Le dépouillement des votes des législatives au Pakistan a commencé hier en début de soirée à l'issue d'un scrutin historique marqué par une forte participation des électeurs malgré la mort de 18 personnes. Les bureaux de vote ont fermé hier à 18H00 locales (13H00 GMT), soit une heure plus tard que prévu, la commission électorale (ECP) ayant prolongé le scrutin en raison de l'affluence et des retards d'ouverture dans certains endroits. La Commission a notamment annoncé que la participation avait été «énorme» au Pendjab, la plus importante province du pays. A la mi-journée, un de ses responsables l'avait déjà jugée «encourageante» au niveau national avec 30%, en évoquant un taux final proche de 60%, qui serait dans ce cas le plus important depuis 1977. Après la victoire des partis progressistes et laïques en 2008, la majorité des observateurs parient sur un retour de balancier vers le centre droit et sur la victoire de la Ligue Musulmane (PML-N) de Nawaz Sharif, magnat de l'acier issu de l'élite traditionnelle déjà deux fois élu Premier ministre dans les années 1990. Mais le score du Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI, droite) du populaire Imran Khan, ex-légende nationale du cricket qui a tout au long de la campagne électrisé les foules, notamment les jeunes, alimente les spéculations. «Nous voulons du changement, nous n'en pouvons plus de ces vieux politiciens qui reviennent chaque fois au pouvoir et ne font rien pour le pays. Je vais voter Imran Khan car il est jeune, énergique et veut changer les choses en éliminant la corruption», a déclaré un Pakistanais de 74 ans, venu voter malgré des difficultés à se tenir debout. Le vote était particulièrement controversé à Karachi, dans la capitale économique et bouillante mégalopole du sud. La Jamaat-e-Islami (JI) et le PTI y ont notamment accusé le MQM, au pouvoir dans la ville, d'avoir «terrorisé la population et truqué le suffrage». La JI a annoncé qu'elle boycottait le scrutin à Karachi et dans plusieurs autres bastions MQM de la région. Plus de 86 millions d'électeurs étaient appelés à voter pour choisir leurs 342 députés à l'Assemblée nationale et leurs représentants dans les quatre assemblées provinciales. Ce scrutin est considéré comme historique car il va permettre à un gouvernement civil de passer la main à un autre après avoir terminé un mandat complet de cinq ans, une première dans ce pays créé en 1947 et à l'histoire jalonnée de coups d'Etat militaires. Plus de 130 personnes ont été tuées au cours de cette campagne électorale considérée par les observateurs comme la plus meurtrière de l'histoire du pays, des violences revendiquées en grande partie par les taliban du TTP opposés au processus démocratique qu'ils juges «non islamique». Le TTP avait promis une cascade d'attentats lors du scrutin, protégé par plus de 600.000 membres des forces de sécurité. Mais les attaques sont restées d'ampleur limitée hier, même si elles ont tué 18 personnes au total. La plus importante a visé le candidat d'un parti laïc à Karachi et fait onze morts et 36 blessés, selon des médecins. Les autres attaques, d'ampleur plus limitée ont eu lieu dans la province du Baloutchistan (sud-ouest) et dans le nord-ouest, bastion du TTP régulièrement ensanglanté par ses attaques. «Nous avons passé des années à vivre dans la peur des menaces terroristes».