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«L'art est un sport de combat...»
Amina Zoubir, plasticienne, à L'Expression
Publié dans L'Expression le 04 - 12 - 2019

L'Expression : Cette année a été chargée pour vous, en plus de la biennale d'art contemporaine de Venise, vous avez pris part cet été à la biennale du Caire et cet automne à la biennale internationale de sculpture à Ouagadougou. Racontez-nous votre participation aux Biennales organisées sur le continent africain ?
Amina Zoubir : Mon expérience d'artiste africaine commença au Cameroun en avril 2009 au Doual'Art. J'ai assumé mon identité africaine sans malaise ni faux semblant, je suis née sur le continent africain et je ne le connaissais pas, je devais donc le découvrir. J'ai appris à construire des liens avec les artistes et les commissaires d'exposition, depuis ma rencontre avec certains d'entre eux au Festival panafricain à Alger en juillet 2009, je n'ai jamais cessé de cultiver ce lien en me déplaçant et travaillant dans les pays africains. En 2012, les performances Prends ta place du webdocumentaire Un été à Alger, sont diffusées au palais de Tokyo à Paris où je rencontre le commissaire d'exposition Okwui Enwezor dans le cadre de sa programmation à la Triennale intense proximité. Puis, à travers l'invitation de l'artiste Aïda Muluneh, je participais en 2014 au Addis FotoFest Festival de la photographie à Addis-Abeba en Ethiopie. En 2015, l'engagement environnemental des artistes africains, dont je fais partie, en représentant l'Algérie, est montré avec l'exposition itinérante Lumières d'Afriques, rassemblant un artiste pour chacun des 54 pays officiels du continent africain, l'exposition fut montrée en Côte d'Ivoire, Maroc, Sénégal… Ma consécration fut en 2016 avec l'exposition L'Iris de Lucy identifiant plus de 25 artistes femmes africaines ; l'entrée de mon travail d'artiste en foire d'art Akaa à Paris et en vente aux enchères à Piasa. En 2017, le commissaire d'exposition Simon Njami m'invitait à l'exposition Afriques Capitales en France, j'exposais la même année au Nigéria au Lagos Photo Festival à l'African Artists Foundation fondé par Azu Nwagbogu et à la première Biennale de Lagos, où je rencontrais pour la dernière fois la regrettée Olabisi Silva directrice du CCA à Lagos. C'est en 2018, que la biennale de Dakar intitulée L'Heure rouge, m'octroie la reconnaissance de mon travail d'artiste et mon africanité s'affirme et s'accentue pour ne laisser place qu'à l'universalité de ma position d'artiste. Parallèlement, je participais à des expositions muséales en Europe et aux Etats-Unis comme au Torrance Art Museum, au Musac, au Caam et au Maxxi Musée d'art moderne du XXIe siècle à Rome. Il est moins commode d'exposer en Afrique car les conditions de travail et le climat rude y sont plus ardus, l'expérience d'éprouver ce vaste territoire était devenue obligatoire pour saisir d'où je venais et tracer mon parcours d'artiste. Mon travail soutient la responsabilité de l'artiste dans sa société, pour trouver par quels moyens peut-il améliorer son environnement et sa condition humaine, tout en étant libre d'agir. Aujourd'hui, on accorde une attention particulière à l'Afrique. J'ai compris que les artistes algériens préféraient se diriger en Europe et particulièrement en France, plutôt qu'en Afrique, je n'en ai pas rencontré, à part à la biennale de Dakar en 2014, où l'Algérie avait eu un pavillon soutenu par l'Aarc.
Votre pratique d'artiste intègre différents médiums en arts plastiques. Quel sens donnez vous à l'art ?
L'immédiateté de l'art vidéo m'a permis de commencer ma pratique d'artiste pour exprimer ma condition et me démarquer de l'omniprésence de l'art pictural des peintres algériens. L'art participe à la libération des corps et des esprits, je ne le conçois guère comme un élément de décor à orner des intérieurs bourgeois, l'art trace la contestation esthétique d'un espace-temps éprouvé. La résilience est un mécanisme stimulant la reconstruction d'un équilibre psychique après un traumatisme violent que fut la guerre civile en Algérie pendant les années 1990. Le Hirak est un résultat de ce processus libérateur et salvateur, notre action d'affirmer notre exposition à la biennale d'art contemporain de Venise, s'inscrivait dans ce processus de résilience et de Hirak.
La biennale d'art contemporain de Venise a fait couler beaucoup d'encre. Au-delà de la polémique. Qu'en est-il des retours à votre sujet et de la participation algérienne de façon générale par le public ou les médias occidentaux ?
