L'ex-ministre français de l'Economie s'est lancé hier dans la course en plaçant cette énième candidature sous le signe du renouvellement face à un «système politique bloqué». L'entrée en lice de l'ancien ministre de François Hollande rebat les cartes. Se posant en homme nouveau, l'ancien protégé du président socialiste Français Hollande, qui est au plus bas dans les sondages, a appelé à «sortir du statu quo» politique et des «recettes du siècle dernier» pour répondre aux défis d'un «monde en plein bouleversement». «J'ai vu de l'intérieur la vacuité de notre système politique (...). Ce système, je le refuse», a dit celui qui a démissionné du gouvernement en août après avoir fondé son propre mouvement «ni de droite ni de gauche». Lors de son discours prononcé depuis Bobigny, une banlieue populaire du nord-est de Paris, il a appelé à une «révolution démocratique profonde». Son entrée en lice risque d'accentuer la fragmentation de la gauche française, à laquelle les sondages prédisent régulièrement une défaite dès le premier tour de la présidentielle le 27 avril prochain, face à une extrême droite remontée à bloc par la victoire de Donald Trump aux Etats-Unis et à une droite décidée à revenir à l'Elysée. Son annonce intervient à quelques jours du premier tour de la primaire à droite, prévue dimanche, avec sept candidats en lice. Le scrutin s'annonce serré, d'autant que l'ex-Premier ministre François Fillon remonte dans les sondages et pourrait finir par menacer les deux favoris, l'ancien président Nicolas Sarkozy et l'ex-Premier ministre Alain Juppé. «Mêmes visages, mêmes hommes, mêmes idées», a taclé Emmanuel Macron, 38 ans, en visant tant la droite que la gauche. Il avait posé les jalons de sa candidature en mars, en fondant son mouvement baptisé «En Marche». Celui qui revendique la liberté de «dire ce qu'il pense quoi qu'il en coûte» avait ensuite démissionné du gouvernement et entretenu le mystère sur ses intentions. Inconnu du grand public il y a encore deux ans, il a atteint en un temps record une notoriété et un niveau d'organisation enviables: près de 100.000 adhérents structurés en plus de 1700 comités locaux, plus de 2,7 millions d'euros de dons, une cinquantaine de parlementaires conquis, égrènent ses proches. Son discours séduit notamment les jeunes urbains et les milieux d'affaires. Plus largement, les Français s'intéressent à l'émergence d'une nouvelle tête sur un échiquier politique qui peine à se renouveler. Sans même avoir présenté de programme concret, il jouit de 49% de bonnes opinions, selon un récent sondage. Sur le plan économique et social, celui qui a démarré sa carrière au sein de la banque Rothschild veut simplifier «des normes trop rigides». Sur les questions de société, il assume des positions libérales et s'est par exemple opposé au projet de déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour terrorisme porté par son ancien mentor François Hollande. Sa candidature soulève l'inquiétude à gauche mais aussi à droite et chaque camp tente de décrédibiliser le nouveau venu. Pour gouverner, «il faut de l'expérience et refuser les aventures individuelles», a souligné le Premier ministre Manuel Valls. «L'enjeu (pour 2017), c'est le rassemblement, c'est la cohésion», la gauche ne pouvant pas être au «rendez-vous» de la présidentielle «si elle n'est pas rassemblée», a prévenu dès mardi soir François Hollande. Le président, très impopulaire, doit dire d'ici un mois s'il brigue un nouveau mandat en dépit des très mauvais sondages. Pour le secrétaire d'Etat chargé du Commerce extérieur, Matthias Fekl, M. Macron est le «candidat de ceux qui veulent faire exploser la gauche». «C'est très embêtant», a pour sa part concédé le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis. L'extrême droite, elle, juge que sa candidature s'ajoute à une offre «libérale», déjà «complètement saturée». «Je ne crois pas que le candidat des banques puisse être un renouveau», a commenté la chef du Front national, Marine Le Pen.