Pour éviter la persistance de la crise et éviter de nouvelles élections, la classe politique allemande a su faire preuve d'un incroyable réalisme, dont le prix réel ne sera certainement connu que dans les prochains mois. Vainqueurs tous les deux - à quatre sièges d'écart - des dernières élections législatives anticipées, les deux grands partis allemands le Parti social démocrate (PSD) du chancelier sortant Gerhard Schroeder et la CDU Chrétiens démocrates de Mme Engela Merkel ont décidé de constituer une grande coalition. La décision est tombée, hier, juste après que le présidium du parti social-démocrate ait approuvé à une large majorité la formation d'un gouvernement de grande coalition en Allemagne sous la direction de la conservatrice Angela Merke. A l'issue des négociations au sommet entre dirigeants du SPD et des conservateurs (CDU-CSU) dimanche à Berlin, les sociaux-démocrates devraient en échange obtenir les postes clés du futur gouvernement, notamment les Affaires étrangères, les Finances, le Travail et la Justice. Le SPD a également les portefeuilles de l'Environnement, de la Coopération, de la Santé et des Transports. Outre Mme Merkel et son ministre d'Etat à la chancellerie, les conservateurs prendraient en charge les ministères de l'Economie, de l'Intérieur, de la Défense, de l'Agriculture, de la Formation et de la Famille. Le présidium a recommandé à la direction du parti de décider l'ouverture des négociations formelles de grande coalition avec les Unions chrétiennes (CDU-CSU). Dimanche soir, Gerhard Schroeder, accompagné du président du SPD, Franz Mùntefering, a fait un nouveau tour de table avec Angela Merkel, flanquée de son allié Edmund Stoiber, président de la sœur bavaroise de la CDU, l'Union chrétienne-sociale (CSU). Cette réunion en terrain neutre, à la Société parlementaire, était la dernière. Depuis les élections législatives anticipées du 18 septembre, le SPD de Gerhard Schroeder conteste la victoire de la CDU-CSU, qui ne dispose que de quatre sièges d'avance sur le SPD au Bundestag (226 contre 222). Selon l'hebdomadaire Focus, le gouvernement pourrait comporter 14 membres, en plus d'Angela Merkel et de son ministre à la chancellerie : huit seraient issus du SPD, quatre de la CDU et deux de la CSU, ce qui placerait le SPD dans une situation plutôt confortable. Là ne sont que des supputations, car, apprenait-on hier de bonnes sources, les négociations formelles entre sociaux-démocrates et conservateurs sur la composition d'un gouvernement de grande coalition en Allemagne débuteront la semaine prochaine. C'est là qu'apparaît l'essentiel du pacte qui vient d'être conclu, c'est-à-dire le prix que Mme Merkel devra payer pour avoir le titre de chancelière. « Nous devons faire attention à ne pas nous retrouver à la fin avec un gouvernement social-démocrate sous une chancelière Angela Merkel », a ainsi mis en garde le vice-président du groupe parlementaire conservateur, Wolfgang Bosbach. Plusieurs noms sont évoqués pour le poste de vice-chancelier : Gerhard Schroeder lui-même, qui pourrait prendre les Affaires étrangères, Wolfgang Clement, le ministre de l'Economie, ou Peer Steinbrùck, ancien ministre-président de l'Etat régional de Rhénanie du nord-Westphalie (ouest). Mais tout compte fait, se demande-t-on, qui est le vainqueur de ce tour de table ? Et la réponse pourrait être Schroeder qui a amené son adversaire à revoir son programme. C'est encore lui qui sera, dit-on, l'homme fort du gouvernement s'il venait à obtenir le portefeuille des Affaires étrangères. Il n'y figurera pas, assure la CDU. C'est cela la politique.