment. On sait comment faire réagir les gens, et comment faire le buzz. Quel sentiment te procure le fait de te produire pour la première fois en Algérie? En effet, c'est la première fois que je me produis en Algérie, c'est la première fois que je viens en tant que chanteur. Donc pour moi, c'est une grande fierté. Ça fait longtemps que des gens m'ont sollicité. Franchement, je suis en plein kiff, l'accueil est super chaleureux. Moi je connais le pays, donc on est là, on est fier, on va représenter. On déplore un manque de rappeurs qui viennent se produire en Algérie, sachant que le rap a ses fans ici en Algérie, cela est dû à quoi, à ton avis? Je crois que c'est dû au manque de communication entre les promoteurs ici en Algérie et les gens qui s'occupent du management en France. Par exemple, nous, tous les étés on va au Maroc, en Tunisie. Donc après, je ne sais pas quel réseau ils ont eux, ils nous contactent facilement et on arrive à s'arranger. Mêmes nous entre rappeurs algériens, on se dit comment ça se fait qu'on va beaucoup plus au Maroc et en Tunisie qu'en Algérie. Voilà j'espère que pour le futur cette situation va un petit peu se débloquer, comme ça on pourra venir tout le temps. El-Matador, le rap est marginalisé au sein de l'univers musical, il y a certains clichés. Qu'en penses-tu? Franchement, le rap ça n'a jamais été une belle histoire d'amour avec la France. Quand il est arrivé en France, tous les médias et les sociologues se sont dit que c'était un courant qui va passer et mourir, soit un effet de mode, comme il y a eu la tektonik par exemple. Puis il s'est avéré que le rap s'est maintenu et s'est très vite répandu. Tu sais que l'Etat a toujours un problème avec tout ce qui est revendication. Et la base même du rap c'est la revendication, donc automatiquement, ils ne sont pas d'accord. Aujourd'hui il y a beaucoup de gens qui arrivent à démocratiser la musique rap comme par exemple Maître Gims (sexion d'assaut) qui font des trucs super ouverts, qui font que les gens se disent j'aurai jamais kiffé du rap et là j'entends du rap. Comment pourrait-on se débarrasser de ces clichés à ton avis? Le rap a besoin de revendications, ça veut dire qu'il faudrait s'autocensurer, et faire des trucs super lisses pour plaire aux gens. Mais on sait que chaque artiste a sa personnalité et son univers, et chacun quand il fait son texte, il a envie de se vider et de dire ce qu'il a envie de dire. Je pense qu'il y aura toujours de la marginalisation au niveau du rap. El-Matador, tu fais partie d'une minorité de rappeurs guidés par la sagesse et qui transportent un message pacifique. Comment expliques-tu que vous soyez si peu à véhiculer de tels messages? Tout d'abord, merci pour le compliment. Franchement, moi j'ai eu une éducation. Si tu veux je n'ai pas envie d'envoyer les jeunes au casse-pipe, ce n'est pas dans ma mentalité. Par exemple en mon petit frère je lui dis essaye de faire des études, mais si t'a envie de rapper, fais-le mais pour le plaisir c'est tout. Moi le rap, ça m'est tombé dessus, j'ai eu des ouvertures, après je me suis mis à rentrer dedans, je ne me suis pas dis, oui, je vais devenir rappeur. Quels sont tes futurs projets? Pour l'instant, j'ai un titre avec DJ-Kayz qui va sortir dans une dizaine de jours. C'est un morceau assez ouvert, il s'appelle «Copacabana». C'est un titre un peu reggaeton vu que c'est l'été. Sinon, je prépare un EP qui s'intitule 13 NRV, qui sortira Inchallah vers le mois de septembre ou octobre, parce que je suis presque sur la fin, il est en mixage, j'attends juste de faire un ou deux clips, après je le balance.