Des manifestations antimusulmanes se préparent à Copenhague. L'affaire des caricatures du Prophète Mohamed (QSSSL) prend des proportions incontrôlables. Moins d'une semaine après la publication par le journal danois Jyllands-Posten, desdites caricatures, plusieurs journaux européens ont décidé de lui emboîter le pas. Une véritable offense pour la nation musulmane. Sous couvert de la liberté de la presse, plusieurs quotidiens européens ont donné la réplique, en signe de solidarité, dit-on au journal danois. C'est le cas du quotidien France Soir qui, faisant fi des réactions hostiles dans le monde musulman et même en Occident, titre une «Oui, on a le droit de caricaturer Dieu ». En Italie, La Stampa illustre un article factuel sur le sujet avec un des dessins les plus polémiques, montrant le Prophète coiffé d'un turban en forme de bombe à la mèche allumée. Et si c'était Jésus que des journaux arabes et musulmans ont caricaturé? Pour sa part, le quotidien italien Il Messaggero se contente d'un article, sans caricature. En revanche, le quotidien à plus fort tirage d'Italie, Il Corriere della Sera, a publié deux dessins dont celui du Prophète accueillant des kamikazes au paradis en déplorant une rupture de stock des jeunes vierges. En Suisse, le quotidien populaire Blick a publié mardi, deux des dessins incriminés et La Tribune de Genève compte publier les caricatures dans son édition d'aujourd'hui, afin, selon le rédacteur en chef du quotidien, «d'alimenter le débat en montrant l'objet du délit». Une véritable entreprise diabolique, qui vise à heurter les sensibilités des musulmans. Pis, il s'agit surtout d'aider à la résurgence des extrémismes dans les pays musulmans, au moment où l'on prétend faire la guerre à Ben Laden. Aux Pays-Bas, De Volkskrant (progressiste), De Telegraaf (populaire), NRC Handelsblad publient un ou plusieurs dessins ou la reproduction de la page incriminée de Jyllands-Posten. La presse tchèque n'a pas été en reste. Le quotidien Dnes publie une petite reproduction des caricatures pour accompagner un article sur le sujet. En Hongrie, le sujet est évoqué mais sans illustrations. En Allemagne, le quotidien Die Welt (conservateur) est le seul grand journal à reproduire en une, une des caricatures danoises avec un article sur l'affaire des dessins de Jyllands-Posten. Dans le monde arabe et musulman, le ton est à la désapprobation. Plusieurs capitales ont en effet, soit convoqué les ambassadeurs du Danemark ou rappelé leurs ambassadeurs en poste à Prague. Le dernier pays en date, est la Syrie qui a convoqué, hier, son ambassadeur au Danemark. L'Algérie de son côté a réagi avec la publication d'une déclaration du ministère des Affaires étrangères condamnant avec force cet acte inqualifiable. Désormais, le pays par qui le scandale éclate devra faire face à deux crises. La première est la crise diplomatique. D'ailleurs, ses relations avec les pays musulmans se sont plus que jamais enfoncées dans un bourbier inextricable. La deuxième, celle-ci plus dangereuse, est la crise interne. En effet, selon la police danoise, certains individus sont en pleine préparation pour des manifestations antimusulmanes à Copenhague. D'après Mogens Kjaergaard Moeller, vice-directeur de la police de Copenhague, des rumeurs font état de manifestations antimusulmanes de jeunes Danois de droite qui devraient se réunir sur la place de la mairie hier, mais la police n'a pas reçu de demande formelle d'autorisation à manifester. Selon l'agence de presse Ritzau, les jeunes pourraient brûler des Coran afin de marquer leur «distance avec l'islam». La manifestation pourrait également avoir lieu samedi. Pour rappel, la publication, le 30 septembre dernier, de douze caricatures du Prophète Mohamed dans le quotidien Jyllands-Posten a soulevé de vives critiques dans les pays musulmans et plongé le Danemark dans une crise diplomatique. Aussi, cette crise vient comme pour poser une problématique cruciale: où commence la liberté de la presse et où se termine-t-elle? Selon le président de la Confédération mondiale des religions pour la paix, M.Ghalib Bencheikh, «le gouvernement danois ne met aucun bâillon à la presse. Cette dernière bénéficie d'une liberté d'expression sans bornes». Intervenant hier, sur les ondes de la Chaîne III de la radio algérienne, M.Ghaleb Bencheikh, théologien, président de la Conférence mondiale des Religions, a indiqué que «l'Occident n'arrive toujours pas à comprendre l'Islam. Pour les Occidentaux, l'Islam est une religion de haine et de mépris. Et c'est pour cette raison même qu'ils ne cessent de s'y attaquer». Il a indiqué cependant que «la cause incombe également à certains courants extrémistes sévissant dans les pays musulmans. Les gens confondent entre l'Islam en tant que religion et l'islamisme. C'est ça en effet, l'erreur que les musulmans ont faite et rien n'est fait pour régler ce problème». Pour M.Bencheikh, «l'erreur incombe aussi aux imams qui ne font pratiquement aucun effort pour mener à bien leur tâche. Laquelle tâche consiste en l'explication de leur religion». Par ailleurs, dans la capitale danoise, les gens ont la peur au ventre. Avant-hier, les locaux du quotidien à Aarhus (centre du Danemark) et Copenhague ont dû être évacués suite à une alerte à la bombe donnée par téléphone qui s'est révélée être fausse après près de deux heures d'inspection. Des agents de sécurité ont été placés devant la rédaction de Copenhague, écrit Ritzau. Le vice-président de la police à Copenhague, M.Moeller n'était pas en mesure de révéler les effectifs de police actuellement déployés dans la capitale, mais le niveau d'alerte est élevé. D'autant plus que le Danemark est dans l'oeil du cyclone. Toutefois, loin de toutes ces spéculations, le Premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen ne cesse de multiplier les déclarations en vue d'apaiser la tension. «Nous faisons face à des forces incontrôlables. Cela demandera des efforts énormes pour apaiser la situation», a reconnu le Premier ministre danois. En attendant cet apaisement, les manifestations de colère se poursuivent dans la majorité des pays musulmans. La tension a gagné même les pays de l'Asie mineure, à l'instar de l'Indonésie. Peut-on s'attendre à un dénouement salutaire de ce malaise de civilisations?