La chancelière allemande, Angela Merkel avec sa probable successeuse à la tête du CDU (parti au pouvoir) Annegret Kramp-Karrenbauer Angela Merkel a promis hier un «renouveau» à son parti conservateur, qui doit approuver sur fond de fronde interne un projet de gouvernement commun avec les sociaux-démocrates après cinq mois d'imbroglio politique en Allemagne. Les mille délégués du parti démocrate-chrétien (CDU) sont réunis depuis la fin de matinée à Berlin avec comme objectif principal de valider le contrat de coalition négocié aux forceps au début du mois entre le mouvement, son allié bavarois (CSU) et les sociaux-démocrates (SPD). L'Europe en particulier attend que l'Allemagne se dote enfin d'un gouvernement, le quatrième de Mme Merkel, cinq mois après les législatives de septembre qui ont laissé la première puissance économique du continent dans une situation inédite: sans majorité claire et avec une extrême droite en plein essor. «Ce congrès a une mission claire: nous voulons participer à la constitution d'un gouvernement stable et efficace. Les attentes en ce sens sont très claires chez la majorité écrasante des habitants du pays, mais aussi au-delà de nos frontières», a résumé Mme Merkel. La CDU devrait approuver sans problème le contrat de coalition, le vrai test restant le référendum interne au parti social-démocrate dont les résultats devaient être annoncés dimanche. Or, le SPD est divisé sur le sujet et un rejet de l'alliance ouvrirait une crise gouvernementale sans précédent dans l'Allemagne contemporaine. Mais Angela Merkel a néanmoins dû admettre à demi-mot, face à un début de rébellion de l'aile la plus dure du parti, que le congrès d'hier devait aussi commencer à organiser sa suite. Il «doit jeter les bases (...) d'un renouveau programmatique assumé», a-t-elle dit. Car les critiques n'ont pas manqué après les lourdes concessions faites par la chancelière aux sociaux-démocrates. Pour convaincre un SPD très hésitant de s'allier avec elle, Angela Merkel a accepté de céder notamment le très symbolique ministère des Finances, perçu comme garant de rigueur budgétaire en Allemagne et en Europe par les conservateurs. «La concession de trop», a souligné une des figures de la CDU, Wolfgang Bosbach, résumant le sentiment de ceux jugeant trop centriste le cap de la chancelière au pouvoir depuis 12 ans. Lancinantes depuis l'ouverture controversée en 2015 des frontières de l'Allemagne à plus d'un million de migrants, plus audibles après sa victoire étriquée aux législatives de septembre, les critiques en interne contre la politique de la chancelière ont redoublé avec cet accord gouvernemental. Pour désamorcer l'ire de l'aile droite en vue du congrès, la chancelière a annoncé dimanche soir promouvoir leur chef de file, Jens Spahn, dans le prochain gouvernement à un poste de ministre, celui de la Santé. Sa présence doit refléter le fait que «le parti est pluriel», a-t-elle dit. A 37 ans, l'opposant le plus visible en interne à la ligne Merkel juge que la CDU est devenue trop «sociale-démocrate». Affichant sa proximité idéologique et générationnelle avec le jeune chancelier autrichien Sebastian Kurz qui gouverne avec l'extrême droite, Jens Spahn réclame un virage conservateur, notamment sur les questions identitaires et d'immigration. «Les débats des dernières semaines ont commencé à porter leurs fruits», a dit un rebelle de la CDU, Carsten Linnemann, au groupe de presse régional Funke. «La chancelière est touchée comme jamais dans son parti. Clairement, elle considère qu'elle doit faire des concessions à l'aile conservatrice pour garder sa capacité d'agir», a indiqué le politologue Timo Lochocki à la chaîne n-tv. Face aux demandes de renouvellement de la CDU, Angela Merkel garde toutefois des cartes en main. Elle a ainsi nommé comme numéro deux du parti une fidèle, Annegret Kramp-Karrenbauer. Cette dernière devait être confirmée hier au congrès, une manière de la placer en orbite pour préparer «l'après». Proche de la chancelière, cette femme de 55 ans, surnommée par ses initiales «AKK», peut aussi constituer un pont avec l'aile droite du mouvement. En effet, cette Catholique affiche des positions sociétales plus conservatrices que la chancelière.