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Quelles incidences?
Adhésion de l'Algérie à l'OMC
Publié dans L'Expression le 16 - 10 - 2021

Combien de séminaires et de réunions gouvernementales depuis plus de 30 années sur l'adhésion de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce où je suis intervenu à maintes reprises au niveau national et international. Récemment, le ministre du Commerce, en juin 2021, a déclaré, officiellement, la volonté de l'Algérie à adhérer à l'OMC et le 12 octobre 2021 le Conseil économique, social et environnemental (CNES) a organisé une rencontre sur ce sujet qui n'apporte pas beaucoup d'éclaircissements aux différents problèmes connus.
Quelle est la situation socio-économique de l'Algérie en octobre 2021? Les indicateurs socio-économiques sont au rouge en ce mois d'octobre 2021. Le taux de croissance a été négatif de 5/6% en 2020 dû à la fois à la crise mondiale, mais également, à la faiblesse des réformes internes, le taux prévu de 2/3% pour 2021 donne toujours, rapporté à 2020, un taux faible entre moins 0/1%. Le produit intérieur brut PIB est de 180 milliards de dollars en 2018 à une prévision de 155 milliards de dollars en 2021, expliquant que le taux de chômage, selon le FMI, en 2021 de 15% incluant les sureffectifs des administrations, entreprises publiques et l'emploi dans la sphère informelle, qui faute de confiance et de visibilité dans la politique socio-économique connaît une extension avec des données contradictoires entre 6100 et 10 000 milliards de dinars (entre 33 et 47% de la masse monétaire en circulation). Les réserves de change sont passées de 194 milliards de dollars au 1er janvier 2014 à 48 milliards de dollars fin 2020, source officielle du gouvernement et à environ 44 milliards de dollars entre avril/mai 2021, malgré toutes les restrictions d'importations qui ont paralysé la majorité de l'appareil de production afin de préserver les réserves de change.
Les données brutes du ministère du Commerce font état de 3,1 milliards d'exportations hors hydrocarbures pour les neuf premiers mois de 2021. En l'analysant, la structure montre que 70/80% proviennent des dérivées d'hydrocarbures et des produits semi-bruts et devant, pour avoir le solde devises des autres secteurs, soustraire les matières importées en devises et les différentes exonérations fiscales: plus de 85% des entreprises publiques et privées étant selon les données du registre du commerce, des unités personnelles ou petites Sarl peu compétitives fonctionnant avec des équipements et matières premières importées. Il ne faut pas être utopique et lancer des slogans, pour pouvoir exporter avec une concurrence acerbe, surtout en Afrique et en Europe, marché naturel de l'Algérie, il faut avoir des entreprises compétitives en termes de coût/qualité.
Déficit budgétaire
Pour éviter l'endettement extérieur et le manque de liquidités des banques, la banque d'Algérie a eu recours à la planche à billets pour 2100 milliards de dinars pour 2021 selon les propos de ses dirigeants. Tous ces facteurs, favorisant la spéculation, expliquent le taux élevé d'inflation qui, officiellement, selon l'ONS, approche les 100% entre 2000-2020, mais beaucoup plus du fait que l'indice n' a pas été réactualisé depuis 2011, le besoin étant historiquement daté. Les prix des produits non subventionnés s'alignent sur la cotation du dinar sur le marché parallèle, prix qui ont connu une hausse variant entre 50 et 100% pour les pièces détachées par exemple, depuis 2020, assistant à une accélération de la détérioration du pouvoir d'achat. Les mesures sociales vont accélérer le déficit budgétaire en 2022. Dans la loi de finances 2021, il a été prévu des dépenses de 8 112 milliards, de dinars et des recettes à 5 328 milliards soit un déficit budgétaire de 2 784 milliards de dinars, soit si l'on rapporte au cours d'octobre 2021, de 137 dinars un dollar, environ 20,32 milliards de dollars et au cours au moment de l'élaboration de la loi de finances plus de 22 milliards de dollars. Pour 2022, selon certaines sources, les encaissements vont atteindre 5.683 milliards de dinars, tandis que les charges sont estimées au total à 9 857 milliards de dinars soit un déficit budgétaire d'environ 4174 milliards de dinars soit 30,46 milliards de dollars.
La Banque mondiale a estimé les dettes à long terme à 1,669 milliard de dollars en 2020, contre 1,571 milliard de dollars en 2019 et 1,725 milliard de dollars en 2018. Le ratio du service de la dette extérieure rapporté aux exportations de biens et services est estimé à 1% à fin 2020 le ratio du stock de la dette extérieure rapporté aux exportations était de 20% en 2020, contre 14% en 2019 et le ratio du stock de la dette extérieure rapporté au revenu national brut est estimé à 4% en 2020 et à 3% en 2019 et 2018. Mais évitons l'illusion monétaire car, toujours selon la Banque mondiale, l'Algérie a peu attiré l'investissement étranger du fait d'entraves bureaucratiques liées aux réformes et d'une législation peu attractive avec une baisse de 21,3% estimée à 1,073 milliard de dollars en 2020, contre 1,364 milliard de dollars en 2019. Selon bon nombre d'experts, seul un retour à la croissance supérieure à 5/6%, l'idéal étant 8/9%, ne devant jamais oublier la pression démographique devant créer 400 000 emplois productifs nouveaux, par an, pour atténuer les tensions sociales, devant également maîtriser la pandémie par une vaccination généralisée, ce qui redynamiserait l'économie mondiale, ce qui permettrait une réduction importante du déficit budgétaire et d'atténuer le déficit de la balance courante. Mais cela suppose de profondes réformes et une nouvelle politique socio-économique visant à diversifier son économie en vue de limiter la dette publique interne. Faute de quoi, les tensions sociales s'aiguiseront et le retour au FMI serait inévitable.
