Le droit d'auteur aujourd'hui se caractérise par la diversité des modes d'utilisation des oeuvres Sami Bencheikh, directeur de l'Onda était l'invité cette semaine de la chaîne télé France24 en tant que membre de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et de compositeurs (Cisac) où il a fait le bilan de l'avancement des droits d'auteur en Afrique. «En 2016 plus de neuf milliards d'euros ont été collectés dans le monde pour les artistes, mais la part de l'Afrique est seulement de 67 millions d'euros» annoncera d'emblée le journaliste et présentateur de cette émission placée sous le thème «Droits d'auteurs en Afrique: des artistes au régime sec». Entamant cette table ronde, le directeur général de l'Onda dira que les résultats sont en nette croissance: «Le droit d'auteur et la Cisac avancent dans le monde. Le droit d'auteur aujourd'hui se caractérise par la diversité des modes d'utilisation des oeuvres: le numérique, le digital, les plateformes. Il y a une sorte de transfert aussi bien de la création à la diffusion des oeuvres. Je pense que notre confédération a relevé le défi et les sociétés de gestion collective à travers le monde, que ce soit en Europe, en Amérique latine, en Asie et aux Etats-Unis, se sont nettement développées et font face à ce développement technologique.» Abordant la carte géographique où le droit d'auteur est en expansion il est pourtant montré clairement que l'Afrique reste en deçà par rapport aux autres pays au monde. «L'Afrique reste le parent pauvre malgré tous les efforts que fait la Cisac» a reconnu Bencheickh. Relativisant tout de même son propos, il expliquera que «le droit d'auteur avance tout de même en Afrique», soulignant en outre qu'il y a deux pays où la gestion collective est assurée d'une manière pleine, à savoir l'Algérie et l'Afrique du Sud. «Les auteurs et compositeurs vivent une véritable crise aujourd'hui du fait de ce transfert que je viens de citer. Grâce à la redevance pour copie privée ça permet de compenser les pertes et préjudices du fait de la crise de l'éditons musicale. Tous les créateurs ont du mal à vivre de leur rémunération.» Et d'annoncer: «L'Algérie a collecté pour l'année 2016 environ 50 millions de dollars et nous avons des chiffres très importants et ce grâce notamment à la redevance sur copie privée justement.» Pourquoi cela ne marche t-il pas aussi bien dans le reste des pays africains? lui demande-t-on. Et le directeur de l'Onda de rétorquer: «Il s'agit avant tout de traditions. Notre office existe depuis 1973. Bien avant il y avait la société française, la Sacd qui est restée 11 ans en Algérie après l'indépendance. Non seulement cela n'était pas le cas dans les autres pays, mais les bureaux de la Casem n'étaient pas aussi bien installés et pas très bien répartis sur le continent.» Aussi, pour que cela change dans les autres pays africains, Sami Bencheikh dira qu'il faut associer à la fois la volonté politique aux moyens et d'estimer que «l'Algérie a fait des pas de géant en matière de gestion collective. C'est grâce essentiellement à la volonté politique. Le gouvernement est là pour nous soutenir. Je suis en contact avec les autres pays africains où ce n'est pas le cas. Vous avez des radios étatiques, des télés ou des exploitants, des utilisateurs des oeuvres qui relèvent de l'Etat qui eux-mêmes sont récalcitrants et résistent pour payer. Cela ne peut pas se passer en Algérie. Les radios payent leurs redevances». Bencheikh fera remarquer que l'Onda constitue une école de formation dans la gestion collective des droits d'auteur. «L'Ompi (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, ndlr) accorde des bourses de formation aux pays africains francophones et arabes, pour venir se former en Algérie. Grace à la Cisac (Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs, ndlr) nous avons développé cette assistance en direction des pays voisins.» Il fera aussi remarquer que beaucoup d'artistes partent hélas! aujourd'hui en Europe ou aux Etats-Unis pour justement avoir leurs droits d'auteurs car le système dans les pays africains n'a pas évolué, les mécanismes ne sont pas mis en place et ne répondent véritablement pas aux exigences de la gestion collective. Evoquant l'opération de saisie qu'établit l'Onda et qu'il médiatise au moins une fois dans l'année par un chantier de CD qui sont broyés devant un large public, le directeur général de l'Onda dira que ce qui est cherché par cet acte est «la communication, la sensibilisation en choquant l'opinion publique et la société civile. Parce qu'au cours de ces opérations nous invitons les plus grands artistes, mais aussi les membres des gouvernements, les télés et les radios et on leur dit voilà ce qu'on fait. C'est effectuer d'une pierre, deux coups.» Est- ce que cela coûte beaucoup d'argent pour créer un organe de collecte d'argent pour les droits d'artistes en Afrique? Bencheihk dira que non pour la simple raison a t-il relevé que «ces sociétés vivent de leurs collectes». Nous avons en Algérie une institution qui compte 260 travailleurs. 17 bureaux régionaux avec des inspecteurs et des contrôleurs qui vont justement collecter des redevances auprès des discothèques, des grands hôtels, des restaurants etc. la musique est partout: chez le dentiste, dans un showroom, au standard...» Donnant son avis sur le pays africain qui serait actuellement sur les traces de l'Algérie, Bencheikh, sans hésitation nommera la Côte d'Ivoire. «Le pays a revu son cadre légal et ils sont en train de faire des choses», a-t-il estimé.