Le president de l'AMA, Craig Reedie, et le casse-tête du dopage de la Russie La Russie, accusée de dopage d'Etat, n'a pas respecté ses engagements en matière de coopération et de transparence envers l'Agence mondiale antidopage et sa réhabilitation dans le monde du sport pourrait s'en voir nettement retardée. L'heure c'est l'heure, l'AMA ne transige pas: quelles qu'en soient les raisons, la Russie, accusée de dopage d'Etat, n'a pas respecté ses engagements en matière de coopération et de transparence envers l'Agence mondiale antidopage et sa réhabilitation dans le monde du sport pourrait s'en voir nettement retardée. Le 20 septembre dernier, l'AMA avait en effet pris une décision remarquée et contestée. Elle levait la suspension de l'agence russe antidopage (Rusada) infligée en 2015 après les révélations sur l'ampleur du système de dopage institutionnel, à de strictes conditions: avoir accès à la base de données électroniques du laboratoire antidopage de Moscou, épicentre du système, avant le 31 décembre 2018 et pouvoir éventuellement requérir des «réanalyses» d'échantillons avant le 30 juin 2019. La première date limite est désormais passée, sans que l'AMA n'ait pu recevoir les données du laboratoire, a annoncé l'instance mardi. Or, «les données brutes (des contrôles) sont la pièce manquante du puzzle qui viendra compléter la duplication de la base de données (LIMS) déjà détenue par l'AMA et contribuera à la conclusion des enquêtes», avait expliqué le directeur général de l'agence mondiale, Olivier Niggli, désireux d'éclairer un peu plus les faits de dopage institutionnel dans le pays (2011-2015), et d'ouvrir éventuellement des procédures disciplinaires contre des sportifs. En mission officielle le 21 décembre, après une visite préparatoire fin novembre, les cinq experts de l'AMA emmenés par l'Espagnol José Antonio Pascual, sont tombés sur un os, incapables d'extraire les milliers de données brutes en raison des exigences techniques de dernière minute des autorités russes. Constat d'échec «L'équipe a été incapable de terminer sa mission dans le temps imparti en raison d'une question soulevée par les autorités russes, exigeant que l'équipement utilisé pour l'extraction des données soit conforme à la législation russe», avait souligné l'AMA. «Cette question n'avait pas été évoquée lors de la réunion préliminaire». Depuis, l'agence mondiale, basée à Montréal, ne s'est pas mise en quatre pour réitérer sa visite, laissant l'initiative à Moscou. Malgré les appels du président de la Rusada, la Russie n'a pas tendu la main, laissant expirer l'ultimatum du 31 décembre. Le Kremlin avait même jugé «infondées» les «inquiétudes» du directeur de la Rusada, qui demandait à Vladimir Poutine d'intervenir pour accepter les demandes des instances internationales et éviter ainsi de nouvelles sanctions. En conséquence du silence russe, les experts vont désormais rédiger un constat d'échec à destination du Comité de révision de la conformité de l'AMA. Ce comité indépendant se réunira les 14 et 15 janvier pour examiner les suites à donner à l'affaire et les recommandations de ce comité qui pourrait prôner en toute logique une nouvelle suspension de Rusada, seront ensuite examinées par le Comité exécutif de l'agence. Les réactions des détracteurs de la Russie ne se sont pas fait attendre. Avant même le communiqué de l'AMA indiquant l'expiration de l'ultimatum, Travis Tygart, patron de l'agence américaine antidopage (USADA) a exhorté l'AMA à rétablir la suspension imposée à la Rusada, qualifiant le retour du pays dans le monde sportif de «blague totale». «C'est une plaisanterie, une honte pour l'AMA et le système antidopage mondial», a-t-il déclaré. Cet échec conforte également la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) qui avait maintenu, début décembre, les sanctions contre les sportifs russes qu'elle avait été la première organisation à imposer. «Je suis amèrement déçu», a réagi Craig Reedie, président de l'AMA, qui a écrit au ministre russe des Sports pour l'informer de l'inéluctable processus à venir.