Depuis quelques mois on assiste à la montée inquiétante de l'islamophobie en Europe. En France, ce sont les écrivains qui commencent les hostilités contre l'islam à travers leurs romans et déclarations déplacées. Le dernier en date c'est Michel Houellebecq à travers son sixième roman Soumission sorti le 7 janvier et qui pose une nouvelle problématique de l'islam en France. Cette politique-fiction de 300 pages n'est pas une «satire», insiste l'auteur de La carte et le territoire, prix Goncourt 2010. Il y fait le portrait d'une France dirigée en 2022 par un président musulman, aidé par la Fraternité musulmane après une alliance avec le Parti socialiste, l'UMP et le Centre pour faire barrage au Front national de Marine Le Pen. Michel Houellebecq, un des écrivains français les plus lus à l'étranger, n'en est pas à sa première polémique concernant l'islam. Même si son roman n'est pas ouvertement islamophobe, il pose réellement le problème de la montée des musulmans au sommet du pouvoir en France. Les Arabes étaient la deuxième communauté étrangère la plus forte en France, il pose la question sur le vote des étrangers qui a été souvent exposé sur la scène politique française. Avant lui un autre écrivain et intellectuel français s'est attaqué violemment aux musulmans: Eric Zemmour. Le journaliste essayiste, dont les propos estampillés racistes, xénophobes ou sexistes font souvent du bruit, a encore frappé en s'exprimant dans le journal italien Corriere della Serra. Dans son interview, publiée le 30 octobre dernier, Eric Zemmour avait proposé de déporter 5 millions de musulmans français? «Qui aurait dit en 1940 qu'un million de pieds-noirs, vingt ans plus tard, seraient partis d'Algérie pour revenir en France?», avait-il rajouté. C'est la polémique de trop puisque très vite Bernard Cazeneuve, le ministre français de l'Intérieur a condamné le 16 décembre, avec une extrême fermeté les propos tenus par Eric Zemmour. Ces propos scandaleux ont obligé la chaîne Itélé à rompre son contrat avec l'écrivain. Mais l'islamophobie touche également les partis politiques. Chez l'extrême droite où les réactions sur le voile, les traditions musulmanes durant l'Aïd et le Ramadhan, sont quotidiennes, pour exclure les Arabes et les musulmans. Mais aujourd'hui, même les Français de souche ne sont pas épargnés. Maxence Buttey, élu Front national en Seine-Saint-Denis qui s'était converti à l'islam et avait été temporairement suspendu par le parti qui l'accusait de prosélytisme, a été démis de ses fonctions départementales dans le parti, le 9 décembre. Les attaques contre les musulmans sont également légion chez les élus de la droite et en pole position c'est Nadine Morano, la députée de l'UMP qui est la plus anti-musulmane sur le terrain à travers ses réactions sur le voile musulman. Même le gouvernement PS appuie cette islamophobie puisque le ministère de l'Intérieur a introduit une note interdisant aux femmes voilées de se promener sur le Trocadero, le lieu le plus prisé par les touristes. Jamais la haine du musulman n'a été aussi forte en France que depuis ces deux dernières années affirment les observateurs et analystes. Même du temps de la droite qui avait interdit le voile à l'école, les musulmans ne se sont pas senti aussi touchés dans leur chair. Ceci intervient au moment où la communauté musulmane n'a jamais été aussi forte en France. Une étude du Pew Research Center donne le chiffre de 4,7 millions de musulmans en 2010. L'islam est considéré comme la seconde religion en France après le christianisme. Selon une étude de l'Ined et de l'Insee publiée en octobre 2010, ce nombre comprendrait 70.000 à 110.000 convertis. Le ministère de l'Intérieur chargé des cultes a indiqué en 2010 qu'il y a entre 5 et 6 millions de musulmans en France, estimation obtenue en comptant cette fois-ci pour musulmanes toutes les personnes venant d'un pays à dominante musulmane. Curieusement, cette situation est vécue dans un pays qui était jusque-là épargné par le phénomène du racisme anti-musulman. En Allemagne, un mouvement anti-islam et anti-réfugiés Pegida, qui a été lancé à l'automne, séduit une partie de la population mais suscite aussi une opposition farouche. De la chancelière Angela Merkel aux anonymes de la société civile, des Allemands ont lancé la riposte contre ce qu'ils considèrent comme un mouvement populiste et dangereux. Les autorités allemandes s'inquiétaient hier pour l'image du pays malgré une mobilisation antiraciste majoritaire à l'échelle nationale en Allemagne. Dans un pays encore marqué par son passé nazi et qui cherche à attirer des immigrés pour compenser son déclin démographique, la multiplication de manifestations xénophobes ces dernières semaines a provoqué une levée de boucliers sans précédent: politiques, médias, milieux d'affaires et de nombreux citoyens sur les réseaux sociaux ou dans la rue, mobilisés contre l'islamophobie. Un habitant sur cinq en Allemagne a une origine étrangère, selon l'Office des statistiques, et le pays est devenu en 2012, la principale destination d'immigration en Europe, accueillant cette année-là 400.000 nouveaux arrivants, selon l'Ocde. C'est aussi la première destination des demandeurs d'asile en Europe. Depuis début 2014, l'Allemagne a accueilli 180.000 réfugiés (+57% par rapport à la même période en 2013). Mais cette islamophobie est encouragée par l'image négative qu'offre l'Etat islamique à travers ses actions terroristes dans le monde et qui empêchent de nombreuses associations et mouvements musulmans de protéger leur communauté en Europe, préférant faire confiance à la justice et au droit des institutions européennes.