La transition énergétique est l'affaire de tous La Sonatrach fête ses 55 ans, un événement exceptionnel que le professeur émérite Chems Eddine Chitour a voulu marquer à sa manière. Il a exceptionnellement avancé la 23ème édition de ces traditionnelles journées de l'énergie pour qu'elles coïncident avec ces festivités. Les élèves ingénieurs de l'Ecole polytechnique d'Alger réserve de belles surprises qui pourraient aider notre géant pétrolier à réussir sa transformation tout en garantissant la transition énergétique du pays. Le professeur Chitour nous en parle dans cet entretien où il n'a pas omis de revenir sur les questions d'actualité liées aux prix de l'or noir. Régalez-vous.... L'Expression: Sonatrach fête ses 55 ans. À cette occasion vous avez mis en place une Journée sur l'énergie dédiée à Sonatrach. Donnez-nous plus de détails par rapport à ce programme des plus alléchants? Chemis Eddine Chitour: La 23e Journée consacre une tradition que j'ai mise en place en 1996 qui consiste à ce que l'Ecole polytechnique montre à l'extérieur ce qu'elle sait en s'emparant de sujets éminemment importants pour l'avenir du pays. L'aventure pétrolière de l'Algérie a démarré il y a 55 ans avec la création le 31 décembre 1963 de la Société nationale Sonatrach. Cette journée verra les élèves ingénieurs donner leur perception des acquis de Sonatrach en 55 ans toutes les réalisations faites malgré un contexte difficile. Ils donneront aussi leur perception et leur vision de Sonatrach 2030. Ensuite ils proposeront un modèle énergétique durable à 30% avec une Révolution électrique comme partout dans le monde, notamment dans le transport pour remplacer graduellement les carburants essence et surtout le diesel qui commence à être abandonné en Occident du fait que c'est un problème majeur de santé publique. Comme on le sait, l'aventure pétrolière de l'Algérie a démarré il y a 55 ans avec la création le 31 décembre 1963 de la Société nationale Sonatrach. Les acquis de Sonatrach en 55 ans sont indéniables Ce que nous faisons dans cette Journée du 18 décembre est de dédier à l'hommage à la création de Sonatrach Les élèves ingénieurs veulent témoigner d'abord de la résilience de Sonatrach dans des conditions parfois difficiles par un travail gigantesque qui fait que notre compagnie nationale est toujours là et occupe une place centrale dans le développement du pays. Vous qui plaidez pour l'élaboration d'un plan énergétique pour le pays, vous avez toujours mis en avant le fait que la Sonatrach est «un outil de la stratégie énergétique du pays». Pouvez-vous nous expliquer comment le géant pétrolier national peut-il contribuer à ce «rêve» qui devient de plus en plus une nécessité? La transition énergétique, est l'affaire de tous, tant les citoyens doivent être impliqués dans la mise en oeuvre, notamment dans les économies d'énergie. Ce sont des dizaines de milliers d'emplois qu'une Ansej de l'intelligence aurait à gérer et à proposer dans le cadre d'une stratégie multisectorielle. Le Développement humain durable est un combat qui commence à l'école où nous devons éduquer l'enfant à la nécessité de consommer moins en consommant mieux, en étant respectueux de l'environnement, en essayant d'inventer un avenir sans pollution. Le comportement écocitoyen devra prendre la place du comportement de l'égo-citoyen qui pense que tout est gratuit alors que tout a un coût, l'eau a un coût, l'électricité, les carburants ont un coût qu'il nous faut atteindre en respectant les classes à faible pouvoir d'achat sans pour autant qu'elles ne gaspillent. Justement, en parlant de la Sonatrach, comment évaluez-vous la stratégie mise en place par Abdelmoumene Ould Kaddour depuis son arrivée, notamment le plan SH 2030? L'ambition de Sonatrach est de hisser le groupe au top du management en jouant sur tous les segments en amont en augmentant d'une façon importante la densité de forage pour augmenter la production. Parallèlement, Sonatrach va développer l'offshore, technologie nouvelle et capitalistique dans deux régions à l'Ouest et à l'Est. Régions qui seraient prometteuses; le socle sédimentaire pourrait contenir des indices favorables à l'accumulation pendant des centaines de millions d'années de gaz et de pétrole. Une autre ambition de Sonatrach est de vouloir développer les hydrocarbures non conventionnels (gaz de schiste). Elle devrait, selon nous, prendre toutes les précautions, principalement en termes d'environnement et de danger pour la nappe aquifère. Pour