L'histoire s'écrit par des actes et non pas par l'écoulement d'une encre infectée et vile. La polémique est symptomatique d'un manque de reconnaissance et de valorisation des acteurs de la communauté artistique algérienne, j'y vois de l'imposture et de la détresse. Ayant parasité un pavillon algérien initié en 2016 par Samia Henni à la biennale d'architecture de Venise, l'intention de la cabale est d'empêcher le pavillon algérien d'aboutir, en fourvoyant certains artistes locaux, plutôt que de le soutenir et d'en construire les bases futures pour leurs propres participations. La diaspora ne souffre d'aucun manque de reconnaissance, et n'a fait que protéger ses intérêts et imposer ses opinions, jouit d'une position favorable de visibilité dans les institutions muséales et de mobilité à travers le monde, ce qui n'est pas le cas des artistes algériens ayant l'obligation d'un visa pour se déplacer avec leurs imaginaires esthétiques distincts de ceux de la diaspora, dont l'éducation artistique et les codes esthétiques restent indéniablement différents. Cette marge de la diaspora pensant réprimer toute initiative artistique venant d'Algérie, s'est arrogée l'exclusivité de la représenter, sa réaction fut à la hauteur d'un mépris à notre égard et du manque de respect que l'on se doit d'observer les uns envers les autres. Les affinités électives déconstruisent les rapports de force entre commissaires d'exposition et artistes dans le paradigme de l'art contemporain. A la précédente biennale de Venise, Christine Macel avait inclus son compagnon Michele Ciacciofera, à la Documenta de Cassel, Adam Szymczyk avait intégré sa compagne Alexandra Bachzetsis. Il n'y a aucune loi qui interdit cela, encore moins à un père de travailler avec sa fille sur un projet déterminant pour leur pays de naissance. Citons les réalisateurs américains Sofia Ford Coppola et son père Francis ou les acteurs algériens, père et fils Slimane et Khaled Benaïssa. Je ne suis ni une inconnue du monde de l'art contemporain en Algérie, ni une artiste qui débute sa carrière, je n'ai pas attendu cette collaboration à Venise pour exister et consolider mon travail d'artiste, j'avais rayonné auparavant et je continue à participer à d'autres biennales à travers le monde, ma carrière d'artiste commença il y a 15 ans en 2004 et le chemin parcouru fut long et pénible, j'ai éprouvé l'exil en 2006, la carte de séjour en France, les allers-retours incessants et la distanciation d'un territoire et d'une identité en mouvement. Je sais d'où je viens, je sais qui je suis et je sais où je veux aller, vers l'affirmation de mon statut d'artiste, sans imposture, sans victimisation.
Les artistes sont force de propositions à créer leurs positions d'engagement, à imposer leurs propres modèles dans ce paradigme souligné par la sociologue Nathalie Heinich. Il n'est plus question de sélection entre le commissaire d'exposition et l'artiste, il s'agit d'influences intellectuelles, de collaborations artistiques, d'échanges esthétiques et de discussions constructives à développer un concept innovant. Le pavillon algérien a brisé l'immobilisme et la procrastination, cette rupture fait partie des rythmes d'événements et des mouvements artistiques dans l'histoire de l'art. Notre action à Venise fut qualifiée par l'historienne algérienne Malika Dorbani, en ses propres termes « Hirak Fenni fi Venise » (NDRL mouvement artistique à Venise). Le projet du pavillon algérien était longuement réfléchi et construit depuis plusieurs mois et rien ne pouvait l'arrêter. Inscrit officiellement par le ministère de la Culture algérien et la biennale de Venise, face à la situation politique du Hirak, il fut annulé officiellement deux jours après la démission du président. Nous avions décidé de continuer car nous sommes des artistes engagés à honorer notre pays l'Algérie et notre projet devait aboutir pour toute la durée de la 58e biennale d'art de Venise. Notre consécration et récompense étaient confirmées par la reconnaissance et le soutien du public vénitien et des acteurs culturels du monde de l'art contemporain international présents à Venise pendant les journées professionnelles d'ouverture et de fermeture de la biennale, ainsi les relais ont été opérés par des médias internationaux : E-Flux, Happening, Blouinart, Artnews, Contemporary &, Art Africa Magazine, Artnet news, True Africa, Canevas Magazine, je cite ceux qui nous ont accordé des entretiens en magazines publiés et mis en ligne. C'est avec le soutien des artistes participants : Rachida Azdaou, Hamza Bounoua, Oussama Tabti et Mourad Krinah que l'Algérie avait été positionnée à la biennale de Venise. L'exposition du pavillon algérien s'est terminée dimanche 24 novembre, située à trois minutes des Giardini de la biennale. A Venise tout tenait encore en place malgré les circonstances d'inondations et d'aqua alta. (Ndrl, Marée haute).
A quand une exposition de Amina Zoubir en Algérie ?
J'ai commencé à exposer en Algérie avant de sillonner le continent africain, je dois avouer qu'il existe peu de lieux professionnels dédiés à l'art contemporain en Algérie. On ne peut pas demander à un artiste d'exposer continuellement et gracieusement son travail sans le valoriser professionnellement avec une galerie, ou lui octroyer un honoraire décent pour vivre et poursuivre sa carrière. Les obstacles sont de taille quant à la visibilité et à la mobilité des artistes algériens, cette situation nécessite le choix douloureux de la distance, de l'exil et du travail persévérant pour sortir de ce blocus imposé. Malgré les adversités, j'ai vécu le succès de quelques événements grâce à un travail d'artiste acharnée, l'art est un sport de combat et d'endurance, je le pratique tous les jours.


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