Il aura cependant laissé en héritage à l'Algérie un précieux butin qui lui servira à reconstituer tout le puzzle de son identité. Il aurait pu être un personnage de roman. Tant sa vie a été exceptionnelle et son parcours fabuleux. Il a été carrément romancier. Une facette peu connue du grand public. Pour tisser lui-même la trame de ses oeuvres. Pour mieux coller à sa personnalité à ce parcours hors du commun qui le caractérise et fait de lui un homme exceptionnel comme seule l'Algérie révolutionnaire a su enfanter. Pour accéder à ce stade suprême du dépassement de soi. Dans le but de faire revenir sur scène certains grands hommes. Afin de les faire connaître des jeunes générations. Une façon aussi de convoquer l'Histoire pour que celle de l'Algérie ne soit pas amputée d'une partie d'elle-même. Pour que ses enfants qui n'ont à aucun moment hésité à faire don d'eux-mêmes pour qu'elle soit libre, ne tombent pas dans l'oubli. Ce fut le cas pour Cheikh Bouamama une figure historique, un combattant hors pair reconnu et personnage mystique algérien qui a dirigé la résistance contre le colonialisme français de 1881 à 1908. Un film dont le scénario a été écrit par Boualem Bessaih retrace l'épopée de ce chef de guerre sans peur et sans reproche. Un film qui fut réalisé par le talentueux Benamar Bakhti avec dans le rôle de notre héros un Athmane Ariouet époustouflant. Parmi ses oeuvres littéraires et historiques majeures il y a son dernier ouvrage publié à l'occasion du 50e anniversaire de l'indépendance, L'Algérie belle et rebelle, de Jugurtha à Novembre qui a été préfacé par le président de la République Abdelaziz Bouteflika. Un livre dans lequel il retrace la longue gestation de la nation algérienne. Dans la douleur. Comme savent le faire les artistes authentiques avec cette sensibilité à fleur de peau qui les caractérise et cette envie chronique de vouloir brûler la vie par les deux bouts. Les mots choisis pour le dire sont comme des tranches de vie qui déroulent le fil sinueux de l'histoire de l'Algérie. Bessaih excelle dans cet art. C'est de l'or en barre tout simplement. Cela coule comme de l'eau de roche. Apprécions: «Il coule dans ma veine un sang chaud de Berbère phénicien ou romain byzantin hilalien ma présence est antique, authentique est ma terre je fus ce que j'étais, aujourd'hui algérien,» peut-on lire en page 12 de ce bel ouvrage d'où est tiré ce quatrain d'un poème intitulé. «Domination romaine». Une autre manière d'écrire l'Histoire tout en menant de front une carrière bien remplie d'homme politique de premier plan qui taquine la muse de facon remarquable. Une autre corde dans l'arc de notre artiste, méconnue du grand public. Bessaih est parti sans avoir eu le temps de décocher une nouvelle flèche. Il aura cependant laissé en héritage à l'Algérie un précieux butin qui lui servira à reconstituer tout le puzzle de son identité. Dans tous ses ouvrages s'entremêlent et s'entrechoquent la révolution, le combat, la résistance et la poésie, dans une cohabitation déconcertante. Une sorte d'alchimie qui donne à ce type de création un cachet particulier qui porte la griffe de Bessaih. Bibliograhie Mohamed Belkheir, étendard interdit, édition bilingue, Sindbad Paris, 1976; De l'émir Abdelkader à l'imam Chamyl. Le héros des Tchétchènes et du Caucase, 1re édit. Dahleb, 1997, 2e édit. ENAG, Alger, 2001; De Louis-Philipe à Napoléon III. L'émir Abdelkader, vaincu mais triomphant, SNED, Alger, 2002, édit. en langue arabe, ANEP, Alger- El Farabi, Beyrouth, 2004; Au bout de l'authenticité, la résistance par l'épée ou la plume, ENAG, Alger, 2002; Abdellah Ben Kerriou, poète de Laghouat et du Sahara, édition bilingue, Publi-Sud, Paris, 2003. L'épopée du Cheikh Bouamama, bande dessinée, avec Masmoudi (Entreprise nationale du livre, Alger, 1986, 51 p) L'Algérie belle et rebelle: de Jugurtha à Novembre: poèmes, Editions Anep 2004