Situé dans la commune d'Iflissen, Tizi-Temlelt trône tel un roi sur un piton de gré et de calcaire blanc, d'où il tire son nom d'ailleurs, face à la mer Méditerranée. Il est situé à environ 8 km de Tigzirt-sur-mer, mais dépend depuis l'Antiquité de la région des Iflissen, sa commune, dont il est l'une de ses fractions dénommée les Ath Zrara. Ledit village se distingue de beaucoup d'autres riverains par sa géographie, sa vue imprenable sur la grande bleue et son histoire. De sa culture et de son histoire, Tizi-Temlelt est l'un des rares villages de Kabylie à avoir pour saint tutelaire...une femme. Les habitants l'appellent affectueusement «Yemma Akerma», mais nul, y compris les vieux, ne pouvait donner ne serait-ce qu'un aperçu de son histoire. Elle est leur sainte depuis des siècles immémoriaux. Elle les protège, les couvre de sa baraka, et cela leur suffit amplement. Ils lui offrent régulièrement des zerdas, «Tsivyita», et reconstruisent avec une architecture moderne son mausolée, qui fait face au stade du village. Un village haut lieu de refuge et de ravitaillement pour les moudjahidine durant la guerre de Libération nationale. La population du village, au milieu des années de guerre, fut, par représailles, évacuée vers le village voisin de Tifra qui comptait un camp militaire avec une SAS. Les familles de Tizi-Tamlelet furent alors dispersées selon les affinités et liens familiaux dans les différentes familles du village hôte et ce jusqu'au cessez-le-feu. Les jeunes et les adultes valides furent réquisitionnés par l'armée coloniale pour des travaux forcés et à la construction de camps d'internement au village et le camp militaire de Aït Youcef, voisin aussi, et ce pour l'hébergement des habitants des villages Aifane, Iknache et bien d'autres encore. Tizi-Temlet est aussi le village natal d'un grand chanteur chaâbi, le défunt Moh Ouali Tizi Temlelt. Un village ayant donné 14 martyrs à la Révolution et plusieurs moudjahidine et moussebline dont certains sont encore en vie à l'instar de son fils Karim qui vient récemment de sortir un album sur lequel nous reviendrons prochainement. Embellissement du village, le défi... Le jour où nous avons mis les pieds au village, il y avait foule. Il s'agissait de l'enterrement d'une vieille dame décédée la veille. Le comité du village tout occupé à organiser les funérailles, nous a délégué un jeune et sympathique volontaire pour nous guider et nous renseigner sur les travaux réalisés et ceux à venir. Il se nomme Karim Baouche, et d'emblée nous déclara: «Nous sommes un comité plutôt jeune, et nous activons sur la base de ce qui a déjà été fait par nos anciens, en quelque sorte nous modernisons et embellissons le village en fonction de notre temps présent qui demande certains aménagements». En effet, après la visite guidée, nous avons constaté que de merveilleux travaux avaient été faits et ces travaux ont nécessité des destructions programmées sans toucher à l'essentiel. La fontaine du village, jadis toute en béton avec son magasin d'eau potable se verra transformée en un petit bijou décoré en Kabyle, avec un autre magasin d'eau décoré lui aussi qui retiendra le trop-plein, qui sera utile pour l'arrosage des rosiers et arbres d'ornementation, une fois tirée avec une pompe. Pour l'alimentation du village en eau, deux châteaux d'eau ont été construits, l'un à la périphérie du village même, et un autre près de la zone de captage située à 1 km au lieudit Ighil N'azra. La place du village offre une splendide vue sur la mer et Tigzirt ainsi que sur les collines alentour. Elle a été aménagée avec des barrières protectrices en inox, des sièges en dur fleuris par les citoyens qui l'ont bordée du côté Nord d'un immense «Z» Amazigh qui trône à l'entrée de la terrasse. La place, quoique vaste, doit être agrandie et de ce fait, l'ancienne Djemaâ doit être détruite, mais remplacée par une autre déjà opérationnelle à l'entrée du village, appelée Tiwbura Teghzuyt. Une nouvelle voie de contournement de la place ira jusqu'à la fontaine, ce qui va certainement libérer la circulation lors des festivités. Le clou, d'après notre guide Karim, est le projet dont il nous parle avec ferveur et enthousiasme:la construction d'une maison kabyle à l'ancienne, «une tazeqa» authentique où seule la pierre sèche et le mortier de terre, roseau, tuile en argile seront à leur place. Pas de ferraille, ni de ciment, rien. Deux maçons sont déjà à l'étude du projet. La tazeqa trônera, elle, sur le mont de calcaire blanc faisant face à la route et qui se nomme Timeqvert Guiger n'sar. Ce mont est déjà ceinturé par des ouvrages de soutènement et verra ses flancs recouverts d'un grillage au- dessous duquel des fleurs et des rosiers seront plantés. Karim, nous dira aussi que le comité attend des aides de la wilaya, en ce qui concerne la construction d'une maison de jeunes dont une assiette a été dégagée du terrain villageois, et l'équipement du stade en tartan et pourquoi pas en vestiaires. Les finances et les travaux... Mais qui financera tous ces projets? Karim nous révélera d'abord que les cotisations des villageois sont importantes, mais aussi les dons réguliers avec parfois de fortes sommes des bienfaiteurs du village, et aussi les envois d'argent des émigrés installés en France et à travers d'autres pays. Il y a aussi des volontariats chaque vendredi, où après la fin des travaux un déjeuner est offert par des citoyens,l'un après l'autre, dans la convivialité. Avant de repartir, nous demandons à notre guide,si Tizi-Tamlelt compte participer prochainement au concours du village le plus propre de la wilaya, «Rabah Aissat», comme l'a fait son voisin Azra, qui a été lauréat du 1er Prix l'année dernière? Sa réponse est: «Pourquoi pas? Nous avons les moyens, la volonté, et l'unité.». Nous quittons ce charmant village avec les centaines de gens présents ce jour-là et qui n'ont cessé de dire du bien d'un comité qui donne envie de l'imiter dans ses oeuvres.