Nouria Benghebrit tient bien la barre Nous sommes au coeur de la rentrée scolaire, Benghebrit est toujours à son poste. Signe que les forces de la régression n'ont pas gagné. C'est aujourd'hui la rentrée pour plus de 8 millions d'élèves. C'est aussi un test grandeur nature pour la ministre de l'Education nationale qui a «bataillé» tout l'été à préparer cet événement, de loin, le plus populaire de l'année. Les millions de familles algériennes, les centaines de milliers d'enseignants et autres travailleurs de la famille de l'éducation rejoignent leur lieu d'études et de travail. La rentrée scolaire, synonyme également du retour des embouteillages, engage, pour ainsi dire, l'ensemble de la société algérienne. Le décor ainsi planté, c'est tout le pays qui reprend les réflexes, oubliés durant les vacances. Mais il faut souligner que l'été n'a pas été tendre pour Nouria Benghebrit qui a subi les foudres du courant islamo-conservateur sur la question de la langue d'enseignement aux deux premières années du cycle primaire. L'on a, en effet, assisté à une campagne politico-médiatique féroce dirigée contre la ministre de l'Education nationale. Ainsi, la Conférence nationale d'évaluation du système éducatif, organisée en juillet dernier et qui a accouché de la proposition sur la langue parlée pour l'enseignement dans le cycle primaire, a beaucoup perdu de son sens, puisque d'innombrables autres propositions, ont été occultées par le chahut islamiste. On n'en saura donc pas grand-chose sur le contenu des livres scolaires, la dimension identitaire dans l'enseignement, l'organisation de l'examen du baccalauréat et beaucoup d'autres points soulevés par les spécialistes lors de la conférence en question. Mais disons-le franchement, les forces de la régression ne s'intéressent pas prioritairement aux aspects techniques et pédagogiques, tant que l'école reste dans leur giron, celui de leur idéologie qu'ils veulent dominante. La résistance de la ministre qui avait, faut-il le souligner, le front syndical à apaiser avant la rentrée scolaire, a constitué sa force face à ses détracteurs. Le poids des idéologies Aujourd'hui, nous sommes au coeur de la rentrée scolaire, Benghebrit est toujours à son poste et son engagement de réformer l'école, en la soutirant de l'influence idéologique n'a pas souffert du bras de fer, particulièrement dur, entre une approche qui fait la promotion de l'école intelligente et un discours développé par les forces islamo-conservatrices qui la tirent vers le bas, sous prétexte d'une authenticité ramenée d'ailleurs. Le «combat» très politique, du reste, a forcé l'opinion nationale à mesurer l'importance des luttes qui font rage autour de l'institution éducative. L'enjeu est tout de même de taille, lorsqu'on sait que l'Ecole algérienne reçoit plus de 8 millions d'élèves, dont plus de 4 millions fréquentent le cycle primaire, plus de 2,6 millions de collégiens et près de 1,4 million de lycéens. Ces adultes de demain feront l'opinion et les décisions dans quelques années. Ils sont encadrés par plus de 400.000 enseignants. Ces chiffres donnent une idée de la puissance d'un secteur auquel l'Etat réserve la dotation budgétaire la plus importante, après la Défense nationale. Nonobstant les failles du système éducatif national, le défi de la tutelle est d'obtenir dans un futur assez proche une génération de citoyens travailleurs, bien pensants et ouverts sur le monde. Mais pareil objectif est-il raisonnable dans le contexte d'anarchie où vit l'école avec un taux de cours effectif, l'un des plus bas au monde. En effet, l'élève algérien ne perçoit que 24 à 27 semaines de cours réellement dispensés par an, alors que la moyenne de l'Unesco tourne autour de 32 semaines de cours effectivement dispensés. Ce grand écart s'explique par des vacances trop longues, de mai à septembre et une récurrence des mouvements sociaux qui coûtent à l'Education nationale, quelque 4 à 5 semaines, bon an, mal an. 532 établissements non achevés! La conséquence directe de cette situation, tient dans le fait que l'élève algérien perd quelque deux années de cours durant son cursus scolaire. Et l'on se pose la question sur la faiblesse du niveau des lycéens. Sur ce volet, la ministre de l'Education nationale mise, pour cette année, sur une occupation des salles de cours de l'ordre de 32 semaines. Elle a mis les bouchées doubles pour y parvenir. Aussi, la rentrée d'aujourd'hui est une rentrée effective. Les élèves de toute la République devraient débuter leurs cours dès aujourd'hui. La semaine du 5 au 11 septembre devra être comptabilisée comme un temps réservé à l'enseignement. C'est là l'un des principaux challenges de la ministre. Cependant, il n'est pas dit que la détermination de la tutelle à se rapprocher des normes mondiales en matière de semaines de cours dispensés soit garantie. Et pour cause, les syndicats des enseignants se tiennent en embuscade. Ils ont systématisé les grèves, ces dernières années et il n'y a pas de raison que cela change pour l'actuelle année scolaire. Les parents d'élèves se félicitent, certes, du fait que cette rentrée est sereine, mais certains échos du côté des syndicats, notamment du Cnapeste, disent que le risque d'un mouvement social n'est pas à écarter après l'entame de l'année scolaire. On peut néanmoins assurer que malgré les pesanteurs politiques et syndicales, Nouria Benghebrit a bel et bien réussi son test grandeur nature. Il lui reste à imprimer la même cadence pour réaliser quelques-uns de ses objectifs prioritaires. Mais le tableau n'est pas si reluisant que cela, faut-il le préciser. Et pour cause, en matière d'infrastructures, c'est zéro pointé pour le secteur. Et c'est le directeur de l'enseignement primaire et moyen au ministère de l'Education nationale, Fatih Mourad Mohamed, qui révèle le pot au roses. Il nous apprend que pas moins de 532 projets d'établissements scolaires (écoles, CEM, lycées) «devant être réceptionnés à l'échelle nationale, avant la rentrée scolaire n'ont pas encore été finalisés». Le chiffre est proprement hallucinant. «263 écoles primaires, 112 CEM et 157 lycées, ainsi que 1248 classes supplémentaires prévues dans le cycle primaire et 37 classes en préfabriqué devaient être réceptionnés dans le cadre de la rentrée scolaire», détaille M.Fatih Mourad Mohamed. Cela représente des milliers et des milliers d'élèves qui auront de grandes difficultés à étudier, à cause d'entrepreneur ou d'une administration qui n'a pas fait son travail. cette situation conduira à n'en pas douter à une aggravation du sempiternel problème de surcharge des classes.