Le SG de l'ONU réclame lui aussi la trêve On comprend, dès lors, la prudence déterminée de la Russie qui garde en mémoire la fameuse résolution sur une intervention en Libye, devenue très vite une véritable expédition contre le régime de Maâmmar al Gueddafi. Au Conseil de sécurité de l'ONU, ces dernières quarante-huit heures, la Russie s'est retrouvée au four et au charbon. D'abord, il était question du vote d'une résolution demandant une trêve d'au moins 30 jours pour assurer l'acheminement de l'aide humanitaire et l'évacuation des blessés de la Ghouta orientale en Syrie, un texte soumis par la Suède et le Koweït, et fortement appuyé par les puissances occidentales, unanimes dans leur effort de porter secours aux factions extrémistes assiégées par l'armée syrienne. Après deux reports successifs, le vote a finalement été programmé pour hier soir, après que le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov ait pointé les non-dits des pays concernés par cette résolution. «Le Conseil de sécurité de l'ONU cherche à adopter une résolution qui propose de mettre en place immédiatement une trêve de 30 jours au minimum. Mais personne ne peut répondre à la question de savoir si les combattants (extrémistes) respecteront cette trêve, personne ne donne de garanties», a-t-il déclaré vendredi soir à Moscou. «Pour que cette résolution soit efficace - et nous sommes prêts à donner notre accord à un texte qui le sera - nous proposons une formule permettant de rendre la trêve réelle et basée sur les garanties de tous ceux qui sont à l'intérieur et à l'extérieur de la Ghouta orientale... Ces garanties doivent, bien évidemment, être appuyées par celles des acteurs extérieurs, avant tout, ceux qui ont de l'influence sur les groupes extrémistes restants dans cette banlieue de Damas, notamment les Américains... Donc, si les Américains et leurs alliés sont guidés par le souci de la situation humanitaire et de la population civile, il y a toutes les possibilités pour qu'on se mette d'accord. Mais, pour l'heure, ils rejettent un amendement qui les rendrait responsables d'obtenir des extrémistes des garanties claires qu'ils cessent leur tirs», a conclu M. Lavrov. On comprend, dès lors, la prudence déterminée de la Russie qui garde en mémoire la fameuse résolution sur une intervention en Libye devenue très vite une véritable expédition contre le régime de Maâmmar al Gueddafi. Face aux pressions et aux surenchères de diverses capitales très impliquées dans la guerre en Syrie, Moscou agit en conséquence et adopte une démarche valable aussi bien pour son allié syrien que pour son allié iranien. La Russie s'est en effet opposée vendredi dernier à un projet de texte du Royaume-Uni soutenu par les Etats-Unis et la France, portant une condamnation assortie de sanctions contre l'Iran, au motif qu'il n'a pas empêché la livraison d'armes aux rebelles yéménites houthis. Comme pour le texte concernant la Syrie, Moscou a rejeté la mouture présentée et des discussions se poursuivent pour prendre en compte ces arguments selon lesquels le rapport de l'ONU ne contient aucune preuve de l'implication directe de Téhéran dans cette affaire. Quant aux débris de missiles exposés dernièrement par les Etats-Unis, ils ont beau être iraniens, mais ne signifient en aucune façon son implication effective dans le conflit du Yémen, marqué par le vote d'un embargo sur les armes en 2015. Là aussi, les pressions américaines pour arracher une condamnation et des sanctions contre l'Iran alors que le rapport de l'ONU estime que «l'Iran a failli à ses obligations en n'empêchant pas l'arrivée au Yémen de ces missiles», mais reconnaît en même temps «ne pas être en mesure d'identifier les responsables ou les canaux de transmission ayant permis aux Houthis de se doter de ces armes. En termes clairs, les accusations reposent sur des a priori contestables et donc contestés par la Russie. Tandis que la réunion du Conseil de sécurité, reportée à trois reprises vendredi dernier, devait avoir lieu hier soir pour examiner le projet de résolution sur la trêve à la Ghouta orientale, la Turquie a fini par réagir en exhortant la communauté internationale «à dire stop de façon unanime au massacre» que «le régime (du président syrien (Bachar al-Assad) est en train de commettre». Ankara a soutenu dès 2011 les factions extrémistes qui combattaient en Syrie comme en Irak, y compris Al Nosra, devenue Fateh al Islam, et ses alliés de Jaïch al Islam et Faylak al Rahman, ne prenant ses distances vis-à-vis d'elles qu'au lendemain de son rapprochement avec la Russie, parrainant le processus de négociations d'Astana en tant que parrain de l'Armée syrienne libre (ASL), un groupe rebelle actuellement engagé à ses côtés dans l'opération de «nettoyage» de la région d'Afrine visant les Kurdes des YPG. En somme, c'est l'exemple même de l'adage qui dit: «Faites ce que je dis et ne regardez pas ce que je fais»...