Le président du Pakistan a annoncé hier la dissolution de l'Assemblée nationale, à la demande du Premier ministre Imran Khan qui a échappé peu de temps plus tôt à une motion de censure. «Le président du Pakistan, le Dr Arif Alvi, a approuvé la demande du Premier ministre», a indiqué son bureau dans un communiqué. Cette dissolution entraînera la convocation d'élections législatives anticipées sous 90 jours. Imran Khan avait demandé plus tôt la dissolution du Parlement, qui venait pourtant de refuser d'examiner une motion de censure contre lui en la jugeant inspirée par des «puissances étrangères». «Cette motion de censure est contraire à la Constitution. Je rejette cette motion en vertu de la Constitution», avait déclaré le vice-président de l'Assemblée nationale pakistanaise, Asad Qaiser, au début de la séance au cours de laquelle elle devait être examinée. Quelques minutes plus tard, dans un discours à la télévision d'Etat, Khan a annoncé qu'il demandait au président du pays de dissoudre le Parlement. Khan est confronté à sa plus grave crise politique depuis son élection en 2018, ses opposants l'accusant de «mauvaise gestion de l'économie» (inflation, roupie faible, dette écrasante) et de «maladresses en politique étrangère».Samedi, M. Khan a appelé ses partisans à manifester dans la rue pour protester pacifiquement contre ce qu'il a qualifié de «conspiration» organisée à l'étranger pour l'évincer du pouvoir. Le parti de Khan, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI, Mouvement du Pakistan pour la justice), a perdu sa majorité parlementaire la semaine dernière, quand un parti allié a déclaré que ses sept députés allaient voter avec l'opposition. Plus d'une douzaine de députés du PTI ont également changé de camp, bien que la direction du parti essaie de les empêcher de voter par des recours judiciaires. «Je veux que vous protestiez tous pour un Pakistan indépendant et libre», a-t-il déclaré aux médias d'Etat. Il a traité ses opposants de «voleurs», de «lâches» et de «manipulateurs», et a laissé entendre qu'il avait encore une carte à jouer. «J'ai un plan pour demain, ne vous inquiétez pas. Je le leur montrerai et je les vaincrai devant l'assemblée», a-t-il promis samedi. Il y a trois jours, il avait accusé les Etats-Unis d'ingérence dans les affaires pakistanaises. Selon les médias locaux, il a reçu un rapport de l'ambassadeur pakistanais à Washington, qui a enregistré un haut fonctionnaire américain lui disant que les relations entre les deux pays seraient meilleures si le Premier ministre quittait ses fonctions. Washington a nié. Khan accuse les Etats-Unis de vouloir le renverser parce qu'il refuse de s'aligner sur les positions américaines à l'égard de la Russie et de la Chine. Imran Khan, 69 ans et ancienne gloire nationale de cricket, est confronté à sa plus grave crise politique depuis son élection en 2018. Le gouvernement doit aussi faire face à la menace accrue des talibans pakistanais du TTP (Tehreek-e-Taliban Pakistan), qui ont annoncé mercredi vouloir lancer une «offensive» contre les forces de sécurité pendant le Ramadhan. Les deux principales formations de l'opposition, le Parti du peuple pakistanais (PPP) et la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N), ont dominé la politique nationale pendant des décennies, avec des périodes de pouvoir ponctuées de coups d'Etat militaires, jusqu'à ce qu'Imran Khan forge une coalition en promettant notamment aux électeurs de balayer des décennies de corruption.