Le documentaire «Leur Algérie» de Lina Soualem a remporté le Prix du meilleur documentaire arabe d'une valeur de 10 000 dollars, lors de la 4e édition du festival de cinéma d'El Gouna en Egypte, clôturée vendredi soir. À noter que ce film avait bénéficié en 2017 d'une bourse «Les ateliers sauvages-Hafid Tamzal» d'aide au développement, attribuée lors de la cérémonie de clôture des Rencontres cinématogprahiques de Béjaïa. En effet, il est bon de rappeler qu'à partir de 2015, les RCB ont mis en place le Béjaïa Film Laboratoire (BFL) afin de soutenir les jeunes talents émergents des pays du Maghreb, à savoir Maroc, Algérie, Tunisie. Il s'agit «de renforcer la production cinématographique dans le Maghreb par la mise en réseau des réalisateurs et producteurs». Au départ une bourse aux RCB Lina Soualem avait reçu, également, ce soir-là, une bourse d'aide de 1600 euros décernée par TV5Monde. Interrogée par L'Expression lors de cette cérémonie de clôture des RCB Lina Soualem, aussi comédienne, confiera à propos de son premier documentaire personnel: «C'est l'histoire de Aïcha. Ma grand-mère.» L'histoire d'une femme mariée à 15 ans, à Sétif, en Algérie et qui a émigré en Auvergne à l'âge de 19 ans dans les années 1950. L'histoire d'une femme qui n'a jamais eu de maîtrise ni de recul sur sa vie. Une histoire unique, mais qui la transcende. Une histoire d'émigrée...». Le synopsis lève le voile sur la séparation des grands-parents de Lina, Aïcha et Mabrouk, et ce, après 62 ans de mariage. Ces derniers déménagent de leur appartement commun pour vivre dans deux immeubles qui se font face, toujours dans la petite ville de Thiers où ils se sont installés ensemble à leur arrivée d'Algérie, il y a plus de 60 ans. Aïcha continue, pourtant, de préparer à manger pour Mabrouk et de lui apporter ses repas chaque jour. Mabrouk, lui, continue ses promenades solitaires et silencieuses au centre commercial. Ensemble, ils ont traversé cette vie chaotique des travailleur.euse.s émigré.e.s, et aujourd'hui, la force qu'ils ont si longtemps partagée semble avoir disparu. Pour Lina, leur séparation est l'occasion de questionner leur long voyage d'exil et leur silence. Lina Soualem plonge ainsi dans les souvenirs des premiers Algériens émigrés en France. À noter que ce documentaire de 72 mn est une coproduction algéro-française. «Leur Algérie» est le premier long documentaire dans le parcours de Soualem, de nationalité française et d'origine palestino-algérienne. L'histoire de Aïcha Enfin, il est bon d'indiquer aussi que le film «Où vas-tu Aïda?» de la Bosniaque Jasmilla Zbaniac a reçu le Prix d'or du meilleur long-métrage, tandis que «l'homme qui a vendu son dos» de la Tunisienne Kaouther Benhenia a remporté le Prix du meilleur long-métrage arabe lors de la clôture du festival de cinéma d'El Gouna, fondé en 2017, qui tend à mettre en contact les réalisateurs arabes avec leurs homologues à travers le monde. Un festival qui se bonifie et glane succès après succès, année après année. Enfin, un festival qui a su gagner ses lettres de noblesse en professionnalisme et en sérieux en un laps de temps très court. Sans doute parce que son fondateur Amir Ramsès, est lui-même un grand cinéaste exigeant qui connaît les attentes de ses confrères et les embûches encourues de l'intérieur dans ce métier si délicat que celui d'organisateur de festival. Un galon qu'il arrive à porter aujourd'hui haut la main!