Une élection trés courue L'Accord d'Alger, conclu au terme d'un marathon de négociations encadrées par la diplomatie algérienne très active en la matière, avait quelque peu apaisé les tensions dans la région nord du pays où les combats étaient quotidiens. Le second tour de l'élection présidentielle au Mali, confronté depuis plus de cinq ans à une menace terroriste devenue endémique et tributaire de plusieurs interventions militaires étrangères, aura lieu demain antre un président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, et un candidat de l'opposition. Tous les indicateurs sont au vert pour le premier nommé qui semble en passe d'être réélu dans une position très confortable tant son rival du second tour n'a pas su ou n'a pas pu mobiliser toutes les forces en faveur de l'alternance. Une chose est sûre, le vainqueur qui sera proclamé dans quelques jours et prendra ses fonctions officielles au début de septembre prochain aura une mission toute particulière. Il lui faudra, et la tâche n'est certainement pas aisée, dynamiser la mise en application de l'accord d'Alger, conclu en 2015, entre les autorités gouvernementales maliennes, d'une part, et la Coordination des Mouvements de l'Azawed (CMA) représentant l'ex- rébellion à dominante touaregue, d'autre part. Un accord qui souffre de retards plus ou moins justifiés et de tentatives de sape qui rendent son application encore plus urgente. L'accord d'Alger, conclu au terme d'un marathon de négociations encadrées par la diplomatie algérienne très active en la matière, avait quelque peu apaisé les tensions dans la région nord du pays où les combats étaient quotidiens malgré l'intervention de l'armée française, sous la forme des doubles opérations Serval puis Barkhane. En outre, la communauté internationale impliquée avec la présence de plusieurs milliers de Casques bleus manifeste de plus en plus son impatience et attend de voir le futur président malien en action pour mettre fin aux violences terroristes et ethniques qui déchirent le pays et qui se sont propagées vers d'autres zones au centre et au sud du Mali, sans d'ailleurs épargner les pays voisins tels que le Niger et le Burkina Faso. La présence française dans le cadre de l'opération «Barkhane», s'appuie au Sahel sur 4500 hommes, ce qui en fait sa mission à l'étranger la plus importante, même si les résultats paraissent quelque peu en-deçà des ambitions affichées. De leur côté, les Nations unies disposent du plus important contingent de soldats de la paix au Mali, au nombre de 14.000. A cela, s'ajoute la composante propre au G5-Sahel récemment créé. Malgré ce lourd dispositif, les élections se sont déroulées dans un contexte tendu de sorte que l'opposition a accusé, au lendemain même du premier tour, le clan d'IBK d'avoir instrumentalisé l'insécurité ambiante aussi bien dans la région du nord que celle du centre pour manipuler le scrutin. D'où une mobilisation générale de l'opposition contre ce qu'elle présente comme une «fraude avérée». Si pour de multiples raisons, près de 250.000 électeurs n'ont pas été effectivement en mesure de voter dans ces deux régions, chose que le gouvernement malien reconnaît sans peine, les accusations de fraude, quant à elles, sont balayées par la Cour constitutionnelle qui avait crédité le président sortant Ibrahim Boubacar Keita de 41,70% des suffrages, contre 17,78% pour son rival de demain, Soumaïla Cissé. C'est d'ailleurs un remake de la présidentielle de 2013 que vont vivre les Maliens, avec d'une part IBK candidat à 73 ans à un second mandat et son ancien ministre des Finances, âgé de 68 ans, devenu son plus ardent contestataire. M. Keïta affiche un bilan considéré comme peu enthousiasmant, notamment en ce qui concerne les lenteurs accusées dans la mise en oeuvre des dispositions salvatrices de l'accord d'Alger. Le pays semble ainsi avoir encore rétrogradé, aussi bien au plan sécuritaire qu'à celui des moyens économiques et culturels. La Banque mondiale situe près de la moitié des Maliens sous le seuil de pauvreté même si le pays enregistre depuis plusieurs années un taux de croissance supérieur à 5%. Son rival Soumaïla Cissé a la tâche encore moins facile. Après avoir réussi à mobiliser presque toute l'opposition contre ce qu'il a appelé un «hold-up électoral» lors du premier tour, il ne parvient guère à rallier à sa candidature les composantes de ce mouvement de sorte que les candidats comme Aliou Diallo et Cheick Modibo Diara se sont clairement démarqués en refusant de lui apporter leur soutien. Tout semble donc indiquer qu'on s'achemine vers un véritable plébiscite en faveur de M.Keïta, à qui il reviendra de poursuivre les efforts avec davantage d'efficacité pour l'ancrage du pays dans la paix et le développement.