La Guerre d'Algérie prenait officiellement fin le 19 mars 1962. L'Algérie en guerre aspirait à la paix, mais l'ordre des animaux sauvages en avait décidé autrement et, durant des mois, des Algériens hommes et femmes allaient périr sous les coups de boutoir des criminels tenant de l'ordre ancien. Le 19 mars à midi, les armes se sont tues en Algérie. Les négociations algéro-françaises, d'Evian se sont clôturées avec la signature des accords du même nom. Les djounoud de la glorieuse ALN peuvent circuler en ville où durant les premiers temps, ils pouvaient se rendre en toute sécurité dans leurs foyers. Les populations qui n'en revenaient pas de ce, que, enfin, le pays accède et ce, après des millénaires à la souveraineté nationale laissent éclater leur joie indicible. L'Algérie renaissait à la vie et entrait de plain-pied dans le concert des Nations. Mais cette joie fut de courte durée, hélas. Dans les villes, une bête immonde continuait les massacres. Tuant, plastiquant, détruisant et brûlant tout, l'ordre des animaux sauvages allait continuer l'oeuvre destructrice du colonialisme. Le sourire du chef de la délégation algérienne à Evian, feu Krim Belkacem, est effacé par la barbarie sans borne de l'OAS. Des intellectuels, des hommes de lettres, tels Feraoun, Max Marchand, Ali Hamoutène et d'autres, comme des simples travailleurs et même des femmes de ménage, sont froidement abattus. La bibliothèque de l'université d'Alger est partie en fumée et la sauvagerie n'avait plus de bornes. Alger, Oran, Constantine enterraient les nouveaux morts. L'Exécutif provisoire présidé par Abderahmane Farès et sis au Rocher Noir, actuellement Boumerdès, ne savait plus quoi faire devant l'avancée du crime. Des unités de l'ALN rétablissaient l'ordre, mais il fallait aussi faire attention que les Accords ne soient pas piétinés. La Force locale, ces gens en armes de l'Exécutif provisoire, ne pouvaient faire face aux hordes fascistes qui jouissaient d'une certaine complicité active ou forcée des Européens d'Algérie qui pensaient ainsi arrêter le cours de l'histoire. Les ex-généraux Salan et Challe entrés dans la clandestinité, organisaient depuis leurs antres le crime et la destruction. Les bombes et le plastic rythmaient la vie des Algérois et le concert de casseroles résonnait dans la nuit. Le port d'Alger a aussi payé son écot de sang avec la tuerie des dockers. Dans les campagnes, les citoyens s'organisaient, des veilles et des gardes sont opérées de nuit, il fallait arrêter la chaîne du malheur et assurer la sécurité des habitants contre les coups de l'OAS. Durant près de deux mois, le pays souffrait des exactions de l'OAS. Puis dans un mouvement de sauvegarde des vies humaines, le Gpra donne son feu vert pour une négociation avec les gens de l'OAS. L'essentiel était d'arrêter les tueries. Les Européens d'Algérie revenus de leurs engagements avec l'OAS pensaient qu'il valait mieux pour eux quitter le pays. L'Algérie, dans la douleur et la paix chèrement acquise, s'apprêtait à se mettre à la construction et à l'édification. Le Gpra allait rentrer en été et en attendant, certains membres de ce dernier, dont Krim Belkacem, ont foulé le sol de la patrie. L'Algérie était en marche. Dans les villes et les campagnes, de nouveaux «soldats» émergeaient, ce sont les combattants de la 25e heure. Les Martiens. Mais ceci est une autre histoire.