C'est lors d'une prestigieuse cérémonie organisée au sein de l'Institut du monde arabe que s'est tenue la cinquième édition du prix Bouamari/Vautier au nom des deux pères fondateurs du cinéma algérien. Une cérémonie retransmise en direct à l'Institut français d'Alger? mais aussi au niveau de l'Institut français d'Oran. Président du prix Bouamari/Vautier et directeur de l'IMA, Jack Lang évoquera dans son discours de bienvenue l'exposition qui se tient, actuellement au sein même de ce grand établissement culturel et qui fête les accords d'Evian «dans la paix et dont il faut s'en réjouir, mais aussi le soixantième anniversaire de l'indépendance de l'Algérie». Et d'ajouter à ce propos: «Beaucoup d'événements sont prévus dans ce sens, ici en France et en Algérie et ailleurs. Ici même, à l'Institut du monde arabe nous voulons apporter notre contribution.» Et de rappeler la grande exposition qui a remporté beaucoup de succès, depuis sa récente ouverture et qui associe à la fois «la photographie de l'immense photographe qu'est Raymond Depardon et les textes de l'immense écrivain qu'est Kamel Daoud». Et d'annoncer le prochain grand événement «lié à la peinture qui s'appelle ''Algérie mon amour'' de la collection de Claude Lemand ou l'on découvrira des oeuvres de peintres algériens, hélas, très peu connus. Il y aura aussi des concerts, des colloques, des rencontres etc.» Revenant au cinéma algérien qu'il qualifiera de «vivant, créatif, combatif, qui se renouvelle sans cesse...», il Invitera le président de l'association France-Algérie pour dire, pour sa part, pourquoi mène t-il ce travail de rapprochement dans son association qui «rassemble tout ceux qui aiment l'Algérie» fera remarquer Jack Lang arguant: «Ce pays qui est d'une beauté fulgurante, ce pays qui est immense, qui est profondément lié au peuple français, au-delà des circonstances politiques». «Soutenir le cinéma algérien émergeant» Prenant, en effet, la parole, le président de l'association France-Algérie, Arnaud Montebourg rappellera que ce prix rentre dans le cadre du programme 2022, tracé par l'IMA, appelé «Regard sur l'Algérie». Et de renchérir: «C'est une tâche tout à fait essentielle, surtout «dans la période actuelle si agitée, travaillée par les questions identitaires que de mieux faire connaître, aujourd'hui, l'Algérie au public français et l'IMA doit en être chaleureusement fertile.». Et de rappeler la genèse de l'association France-Algérie, fondée un an après les accords d'Evian en 1963. C'était une idée de Germaine Tillon, cette grande anthropologue qui a été soutenue par le gaulle lui-même afin de maintenir les liens d'amitié et de fraternité qui existent entre les deux sociétés qui s'étaient déchirées... (...)Aujourd'hui, comme hier, nous nous attachons à conforter des liens amicaux au-delà des obstacles, des bagarres, des malentendus, des froissements. Car nous savons ce que nous avons en partage, ici et en Algérie....Notre association qui a 59 ans promeut, soutient, accompagne des projets de toute nature, culturels, sociétaux, économiques, humains, qui renforcent la connaissance réciproque des deux sociétés. Notre démarche est avant tout citoyenne. Il s'agit de co-construire avec nos amis algériens et notre travail s'inscrit résolument dans la durée. Le prix Bouamari/Vautier qui a été créé, c'est pour saluer le travail des nouveaux réalisateurs et pour mieux faire connaître le cinéma émergeant d'Algérie car s'il y a peu de salles de cinéma, il y a beaucoup de talent.». «Accompagner le cinéma algérien» Présent à cette cérémonie, l'ambassadeur de France, François Gouyette, dira que cette cérémonie est «l'occasion de valoriser ce que l'ambassade de France à Alger, son service de coopération, l'Institut français d'Algérie font de leur côté pour appuyer, accompagner le cinéma algérien dans sa diversité. Beaucoup de ces films qui ont été sélectionnés, ont été projetés ici même et dans nos instituts. C'est une façon pour notre Institut français de promouvoir ce jeune cinéma qui se développe avec beaucoup de vivacité». Et de renchérir: «Nous souhaitons et nous sommes déjà engagés dans une action pour faciliter et favoriser la mobilité des cinéastes et des acteurs de cinéma pour les aider dans la promotion de leur travail hors d'Algérie.». Et le réalisateur Farid Bentoumi de rappeler les noms des nominés. Dans la catégorie du long métrage de fiction, étaient donc nommés les films «Cigare au miel» de Karim Aînouz, «Ibrahim» de Samir Guesmi, «Soula» de Salah Issaâd, «Voyage en Kabylie» coréalisé par Hace Mess et Mathieu Tuffreau, «La vie d'après» de Anis Djaâd, et «Argu» de Omar Belkacemi. C'est enfin Anis Djaâd qui a obtenu ce prix. Ce dernier présent à Alger dira être content d'avoir ce prix après la mention spéciale au festival d'Amiens «Je suis avec mes amis algérois et algériens. Je suis très flatté.» Et de souligner: «C'est vrai qu'il y a six films en compétition,mais depuis que j'ai commencé ma carrière dans le cinéma je n'ai jamais pensé «compétition», donc je n'ai jamais pensé festival. Bien sùr qu'on envoie nos films. On a envie qu'il y ait de la visibilité pour les films aussi bien en Algérie qu'à l'extérieur, mais je me suis jamais mis en compétition qu' avec moi-même pour faire de meilleurs films à chaque fois». Emotion et reconnaissance Côté des films documentaires, c'est «Ne nous racontez plus d'histoire!» coréalisé par Ferhat Mouhali et Carole Filiu Mouhali qui a obtenu le Prix du meilleur documentaire. Ce dernier était en lice aux côtés de «Leur Algérie» de Lyna Soualem et «Les visages de la victoire» de Lyèce Boukhitine. Un nouveau prix institué cette année, à savoir la mention spéciale du jury, est revenu quant à lui à «Soula» de Salah Issaâd dans lequel joue le grand comédien Idir Benaibouche. «Nous avons discuté avec le jury qui a eu des difficultés à rendre le Prix de la fiction. «La vie d'après» l'a remporté certes, mais nous avions aussi un grand amour pour un autre film. Il nous a beaucoup touchés. Nous voulions lui donné une reconnaissance». a fait savoir Flora Boumia, du comité d'organisation du prix Boumari/Vauthier. Présente dans la salle de l'IMA, la comédienne du film, Souhaila Bahri, qui est arrivée la veille de Batna, toute émue, avouera «être contente, même choquée. Je m y attendais...» avouera- t-elle en recevant ce prix. Rappelons que le jury du prix/Bouamari/Vautier était présidé par la réalisatrice Dominique Cabrera et composé des cinéastes algériens Farid Bentoumi, Tahar Boukella et Nadir Moknèche ainsi que le réalisateur Alexandre Arcady et l'universitaire Denise Brahimi. Prenant la parole sur les planches de l'IMA, Alexandre Arcady en profitera pour saluer le cinéma algérien, tout en rappelant son attachement pour l'Algérie. Et d'annoncer qu'il sera en Algérie à partir de la semaine prochaine «pour tourner mon nouveau film, adapté de mon livre autobiographique qui s'appelle ''le petit blanc de la casbah'', dans lequel je racontais mon enfance, dans cette Algérie d'hier, avec une vision de l'Algérie d'aujourd'hui, avec un casting incroyable. Je suis très heureux et très impatient de retourner à Alger, poser la caméra et filmer ce pays que j'aime tant», concluera t-il.