Quand le 10 octobre dernier, le Maroc demanda le report de la CAN 2015 - qu'il doit organiser du 17 janvier au 8 février - pour cause d' «Ebola», cela eut l'effet d'un véritable pavé dans la mare. En fait, pour des raisons que seule Rabat devait connaître, le Royaume chérifien - sous couvert de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) qui prévoyait une extension de la maladie dans les mois, voire les semaines à venir - crée ainsi un périlleux précédent pour le plus populaire des sports en Afrique. Nombre de questions demeurent sans réponses tant sur les raisons - celles avancées par Rabat ne satisfassent, à l'évidence, personne - d'un désistement qui ne dit pas son nom, que sur le pourquoi d'un timing - à trois mois du rendez-vous du football africain - qui est loin d'être innocent. Cela a mis dans l'embarras la Confédération africaine (CAF) et ses sponsors de même que les dizaines de pays qui concourent durement pour gagner le droit de participer à cette fête du football. Ce qui est surprenant en fait est que le Maroc, qui a été à plusieurs reprises candidat à l'organisation de la Coupe du monde - organisa l'an dernier le Mondial des clubs (il l'organisera à nouveau à partir du 10 décembre) et ce n'est pas le moindre, aura l'organisation de la CAN 2015, dont il a été déjà l'hôte en 1988 -, se mette de la sorte en porte-à-faux et se fasse hara-kiri. Par ailleurs, pour le Maroc, l'organisation de ces rendez-vous prestigieux reste vitale pour son économie impulsée par le tourisme. Les autorités marocaines excipent, pour justifier leur abandon de l'organisation de la CAN 2015, du fait des risques encourus par la population, induits par un tel rassemblement de foule. En fait, l'OMS n'interdit les rassemblements que dans les trois pays foyers du virus. Renonçant à la CAN 2015, cela aurait été logique, que le Maroc lâche également l'organisation de la Coupe du monde des clubs champions, qui aura lieu chez lui à partir du 10 décembre prochain. En effet, comment se pourrait-il qu'il puisse y avoir risque d'«Ebola» en janvier 2015 et pas en décembre 2014? Or, au plan sanitaire, l'épidémie «Ebola» n'a pas progressé vers d'autres pays africains. De plus, cette pandémie, qui certes sema la panique, est parfaitement maîtrisable pour peu que les services de santé fonctionnent correctement. Le Sénégal et le Nigeria - malgré des moyens sanitaires limités et peu préparés à faire face à une telle épidémie - sont ainsi arrivés à se débarrasser d'Ebola comme l'annonça l'OMS vendredi dernier, pour le premier, et lundi dernier pour le second. Dans les pays foyers du virus (Liberia, Sierra Leone et la Guinée) outre des hôpitaux vétustes, leurs services de santé ont été défaillants dans la prise en charge de l'épidémie à son début en décembre 2013. Même l'OMS, n'a pas été vigilante à l'annonce des premiers cas d'Ebola, prenant du retard dans la prise en charge correcte de la pandémie. Maintenant le monde entier a pris conscience du danger de cette maladie et il est peu probable que d'autres foyers se déclarent pour peu que l'on reste attentif à sa progression et se préparer en conséquence. Des cas - certes isolés - ont été détectés, notamment en Espagne et aux Etats-Unis, mais sans réel danger pour la santé de la population. Aussi, l'alarmisme dont fait montre le Maroc est étonnant, d'autant plus que les pays concernés par l'épidémie sont déjà éliminés de la CAN, donc peu de risques que leurs supporters voyagent au Maroc, plus préoccupés des problèmes induits par le malheur qui les a frappés que vraiment intéressés à suivre une coupe d'Afrique de laquelle leurs pays seront absents. Au plan sanitaire, l'épidémie est tout à fait contrôlable dès lors que les autorités sont préparées pour ce faire. Au plan sportif, un report, et plus encore une annulation, de la CAN 2015 sera catastrophique pour la Confédération africaine de football et pour l'Afrique. Soyons sérieux, si le Maroc ne veut pas organiser la 30e CAN pour cause d'Ebola, comment la CAF pourrait-elle demander à d'autres pays de le faire. Si Ebola fait peur au Maroc, pourquoi les pays sollicités par la CAF seraient-ils immunisés? La réalité est qu'aucun pays africain n'est en mesure d'organiser au pied levé un rendez-vous qui nécessite des moyens (financiers, infrastructurels et communicationnels) très lourds. Notons toutefois, que le Nigeria, un pays qui a résisté au virus Ebola se dit prêt à remplacer le Maroc, mettant ainsi à nu l'hypocrisie des autorités marocaines dont le prétexte «Ebola» est désormais insoutenable. A moins, pour ainsi dire, que la perspective de voir l'Algérie triompher chez son voisin de l'Ouest, mortifie le roi - qui remet le trophée aux vainqueurs - et rend malades nos «frères» marocains!