Des millions d'Iraniens sont descendus hier dans les rues pour marquer le 38e anniversaire de la révolution islamique, l'occasion de dénoncer la politique anti-iranienne du président Donald Trump. «Il faut parler au peuple iranien avec respect. Quiconque utilise le langage de la menace, le peuple iranien le lui fera regretter», a déclaré le président Hassan Rohani devant des centaines de milliers de personnes rassemblées place Azadi à Téhéran. D'immenses défilés rassemblant des millions de personnes ont également eu lieu dans la plupart des villes iraniennes, selon les images de la télévision publique Irib. «Les manifestations avec des millions d'Iraniens montrent la puissance de l'Iran islamique», a ajouté le président Rohani. «Ceux qui menacent notre gouvernement, nos forces armées, doivent savoir que notre peuple est uni et résistera jusqu'au bout face aux ennemis», a-t-il affirmé. Selon lui, il s'agit d'une «réponse aux propos mensongers des nouveaux dirigeants de la Maison- Blanche». «Les Iraniens ne craignent pas les menaces», pouvait-on lire sur des photos de Trump, Netanyahu et Theresa May, brandis par les manifestants. Ils brandissaient aussi des photos de l'ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême, qui avait appelé mardi les Iraniens à «répondre» aux menaces du président Trump en défilant (hier) pour célébrer la victoire de la révolution islamique, qui a renversé en 1979 le régime du Shah d'Iran, allié des Etats-Unis. Les deux pays n'ont pas de relations diplomatiques depuis 1980, quelques mois après la révolution et l'invasion de l'ambassade américaine par des étudiants islamiques. «La présence de la population est un message à Trump: s'il commet une erreur, le peuple le lui fera regretter», a déclaré le député réformateur Mostapha Kavakebian, présent au défilé de Téhéran. Ghassem Soleimani, chef des opérations extérieures des Gardiens de la révolution, était également présent dans la foule. Des manifestants ont toutefois tenu à montrer leur gratitude envers de nombreux Américains qui se sont mobilisés contre un décret de Donald Trump interdisant l'entrée aux Etats-Unis des ressortissants de sept pays à majorité musulmane, dont l'Iran. Le décret est actuellement bloqué au grand dam du président américain. «A bas le régime, vive le peuple» américain, pouvait-on lire sur des pancartes. Le chef de file des réformateurs, l'ex-président Mohammad Khatami (1997-2005), pourtant soumis à des restrictions à sa liberté par le pouvoir, avait appelé les Iraniens à participer massivement aux défilés «pour neutraliser les complots». «Face à n'importe quelle menace contre le régime, l'intégrité territoriale et les intérêts nationaux, nous n'hésiterons pas un instant à résister», a-il dit, appelant à la «réconciliation nationale». Depuis l'investiture de M. Trump le 20 janvier, le ton n'a cessé de monter entre Washington et Téhéran. L'annonce il y a une semaine des nouvelles sanctions américaines, liées à un tir de missiles balistique par l'Iran, a entraîné la riposte immédiate de Téhéran qui a annoncé des mesures de réciprocité visant «des individus et des entreprises américaines» soutenant des groupes «terroristes». Cette réciprocité à l'encontre de citoyens américains avait déjà été appliquée après la décision par Washington d'interdire l'entrée aux Etats-Unis des ressortissants musulmans. Une mesure «insultante» et «honteuse», selon Téhéran. M. Trump a multiplié sur son compte Twitter les petites phrases incendiaires contre l'Iran, accusant notamment ce pays de «jouer avec le feu». Dans une tentative d'apaiser les tensions, le président Rohani a assuré jeudi que la puissance militaire de l'Iran était «uniquement défensive». En revanche, l'Iran exclut de renoncer à ce qu'il estime être son droit souverain de tester des missiles portant des armes conventionnelles et non-nucléaires, uniquement destinées à la défense de son territoire face à ses ennemis. Si M. Trump a mis à exécution ses menaces de durcir la position américaine envers Téhéran, il n'a pour l'instant pas fait dérailler l'accord international sur le nucléaire iranien scellé en 2015 par son prédécesseur Barack Obama et qu'il a vertement dénoncé.