A l'instar de tout le pays, et peut-être un peu plus qu'ailleurs, Tizi Ouzou et la Kabylie ont vécu une folle nuit, vendredi. La victoire du club phare kabyle a plongé la région dans une liesse, sans précédent, depuis les événements. La JSK a offert à la Kabylie une victoire et une nuit de liesse. Rompant avec la grisaille des mauvais jours, la région - notamment les jeunes - a renoué avec la joie, oubliant l'espace d'un instant, la colère, la hargne et la grogne. En ramenant dans ses bagages la 5e étoile, Hannachi, qui a eu bien des malheurs avec la mise à sac des bureaux du club par des nervis et surtout le décès tragique de Ali Bouha, son bras droit, l'homme sur qui il se reposait, a oublié un instant ces moments difficiles. Vendredi, la fièvre envahit la Kabylie. Des torrents humains en bus, en fourgons ou en voitures rallient Alger dès les premières heures de la matinée. Les villes et villages de Kabylie, principalement Tizi Ouzou, disparaissent sous les fanions et les oriflammes aux couleurs Jaune et Vert, du club. Mais la fête, la vraie, commence à la 30e minute de jeu, quand Zaffour, d'un coup de tête, signe la victoire. Un immense «hourrah» retentit en Kabylie. Dès la fin du match, les jeunes qui n'ont pu rejoindre la capitale occupent la rue. En bandes joyeuses et en groupes bruyants, ils sillonnent les rues de la cité kabyle. Les rires, la joie, la bonne humeur étaient partout. Certes, devant la brigade de la Gendarmerie, on lance quelques «Ulac smah ulac», beaucoup plus un cri spontané qu'une provocation. D'ailleurs, les gendarmes eux-mêmes, les «adversaires» déclarés de la jeunesse de la région, se sont mis de la fête. On nous a ainsi signalé que depuis la brigade, les éléments de la gendarmerie faisaient de grands signes de la main aux jeunes en fête. Cela se passait, par exemple, du côté de Boghni. C'est dire que la fête a su garder son cachet sportif. Les quelques «Ulac smah ulac» ont été noyés dans les «Chebka ya Zaffour», «Kabylie zahia elyoum», «Gaouaoui-Perruzi» et aussi l'éternel «Anwa wigui dimazighène!». La fête était dans la cité. Aux jeunes fans du club qui sillonnaient les artères des cités de Kabylie, répondaient souvent, depuis les balcons, des youyous éclatants. Le summum était atteint au retour des jeunes, partis le matin, sur Alger. Avertisseurs à fond, derboukas et vivats mêlés souvent au bruit de pétards fusent de partout. La joie règne. Les villes et villages de Kabylie ont eu droit à leur nuit colorée. Ce n'est que vers quatre heures du matin, saoulés de bruits, que les jeunes, transis de froid, ont regagné dans le calme leur foyer. Le lendemain, malgré la fatigue, près d'un millier de lycéens, dont au moins la moitié sont des filles, ont profité de la pause de midi pour sillonner les rues menant au stade du 1er-Novembre. Oriflammes de la JSK en tête, les jeunes ont marqué un arrêt au carrefour jouxtant la gendarmerie, pour entonner le chant à la gloire de la JSK: «Chebka ya Capsulla!». Quelques vieux et même une vieille dame se sont mêlés à ces jeunes pour esquisser un pas de danse. Les automobilistes, bloqués dans cet embouteillage, ont finalement bien pris la chose, attendant patiemment que le flot des lycéens passe. La JSK à l'honneur a su rendre le sourire à une population marquée durement par de tragiques événements. Le temps d'une soirée a suffi au club kabyle pour faire oublier, quelque peu, le tragique du moment à une population qui n'en peut plus! La véritable coupe qu'ont gagnée «les Canaris», au-delà de ce trophée africain, est sans doute celle de rendre le sourire aux Algériens et particulièrement aux Kabyles.