Signalons pourtant, que les règles de l'OMC ont été mises à rude épreuve avec l'impact de l'épidémie de coronavirus; bon nombre de pays ayant pris des mesures protectionnistes pour protéger leur économie et même la règle du taux plancher de déficit budgétaire pour l'Europe a été largement dépassée. Quelles sont les incidences des règles de l'OMC sur l'économie algérienne? L'Algérie est membre observateur depuis le 3 juin 1987, ayant manifesté son intention d'intégrer le système du commerce multilatéral qu'incarnait l'Accord général sur les tarifs et le commerce (Gatt).
Le long chemin vers l'OMC
Le Groupe de travail de l'accession de l'Algérie au Gatt a été institué le 17 juin 1987 et en 1995 ce Groupe de travail du Gatt a été transformé en groupe de travail de l'OMC chargé de l'accession de l'Algérie, ayant tenu sa première réunion en avril 1998. Depuis son institution en 1995, le Groupe de travail de l'OMC chargé de l'accession de l'Algérie a tenu des dizaines de réunions formelles et informelles et les différents ministres du Commerce, qui se sont succédé, ont annoncé, officiellement, d'abord en 2010, en 2011, en 2012, en 2013, en 2015 puis entre 2016-2020 avec des discours contradictoires que l'Algérie serait membre de l'OMC.
L'Algérie, lors de la réunion ministérielle de 2022, devant se dérouler au Kazakhstan, pour accélérer la cadence posera t-elle sa candidature? Nous devons distinguer les incidences générales, des incidences sur les services énergétiques. En ce qui concerne les incidences générales, de ce qui précède, nous permet de mettre en relief les principes directeurs suivants: l'interdiction du recours à la «dualité des prix» pour les ressources naturelles, en particulier le pétrole (prix internes plus bas que ceux à l'exportation); l'élimination générale des restrictions quantitatives au commerce (à l'import et à l'export); obligation de mettre en place les normes de qualité pour protéger la santé tant des hommes que des animaux (règles sanitaires et phytosanitaires).
L'obligation d'observer les règles de protection de l'environnement; et enfin, récemment, l'OMC a introduit les aspects des capitaux et surtout la propriété intellectuelle dont la protection est une condition essentielle de l'investissement direct étranger,les pays membres s'engageant à combattre le piratage, (renvoyant à la construction de l'Etat de droit et, donc, à l'intégration de la sphère informelle). Les conséquences de tels accords sont: le démantèlement des droits de douanes et taxes pour les produits industriels et manufacturés sur une période de transition et les relations de partenariat entre les deux parties seront basées sur l'initiative privée.
Dualité des prix
Tous les monopoles d'état à caractère commercial sont ajustés progressivement pour qu'à la fin de la cinquième année après l'entrée en vigueur de l'accord, il n'existe plus de discrimination en ce qui concerne les conditions d'approvisionnement et de commercialisation des marchandises entre les ressortissants des Etats membres. En ce qui concerne les incidences sur les services énergétiques, l'Algérie se doit d'être attentive à la nouvelle stratégie gazière qui semble se dessiner tant au niveau européen qu'au niveau mondial et donc intégrer l'ensemble des paramètres et variables qui traceront la future carte énergétique du monde. Ces accords prévoient, après négociations, la suppression des obstacles tarifaires et non tarifaires, avec d'énormes défis aux entreprises de biens et services. Si ces accords ne peuvent avoir que peu d'impacts sur le marché des hydrocarbures en amont, déjà inséré dans une logique mondiale (pétrole), il en va autrement de tous les produits pétroliers à l'aval et des services énergétiques qui vont être soumis à la concurrence. Ainsi, est interdite la dualité des prix, mesure par laquelle un gouvernement maintient des prix internes à des niveaux plus bas que ceux qui auraient été déterminés par les forces du marché, les restrictions à l'exportation devraient être supprimées à terme et le pays doit s'engager à intégrer la sphère informelle dominante, lutter contre la bureaucratie et la corruption, qui faussent la concurrence et pénalisent les activités productives.
En conclusion, ce dossier ayant un impact géostratégique, économique, social n'engage pas seulement le ministre du Commerce, mais tout le gouvernement et, d'une manière générale, toute la société, la décision devant être prise par le Haut Conseil de Sécurité présidé par le président de la République et avalisé en Conseil des ministres. Au sein de l'OMC, la majorité de ceux de l'Opep en plus de la Russie et de la Chine fondateurs du communisme, représentant environ 98% du commerce mondial et 85% de la population mondiale. Sous réserve de profondes réformes structurelles afin de dynamiser les sections hors rente, l'ensemble de ces contraintes, imposées de l'OMC peut arrimer l'économie algérienne à l'économie mondiale et jouer le rôle d'entraînement du développement économique et du progrès social. Les conditions de l'adhésion de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce -OMC- s'appliquent également aux différents accords régionaux de libre- échange avec différentes zones, Monde arabe, Afrique, et l'Accord d'association avec l'Europe principal partenaire commercial de l'Algérie, environ 60% des flux d'échanges, signé le 1er septembre 2005. et, pour ce dernier cas, pour la révision de certaines clauses, pas l'Accord-cadre, ont été inclus le volet politique, culturel et sécuritaire toujours en négociation en plus du volet économique. Tous ces accords s'ils sont appliqués par l'Algérie modifieront forcément, le pouvoir économique et donc le pouvoir politique, au bénéfice des producteurs de richesses, entraînant des résistances des tenants de la rente.


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