Au RND, on pousse la logique du fonctionnariat jusqu'au bout pour l'appliquer à l'action politique. Au FLN, on estime que le chahut est une preuve de vie. Hasard du calendrier ou actions concertées en haut lieu, l'opinion nationale a assisté le même jour à la consécration de Amar Saâdani et la démission de Abdelkader Bensalah. Ainsi, les deux formations politiques du pouvoir ont soldé leurs comptes avec leurs crises respectives. Mais si au final, les choses sont rentrées dans l'ordre à quelques heures d'intervalle, les moyens utilisés par le RND et le FLN n'auront pas été les mêmes. Et pour cause, au moment où au vieux parti, les belligérants en sont arrivés à la justice après un long feuilleton d'insultes réciproques et de «guerre médiatique» à longueur de colonnes dans la presse nationale et sur les plateaux de télévision, au RND, il a suffi d'une simple feuille 21X27 pour passer à autre chose. Au FLN, le groupe Belayat disait à qui voulait l'entendre que Saâdani a squatté illégalement le siège et les instances dirigeantes du parti et monté tout un scénario pour l'en déloger, tout en affirmant son plein soutien au président de la République. Les contestataires du secrétaire général n'ont rien laissé au hasard. Ils ont usé de tous les moyens pour se faire entendre du président, des cadres et des militants du parti. Le grand bruit fait autour du contrôle du FLN a donné de cette formation politique, l'image d'un grand «n'importe quoi» où tout le monde peut dire ce qu'il veut de tout le monde. Bref, les batailles du FLN sont assourdissantes. L'épisode que l'opinion vient de connaître n'est pas isolé, loin de là. Face à ce «bouillonnement» politique et militant, le RND prend l'apparence d'un parti réglé comme du papier à musique. Les rendez-vous organiques sont respectés, la vie militante se déroule comme un long fleuve tranquille. Rien ne transparaît de la vie du parti, sauf ce que les cadres eux-mêmes veulent en montrer. En d'autres termes, du haut de ses 17 ans d'existence, le parti de Abdelkader Bensalah et de Ahmed Ouyahia donne l'impression d'une sagesse qu'on ne retrouve pas au FLN. Ainsi, cette jeune formation, née pour exercer le pouvoir, fait montre d'un esprit de discipline qu'on ne retrouve pas ailleurs au niveau de la scène politique nationale. Formé principalement par des organisations de la «famille révolutionnaire», de celles des enfants de chouhada et des enfants des moudjahidine, le RND compte également dans ses rangs beaucoup de hauts fonctionnaires et d'universitaires. En fait, créé par le pouvoir pour suppléer à la «défection» du FLN, à l'époque en crise, après l'épisode du contrat de Rome, le RND avait la mission de gouverner et s'est donné les moyens humains pour ce faire. Ce parti a donné, faut-il le rappeler, beaucoup de ministres à la République. Et disons-le franchement, «un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne», pour reprendre la célèbre déclaration de l'ancien ministre français de la Défense, Jean-Pierre Chevènement. Au RND, on pousse la logique du fonctionnariat jusqu'au bout, pour l'appliquer à l'action politique. Et pour cause, le geste de Bensalah n'est pas un précédent dans la vie du parti, puisqu'il ne fait que perpétuer une «tradition» inspirée par Ahmed Ouyahia qui, face à la contestation de cadres du conseil national a préféré rendre le tablier, plutôt que d'offrir le parti en spectacle. Même si les militants du FLN n'entendent pas suivre l'exemple du RND, estimant que ce qui se passe périodiquement dans leur parti est la preuve qu'il est le coeur battant de la scène nationale, leurs camarades du RND ne sont pas peu fiers de donner à l'opinion nationale l'image d'un parti stable où les responsables ne se disputent pas le pouvoir au risque de mettre à mal le parti. Il reste que cette «coïncidence» FLN-RND annonce une reconfiguration de la scène politique, sachant que par ailleurs, le MSP connaît quelques couacs, Makri étant sérieusement menacé par une fronde interne au parti islamiste qui l'accuse de n'avoir pas atteint ses objectifs. En effet, le retour à l'opposition imprimée par Abderrezak Makri n'a pas eu l'effet souhaité sur l'audience du MSP à la base. Bien au contraire, disent des sources proches de la formation islamiste, laissant entendre que la tendance Soltani gonfle sérieusement dans les instances dirigeantes du MSP. L'année prochaine ou au plus tard au lendemain des législatives 2017, l'Alliance présidentielle pourrait renaître de ses cendres, plus forte qu'avant, avec l'apport du MPA de Amara Benyounès et TAJ de Amar Ghoul. Un scénario que rejette Abderrezak Makri, mais qui est sur les tablettes des décideurs.