L'écho du mouvement de débrayage est loin d'être majoritaire Ces manipulateurs ont frappé ces temps-ci pour exercer un chantage contre l'Etat: sa ministre de l'Education contre la paix sociale. Le Cnapeste a indirectement livré son véritable objectif dans la grève illimitée qu'il a initiée depuis près de deux semaines. Reçu par le ministre du Travail, son représentant a révélé le souhait du syndicat d'avoir un intermédiaire, comme si son action n'était pas simplement un mouvement de contestation à l'appui de revendications socioprofessionnelles, mais un bras de fer avec la ministre de l'Education nationale, dont l'issue passera forcément par un gagnant et un perdant. Le Cnapeste qui revendique une «puissance de frappe» nationale ne semble pas vouloir laisser tomber ses «atouts» après une discussion avec un ministre hors tutelle. Les animateurs de ce syndicat veulent voir dans l'appel au dialogue du ministre du Travail une victoire, non pas des travailleurs qu'ils disent représenter, mais contre la personne de la ministre qu'ils veulent mettre en minorité devant l'opinion nationale. En un mot comme en mille, l'idée consiste à faire comprendre aux lycéens et à leurs parents que «la grève cessera avec l'abdication de Benghebrit». Tout le reste n'est que mise en scène pour aboutir à un objectif, visiblement tracé depuis le double «malentendu» de Blida et Béjaïa. Partis sur un «fait divers» qui pourrait se produire dans n'importe quelle administration, dans n'importe quel pays du monde, les animateurs du Cnapeste ont trouvé le moyen de faire durer le malaise à coups de provocations, histoire de bien chauffer les enseignants de ces deux wilayas. Sachant que le temps jouait en leur faveur, ils ont amené la situation au pourrissement pour pousser l'administration centrale et locale à la faute. La ponction sur les salaires et les procédures de radiation des enseignants grévistes auront été l'occasion pour la direction du Cnapeste de donner un élan national aux «petites» grèves de Béjaïa et Blida. Même si l'écho du mouvement de débrayage est loin d'être majoritaire, il reste qu'une bonne communication de la direction du syndicat donne une impression d'un taux de suivi important. Cela dit, même avec 20% de grévistes, le fait de savoir que des dizaines de milliers de lycéens risquent une année blanche, suffit à susciter l'inquiétude de l'opinion publique. Le discours «jusqu'au-boutiste» des animateurs du Cnapeste accentue l'impression de crise et met la ministre de l'Education nationale face à une situation de quasi-impasse, pour la simple raison que les circonstances même qui ont conduit à la grève ne peuvent objectivement faire l'objet d'une négociation en haut lieu. La seule issue, dans ce cas, c'est la justice. Celle-ci a tranché pour l'illégalité du débrayage. Les choses qui devaient en rester là, ont, au contraire, pris une direction plus dangereuse, en ce sens que le Cnapeste a trouvé dans la rencontre avec le ministre du Travail, l'occasion d'enclencher la seconde phase de son plan: il veut maintenant la tête de la ministre. C'est exactement le but de toute cette agitation qui n'est, en réalité, que la suite logique d'une série d'offensives lancées par les tenants de l'islamisme bête et méchant. Ces derniers ont, tour à tour, accusé la ministre de porter un nom juif, confier à des experts français la confection des manuels scolaires, d'avoir réduit la part des sciences islamiques dans le programme de scolarité, d'attaquer la langue arabe classique au profit du dialecte algérien... et la liste des griefs islamistes est encore longue. Défaits sur toutes ces «batailles», les milieux islamo-conservateurs qui comptent en leur sein des animateurs du Cnapeste, parmi lesquels se recrutent d'anciens militants de l'ex-FIS, tentent une énième offensive en usant cette fois de l'«arme» de la grève. On n'entendra aucun responsable du Cnapeste sortir un argument politique contre Benghebrit, mais le but ultime de toute cette agitation est justement une mise à mort politique de la ministre de l'Education nationale. Le choix de la période, à quelque 14 mois de la prochaine élection présidentielle, n'est pas innocent. Les islamistes savent combien la phase que traverse le pays est sensible. Ils ont frappé ces temps-ci pour exercer un chantage contre l'Etat: sa ministre de l'Education contre la paix sociale. Cela peut paraître scénarisé, mais les indices du complot ne manquent pas, à commencer par l'empressement du Cnapeste à faire cavalier seul sur cette action raisonnablement insensée. Pourquoi donc un syndicat risque-t-il sa crédibilité et même son existence sur une revendication déjà prise en charge en commissions mixtes? En prenant le risque de se mettre à dos l'ensemble de leurs confrères, les animateurs du Cnapeste savent pertinemment que la finalité pourrait être la disparition du syndicat. Pareille conséquence est considérée par des politiques «avisés» comme dommage collatéral si, au final, l'objectif principal est atteint.