Restituer la mémoire de notre pays par les portraits de nos différents acteurs historiques, sociaux et culturels et ce, grâce à la photo, reste son-passe temps favori, sa passion. Lui, c'est Abdou Benmaâmar. Amateur de photos, M.Abdou Benmaâmar est avant tout un collectionneur de portraits d'hommes célèbres, qui ont marqué l'histoire de l'Algérie, à l'image de ces valeureux martyrs et autres révolutionnaires qui ont conduit le pays à son indépendance. Leur image serait gravée, à tout jamais, dans notre mémoire, tant que nous nous souviendrons d'eux à travers ces photos, vues au musée ou bien dans un documentaire à la télé... c'est de préserver notre mémoire de l'oubli, que tend justement l'artiste Benmaâmar. Ce dernier est propriétaire d'une grande galerie d'art (500m²) sise à Tlemcen. Il possède actuellement 4.000 photos toutes en noir et blanc. Un choix de couleur motivé sans aucun doute par le souci de mettre l'accent ou traduire au mieux «l'authenticité» de ces images. Ouverte en 1995, cette galerie qui porte le non du chahid Tahar Meziani, a abrité diverses expositions notamment en hommage à nos martyrs, tombés au Champ d'honneur, et ce, aux quatre coins du pays, «du Nord au Centre, en passant par l'Est et l'Ouest». C'est avec quelque 800 portraits de chouhada (Amirouche, Zabana, le colonel Lotfi...) que Benmaâmar avait déroulé le fil de notre histoire, celui de la Guerre de libération nationale lors de sa seconde exposition. Le but de ce chevronné de la photo, est, en fait, d'immortaliser ces figures emblématiques qui ont fait l'histoire et continuent à susciter l'intérêt dans tous les domaines, politique, historique, culturel... Aussi, parmi ces personnalités que l'on connaît issues de l'univers culturel et dont Abdou a su, d'un geste adroit de la main, les saisir en image, on peut citer le musicien pianiste Mustapha Skandrani, le talentueux comédien Sid Ali Kouiret, le cheikh Redouane Bensari. Un artiste qui se trouve dans la même situation d'éxil que Cheikh El Hasnaoui. L'un à Casablanca et l'autre en Nouvelle-Calédonie. Pour enrichir davantage sa collection, Abdou n'hésite pas à partir en voyage pour aller à la rencontre de ces hommes notamment, ceux qui sont les témoins de notre temps et garants de notre patrimoine. «Je compte bientôt partir à Paris pour rencontrer Cherif Khedam», nous confie-t-il. Quand l'artiste n'est pas là, c'est à Abdou donc de se déplacer et faire oeuvre de «prospection» en quête de cette photo susceptible d'apporter ou de mettre enfin un visage sur le nom d'un de nos illustres artistes. Cela fait par ailleurs, trente ans, que ce tlemcenien opère ce travail de recherche d'où il puise un certain bien-être et une satisfaction réelle. Une tâche ardue tout de même et pourtant bien nécessaire et d'un apport utile ne serait-ce que pour les archivistes. Aujourd'hui, faut-il l'avouer, il est devenu quasiment impossible de «tomber» sur une photo d'El Hasnaoui par exemple. Même les anciennes viennent à disparaître. Elles sont pour ainsi dire introuvables. Il est désormais urgent de nous restituer cette manne visuelle qui compose notre patrimoine culturel, malheureusement en constante déperdition. Aussi, pour témoigner de notre mémoire collective, les photos d'Abdou ont souvent fait l'objet d'expositions dans plusieurs salles, notamment à Blida, à la salle Ibn Khaldoun, au Palais de la culture (Alger) à la bibliothèque nationale d'El Hamma, lors de différents colloques notamment celui organisé sur l'initiative de la fondation El Mokrani dont il est membre, et qui avait pour thème Les violences de la décolonisation. M.Benmaâmar avait participé en exposant quelque 200 portraits de nos martyrs. Juste avant, il y avait ce colloque intitulé Quand la France torturait... Aussi pour commémorer la date du 8 mai 45... sa date de naissance, au grand dam de la providence! La photo, c'est depuis qu'il est tout petit qu'il s'y est intéressé. Plus tard, il évoluera dans les métiers de la restauration, avant d'ouvrir son propre motel en 1987 et en y installant à l'intérieur une galerie d'art en 1995. «Elle sera probablement ouverte l'année prochaine aux artistes-peintres désireux d'exposer leurs oeuvres», nous apprend Abdou. A l'occasion de cet événement exceptionnel qui ne manquera pas de marquer l'année 2003, celui de l'année de l'Algérie en France en l'occurrence, M.Benmaâmar espère y prendre part. Avec pour la première fois, un nouveau support pour ses oeuvres. De la céramique comme matière pour affiner ses portraits et de la moucharabieh comme ornement pour ses cadres. Il compte par ailleurs exposer des figures des deux rives de la Méditerranée soit l'Algérie et la France d'avant la révolution à nos jours (Jean Moulin, De Gaulles, l'émir Abdelkader, Lala Fatma Nsoumer, Napoléon III, Messali El-Hadj...) Pour la pérennité de notre histoire, gageons que son projet sera retenu.