Ouvert, hier, à Doha, dans des circonstances internationales exceptionnelles, le 6e Sommet du Forum des pays exportateurs de gaz (Gecf) ne pouvait ignorer les bruits de bottes en Ukraine. Les participants, dont les pays en tirent involontairement profit, ont certainement pris conscience du poids, désormais, stratégique de leur organisation. Le Gecf «est aujourd'hui une organisation gouvernementale internationale reconnue, capable d'attirer l'attention sur de nombreuses questions prioritaires», a souligné, à juste titre, le président Tebboune dans son allocution. Une reconnaissance de l'urgence d'un organe régulateur de cette énergie s'impose d'elle-même, et le Gecf peut camper ce rôle à condition de mobilier «davantage d'acteurs convaincus de l'importance du gaz naturel pour relever les défis actuels et futurs» soutient le président de la République qui met dans le mot «défis» des considérations économiques, mais également stratégiques, vitaux pour l'humanité. La visibilité du Forum s'en trouve nécessaire et elle peut être renforcée «par l'adhésion de nouveaux Etats exportateurs et producteurs de gaz naturel», préconise le chef de l'Etat. Une perspective réalisable, dont la conséquence directe sera le renforcement du rôle des exportateurs de gaz qui pourront «préserver leurs intérêts à travers le dialogue avec les Etats consommateurs qui exploitent le gaz comme moteur essentiel pour développer leurs économies». En prônant le dialogue producteur-consommateur, l'Algérie place le débat énergétique à hauteur de la responsabilité des Etats, à éviter des surenchères haussières ou baissières, nuisibles dans les deux cas. Aussi, Abdelmadjid Tebboune a-t-il interpellé l'ensemble des pays de la planète pour «trouver ensemble les meilleurs moyens d'assurer au gaz naturel une place dans les systèmes énergétiques et de promouvoir sa valeur sur les marchés internationaux». Une sorte de contrat gagnant-gagnant que le Président conditionne par le développement de la recherche, non sans citer l'expérience algérienne à travers l'Institut de recherches du gaz (GRI). Cet institut est un instrument stratégique qui illustre la décision des pays membres du Gecf d'étendre leur collaboration à la recherche scientifique et technique dans le domaine du gaz. Il faut savoir que le Gecf a adopté à l'unanimité la décision de créer, en Algérie, l'Institut de recherche sur le gaz, lors du 4ème Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du Gecf, tenu le 24 novembre 2017 à Santa Cruz de la Sierra, en Bolivie. L'Institut a été doté d'un budget de 2,4 millions de dollars en 2018 et validé plusieurs projets de recherches proposés par l'Algérie et par les pays membres du Gecf. L'intérêt qu'accorde le chef de l'Etat à la recherche scientifique témoigne d'une vision algérienne qui entend faire de cette énergie transitoire qu'est le gaz naturel, un levier de développement pour l'humanité autant que pour les pays dont le sous-sol regorge de ce produit vital, dans le fonctionnement de l'économie mondiale. Il reste que son épuisement est inéluctable, mais cela n'empêche pas de réunir les volontés de l'ensemble des pays pour créer un marché susceptible de satisfaire tout le monde. Une approche qui peut paraître trop généreuse, mais trouve tout son intérêt, en ce moment précis où l'affrontement entre l'Otan et la Russie met le gaz naturel au coeur de l'équation stratégique, de sorte qu'il devienne une arme entre les mains des pays producteurs, mais également consommateurs. L'appel au dialogue lancé par le président Tebboune permettra d'ôter sa charge idéologique à un marché qui gagnerait à se stabiliser durablement. Le chef de l'Etat a d'autant plus raison que le développement de cette énergie nécessite des investissements colossaux. Enfin, Abdelmadjid Tebboune a annoncé que le 7e Ssommet du Forum des pays exportateurs de gaz sera organisé en Algérie. «Je souhaite et serai heureux de vous accueillir en Algérie à l'occasion de la tenue du prochain sommet», a déclaré le président Tebboune en clôture de son allocution.