Le Nigeria accueillait hier une réunion internationale sur la sécurité et la lutte contre le groupe islamiste armé Boko Haram, qui menace de s'emparer du nord-est du pays après une série d'attaques fulgurantes. Les ministres des Affaires étrangères du Bénin, du Cameroun, du Tchad et du Niger se retrouvent à Abuja avec leur homologue nigérian. Des représentants américains, français, britanniques, chinois et canadiens sont également attendus, ainsi que de l'ONU, de l'Union africaine, de la Cédéao (l'organisation de l'Afrique de l'Ouest) et de l'Organisation de la coopération islamique. Cette réunion d'une journée vise à «faire le point sur la mise en oeuvre des mesures décidées lors des précédentes réunions» qui se sont tenues dans la lignée du Sommet de Paris en mai, notamment «l'aide internationale» pour combattre l'insurrection de Boko Haram, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères nigérian. A la suite du sommet de Paris, les Occidentaux avaient annoncé l'envoi de spécialistes du renseignement et d'avions espions au Nigeria mais, selon des sources diplomatiques, la coopération est restée au point mort. «Le terrorisme et le crime organisé nous obligent à mener une action Commune», a insisté le président tchadien Idriss Déby mardi à Nairobi lors d'un sommet de l'Union africaine contre le terrorisme. Le directeur des renseignements extérieurs kenyans, Chris Mburu, avait exhorté la semaine dernière les pays africains à «travailler ensemble, regrouper leurs ressources, partager leurs renseignements et leurs informations afin de relever le défi». «L'ampleur et la sophistication» des attaques des groupes armés islamistes «requiert une réponse collective plus robuste au niveau régional et continental», estimaient des experts de l'Institut d'étude sur la sécurité (ISS) d'Addis-Abeba dans un récent article. De fait, au Nigeria, l'armée, mal équipée et démoralisée, semble incapable d'enrayer seule la progression de Boko Haram, qui, après des années d'actions de guérilla et d'attentats, affronte désormais de manière conventionnelle les militaires, selon les spécialistes du Nigeria Security Network (NSN). Boko Haram a attaqué lundi et mardi la cité stratégique de Bama, deuxième ville de l'Etat de Borno. Selon des témoignages d'habitants, la ville est tombée entre leurs mains, mais l'armée et les autorités continuaient de démentir hier. A partir de Bama, les insurgés pourraient attaquer la capitale de l'Etat et métropole du nord-est du Nigeria, Maiduguri, à seulement 70 kilomètres de là. «Le Nigeria est sur le point de perdre le contrôle de l'Etat de Borno, y compris de sa capitale Maiduguri», ce qui permettrait à Boko Haram de «réaliser son ambition d'établir un califat dans le nord-est du Nigeria», se sont alarmés mardi les experts du NSN dans un rapport. «Si Borno tombe, des territoires des Etats voisins de Yobe et d'Adamawa pourraient suivre», ainsi que «des territoires camerounais frontaliers», «dans un scénario similaire à la progression fulgurante de l'Etat islamique en Irak» et en Syrie, estiment-ils. Des combats ont d'ailleurs opposé mardi l'armée camerounaise à Boko Haram sur la frontière mardi. L'armée camerounaise a affirmé avoir tué «une quarantaine» de combattants islamistes qui «tentaient de franchir» le pont de Fotokol, ville frontalière camerounaise voisine de la ville nigériane de Gamboru Ngala prise par Boko Haram la semaine dernière.