Le docteur Mohamed Taileb est le délégué d'Alger du Collectif national des médecins résidents algériens (Camra). Dans cet entretien, celui qui est l'un des membres les plus influents du mouvement de protestation des médecins résidents en grève depuis deux mois, revient sur le boycott de l'examen des études médicales spécialisées (Dems). Une première dans l'histoire qui dit-il, va bloquer en partie le service -civil. L'Expression: Bonjour docteur Taileb, les médecins résidents ont boycotté aujourd'hui (hier, ndlr) les premières épreuves de l'examen des études médicales spécialisées (Dems). Qu'est-ce que cela signifie-t-il exactement? Docteur Mohamed Taileb: C'est une étape charnière dans notre mouvement de protestation. Car, cela veut tout simplement dire que s'il n'y a pas l'examen des études médicales spécialisées (Dems), il n'y aura pas de nouveaux médecins spécialistes pour le service civil. Donc pas de répartitions, dans les nouveaux postes. Ce «service inutile» sera bloqué. C'est donc la meilleure preuve de l'échec de ce système qui ne porte de service que le nom. Car, au fond, il n'apporte rien à la couverture sanitaire des populations. C'est juste un moyen pour l'Etat de faire semblant de garantir la santé pour tous. Nous voulons une solution qui garantisse la présence efficace des médecins dans les zones reculées. Je le répète, c'est un sacrifice inutile qui a montré ses limites, et avec le boycott d'aujourd'hui les résidents ont prouvé qu'ils étaient déterminés à mettre fin à cette mascarade. Avec le boycott d'aujourd'hui, ce n'est qu'une bataille de gagnée. Le planning du Dems a été maintenu. Ne craignez-vous pas que les autres spécialités ne suivent pas ce mouvement de boycott? Absolument pas. Avant de prendre cette difficile décision les délégués du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra) ont consulté la base et ont effectué des sondages. Les résidents sont presque à l'unanimité pour ce boycott. Plus de 900 médecins résidents en pédiatrie ont montré qu'ils ont validé cette action qui vise à sauvegarder leur dignité et mettre fin à ce service civil qui est anticonstitutionnel. Il faut comprendre que ce ras-le-bol dure depuis plus d'une dizaine d'années. Ça mijote chez les résidents qui se retrouvent piégés par une disposition qui les oblige à aller pendant une durée soit-elle dans une zone reculée du pays, sans que cela ne soit utile aux populations de ces zones. L'échec du service civil est avéré, et ce, depuis des années. C'est sa forme actuelle qui exige d'être revue. Ce n'est ni plus ni moins que du chantage, car notre diplôme est en quelque sorte hypothéqué jusqu'à l'accomplissement de ce service. Les résidents sont donc déterminés à aller jusqu'au bout car on sent que cette-fois c'est la bonne... Quelle sera la prochaine étape de votre mouvement? Avant de parler de ce que nous prévoyons de faire, je tiens d'abord à préciser que nous continuons d'assurer le service minimum à nos patients. Nous avons écrit une lettre ouverte au président de la République Abdelaziz Bouteflika, nous avons aussi déposé une lettre à la chefferie du gouvernement pour leur demander d'intervenir. Nous poursuivons nos grèves et sit-in au niveau de nos établissements respectifs. Mardi, nous avons un rassemblement à Oran comme celui de mercredi dernier à Alger. Si on continue de nous ignorer, on envisage d'aller vers la démission collective. On n'a plus peur des conséquences, on n'a plus rien à perdre. On en a marre!