La Palestine a mis une partie de l'intelligentsia algérienne dans tous ses états. De quoi s'agit-il? D'un manuel scolaire de géographie d'où le nom «Palestine» était absent. Une erreur d'inattention, ou un contrôle en amont mal fait? Sans doute! Mais, nous semble-t-il, le problème n'est pas là, il interpelle néanmoins sur une vérité occultée: l'enseignement biaisé de l'histoire et de la géographie de l'Algérie et dudit Monde arabe. L'histoire de l'Algérie - de l'Antiquité à nos jours - dans ce qu'elle a de positif et de négatif, reste méconnue de la génération post-indépendance, laquelle est mise dans l'incapacité de se situer par rapport à son voisinage immédiat, de l'aire géographique de laquelle «on» se revendique [le Monde arabe] d'autres cultures et genres de vie. Cette méconnaissance de notre propre vécu historique - auquel a été substitué un vécu importé, ladite «nation arabe» - a celé ce fantastique brassage qui a fait de l'Algérie ce qu'elle est: un pays à part, sans rien de comparable, dans le continuum arabe. C'est celle-là notre richesse, notre identité que l'on veut réduire et troquer pour un mimétisme arabe qui n'est point le nôtre. C'est parce que nous ne sommes pas nous-mêmes que nous faisons tout faux, induisant une crise identitaire sans fin. Ce qui nous permet de revenir sur la notion d'enseignement et la qualité avec laquelle nos enfants sont instruits des faits du monde qui les entoure et dans lequel ils se meuvent. La géographie est un des éléments clés qui forment l'intellect de l'enfant et le situent parmi les autres peuples. C'est dans ce contexte qu'une page d'un manuel scolaire de géographie a provoqué une véritable tempête dans la classe politique et particulièrement chez les islamo-conservateurs qui ont saisi au vol, ce qui apparaît comme une erreur - rectifiable sans pour autant lyncher personne et chercher un complot qui n'existe pas - pour le médiatiser comme le scandale du siècle. Les baâthistes et les islamistes ont-ils encore frappé? Le questionnement est opportun et approprié eu égard à une question - la Palestine - dont les Algériens en ont fait une cause nationale. Alors, la Palestine? La bonne affaire! Une erreur, cela se corrige. De fait, c'est le dimensionnement qui lui est donné qui interpelle. Dans le manuel scolaire de géographie sus-indiqué, apparaît le nom d'«Israël» à la place de celui de la Palestine. Les préposés à la confection du manuel ont repris une carte du Moyen-Orient (en arabe) sans en vérifier le contenu et, partant, de «corriger» si besoin (?). Alors où est l'enjeu de cette polémique? La Palestine a été tellement instrumentalisée - et continue de l'être - et sa cause manipulée par les Arabes [les dirigeants politiques, les islamo-conservateurs, une certaine intelligentsia] que cette levée de boucliers est tout, sauf sincère. Veut-on enseigner le faux? En effet, il y a un fait patent: toutes les cartes de géographie du monde - y compris le planisphère de l'ONU - signalent «Israël» dans cette région. Ce n'est pas en effaçant «Israël» du livre [que l'on enseigne aux élèves] que la Palestine va renaître. Depuis 69 ans - partage de la Palestine historique entre deux Etats en novembre 1947 - les «Arabes» ont eu certes largement le temps pour rendre justice à la Palestine [siège du troisième Lieu saint de l'islam]. L'ont-ils fait, ont-ils seulement cherché à le faire? A l'exception de la Syrie, du Liban et de l'Irak au Moyen-Orient, de l'Algérie et de la Libye en Afrique du Nord, l'ensemble des pays arabes ont, peu ou prou - à un niveau ou à un autre - des relations [diplomatiques et commerciales] avec l'Etat hébreu. Alors arrêtons de divaguer. Il aurait été profitable de tirer profit de cette erreur pour enseigner à nos enfants comment la Palestine a été dépecée et spoliée. Ce n'est pas en les maintenant dans l'ignorance de ces faits d'histoire et de géographie que nos enfants pourront demain se faire une opinion sur cette triste page de ladite «nation arabe». Si sur les bancs de l'école ils n'apprennent pas les réalités de notre monde (cf; le charcutage du Moyen-Orient et la Palestine laminée) comment, devenus adultes, ces enfants vont-ils comprendre les conflits et les enjeux de cette région? Ce n'est pas en enfonçant sa tête dans le sable - comme de tenir nos enfants dans l'ignorance de cette réalité géographique - que le problème cesse d'exister. C'est plus facile de faire de l'agit-prop et de jouer aux censeurs. C'est connu, seuls ceux qui ne mettent pas la main à la pâte ne se trompent pas. C'est connu aussi, ces critiques se satisfont de l'apparence qu'ils veulent imposer. Ce n'est pas le sort de la Palestine qui les préoccupe - on l'aurait su - mais le fait que des gens travaillent à sortir le pays du carcan de «constantes» mal comprises et mal à propos.