Au mandole, accompagné de son assidu orchestre, l'artiste offrira au public un bouquet de chants dédié aux louanges du Seigneur et à l'amour du Prophète et du prochain... «Dans mes bagages, j'ai apporté la musique chaâbie. Je souhaite la métisser et vous la présenter». C'est ainsi que l'artiste vous propose d'apprécier son album intitulé à juste titre Mechmoum. Autrement dit, un bouquet de kacidat dans la belle tradition du chaâbi. Aussi, de Saïda à Paris, via le Caire, Alger, Muskat... où Mohamed El Yazid s'est toujours enrichi des différentes sonorités et modes musicaux rencontrés; l'artiste est venu jeudi soir jouer à la charmante mais néanmoins maigre assistance de la salle Ibn Zeydoun. C'est peut-être toujours les vacances pour certains... Mais comme on dit, les absents ont toujours tort. Au mondole, Mohamed El Yazid entouré de son orchestre (banjo, tar, violon et derbouka), nous offrira un florilège de chansons où l'amour est le thème récurrent. Amour de son prochain, de Dieu, ses prophètes et ses sahaba. Et c'est un istikhbar, comme à l'accoutumée, pour ouvrir le récital. El Houb qatelni (l'amour me tue) donne le ton. L'artiste entonne la suite de sa prière sous l'avalanche brusque des youyous et des applaudissements timides du public. L'ambiance commence à se dérider. Le prophète Mohamed (Qssl) est célébré dans la joie et la liesse. «Je crois que les musiciens jouent leur rôle, maintenant c'est à vous», dira-t-il à l'adresse du public. Et l'orchestre est rejoint par Redouane au clavier. Et Mohamed El Yazid d'enchaîner son répertoire avec Rahou Alya lahbab, Win rahou yamat ez'man (Mes amis sont partis, où est le bon vieux temps) sur un air de nostalgie mais aussi de fête. Les plus audacieux esquisseront quelques pas de danse en bas de la scène. L'artiste, non-voyant de son état et pourtant sondant les âmes des hommes, interprétera pêle-mêle Nahwa ghouzayel, Touba, El chems el Dahbia, Mechmoum, Entiya ou encore Bladi sans oublier de reprendre el herraz de El Hachemi Gerrouabi. La qaâda chaâbie bien installée, en effet, on ne pouvait faire interrompre le plaisir comme ça, sans que cela s'apparente à un crime. Chose promise, chose due, sous «la menace» à peine voilée d'humour, Mohamed El Yazid avait ainsi comme seul choix d'exécuter la kacida Ya Boualem, invocation pour avoir des enfants, tronquée, faute de temps. Morceau demandé ou plutôt «imposé», vous l'aurez compris au grand bonheur des mélomanes, cela dit par un ingénieur du son, mordu à sa façon de chaâbi. Le clou de la soirée fut ce moment émouvant où ce bout de chou, fillette adorable du chanteur, lui remettra un bouquet de fleurs... Fillette qui, soit dit en passant, a failli voler la vedette au père en ne restant pas à sa place, bougeant ici et là dans tous les sens, suscitant parfois l'intérêt ou l'attention du public, touché ou effrayé par un éventuel trébuchement de ce joli poupon prénommée Zahira. Auteur-compositeur et interprète depuis 1997, Mohamed El Yazid a fait de solides études musicales à l'école d'Oran, auprès du cheikh El Sequal, une étude assidue du chaâbi algérois. Il compte de nombreuses collaborations avec, entre autres, cheb Mami, Idir, l'Orchestre national de Barbès, Les Primitifs du futur, Karim Albert Kook et Diwan de Béchar. De 1984 à 1997, il enseigne à Saïda le chant et la musique arabo-andalouse au Centre culturel Malek Ben Nabi. Il forme aussi l'ensemble El Moustakbel et organise des rencontres arabo-africaines pour des musiciens et poètes non-voyants. C'est à l'école Nahda à Oran, que l'artiste a appris les rudiments de l'arabo-andalou. Mohamed El Yazid Baâzzi s'est produit ici et à l'étranger. Il a donné plusieurs spectacles en Algérie, Egypte, Syrie, Maroc, Tunisie et en Jordanie... Mohamed El Yazid a composé sur des textes de troubadours occitants du XIIe siècle avec la chanteuse Hélène Cour. Il a, en outre, entrepris un travail de recherche historique et musicale et chanté avec Saâdedine El Andaloussi. Kinésithérapeute, à l'origine, Mohamed El Yazid Baâzzi se dédie aujourd'hui entièrement à sa passion pour la musique et à la création en général. Aussi, Mechmoum sera teinté de différents styles musicaux dont le chaâbi bien sûr, le gnawi, l'andalou, le raï et autres senteurs de blues et de nostalgie.