cela, la veille technologique s'impose pour démarrer dès que les conditions de maturité de la technologie de la fracturation seront réunies. Sonatrach a aussi une autre ambition, celle de développer l'aval, c'est-à-dire la liquéfaction, le raffinage pour, à terme, ne plus importer de carburants et surtout la pétrochimie qui sera un vecteur de plus en plus important au fur et à mesure que les contraintes concernant le déclin des carburants pour cause de changements climatiques se feront sentir. Peut-elle jouer un rôle dans la transition énergétique? Sonatrach est à la fois l'alma mater en termes, de ressources, c'est aussi l'un des outils de l'Algérie pour réussir sa transition énergétique vers le Développement humain durable. Dans ce cadre, les élèves ingénieurs donneront leur vision de l'Algérie de 2030 par leurs travaux sur les modèles énergétiques en ne s'interdisant pas de proposer des actions complémentaires pour que Sonatrach soit aux rendez vous des défis de 2030. Ils donneront aussi leur perception et leur vision de Sonatrach 2030. Ensuite ils proposeront un modèle énergétique durable à 30% avec une révolution électrique comme partout dans le monde, notamment dans le transport pour remplacer graduellement les carburants essence et surtout le diesel qui commence à être abandonné en Occident du fait que c'est un problème majeur de santé publique. Favoriser la sortie des carburants verts que sont le GNC et le sirghaz, mais aussi la locomotion électrique qui est aussi une prérogative de Sonatrach à travers Naftal sa filiale qui pourrait parallèlement introduire rapidement des bornes électriques dans les stations ce qui donnerait la possibilité graduelle d'aller vers la locomotion électrique moins chère, immensément disponible, mais ne polluant pas. Sonatrach, par ses compétences, son aura et ses réelles possibilités peut aider à la matérialisation du Plan énergie renouvelable par la mise en place d'une stratégie consistant chaque fois que cela est possible à vendre une calorie thermique (pétrole, gaz naturel) contre l'installation d'un kWh électrique d'origine renouvelable. Nous serons gagnants triplement. On laissera un viatique aux générations futures en ne consommant pas d'électricité provenant du gaz, mais du soleil, le Sahara pouvant devenir une véritable pile électrique. Ensuite, nous allons respecter l'environnement et nos engagements internationaux. Enfin, on financera une partie du Plan énergie renouvelable avec le gaz naturel non consommé. Actualité oblige, l'or noir est de nouveau en crise malgré la baisse de la production décidée lors de la dernière réunion Opep-Non Opep tenue à Vienne (Autriche). Quelle analyse faites-vous? Le pétrole va-t-il continuer sa chute? Je suis convaincu que l'avenir du pays ne consiste pas à guetter les convulsions erratiques d'un baril de pétrole dont la valeur est indexée à des paramètres sur lesquels l'Algérie n'a aucune prise. Le fait que l'Opep se fasse aider par le hors Opep montre qu'elle n'a plus la possibilité à elle seule d'influer sur les prix d'autant que les Etats Unis menacent l'Opep. Cette baisse de 1,2 million de barils/jour va donner un sursis à l'Opep; il est fort possible que les prix stagnent à 60 $/baril. Le fait que nous sommes aux portes de l'hiver peut amener une demande conjoncturelle, mais s'agissant de l'Algérie, on ne peut pas continuer à indexer notre loi de finances sur le prix du baril. Il n'y a pas le choix, la transition énergétique vers le développement durable est inéluctable. Partout dans le monde des stratégies sont mises en place notamment des bouquets énergétiques dont en font partie les énergies fossiles, mais aussi les énergies renouvelables avec le plus grand gisement qui est celui des économies d'énergie. Les élèves ont développé durant cette Journée un modèle à 30% durable à l'horizon 2030 avec une place de choix à la révolution électrique renouvelable Nous devons prendre exemple sur les pays développés et gagner une étape en misant sur la locomotion électrique. Le programme des 22000MW coûterait environ 30 milliards de dollars. La mise en oeuvre du programme permettrait d'épargner environ 300 milliards de m3 de gaz sur 15 ans qui seraient disponibles pour les générations de 2030 ou permettre de financer en partie le plan énergie renouvelable tout ceci dans un contexte de révolution électrique renouvelable que nous devons aborder sans complexe en faisant appel à toutes les compétences industrielles qu'elles soient publics ou privées.