Quatre détenus ont péri et plus de 60 ont été blessés dans un incendie à la prison d'Evine à Téhéran, après un mois de protestations contre la mort de la jeune Iranienne Mahsa Amini, ont annoncé, hier, les autorités. L'incendie samedi soir dans ce centre de détention tristement célèbre a été provoqué par des «voyous qui ont mis le feu à un entrepôt de vêtements», et des affrontements ont opposé «émeutiers» et gardiens, a indiqué l'agence officielle Irna. «Des troubles et des affrontements ont été observés samedi soir», a confirmé un haut responsable de sécurité cité par l'agence officielle Irna. Mais «en ce moment, la situation est complètement sous contrôle et le calme est revenu dans la prison», a-t-il ajouté. Des centaines de personnes arrêtées lors du mouvement de contestation y auraient été envoyées. La prison d'Evine détient également des étrangers ou binationaux. «L'Iran est pleinement responsable de la sûreté de nos citoyens détenus à tort, qui doivent être libérés immédiatement», a averti sur Twitter Ned Price, porte-parole de la diplomatie des Etats-Unis, ajoutant que Washington suivait le développement de l'incident «avec urgence». Le célèbre réalisateur iranien Jafar Panahi, lauréat de plusieurs prix internationaux, et le politicien réformiste Mostafa Tajzadeh se trouveraient dans cet établissement pénitentiaire. Des images partagées sur Twitter par l'organisation non gouvernementale Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, avaient montré d'immenses flammes et une épaisse fumée se dégager de la prison, alors que des coups de feu étaient entendus. L'Iran est confronté à toute une série de manifestations consécutives à la mort de Mahsa Amini, il y a un mois. Cette Iranienne de 22 ans est décédée le 16 septembre, trois jours après son arrestation pour avoir, selon la police des moeurs à Téhéran, enfreint le strict code vestimentaire de la République islamique. Depuis, les Iraniennes ont été le fer de lance des manifestations, criant des slogans, enlevant et brûlant leur foulard dans les rues. À l'ouest de Téhéran, des manifestants ont bravé les forces de sécurité dans la ville de Hamedan. Malgré les fortes perturbations d'Internet, des rassemblements ont également eu lieu à Ardabil (nord-ouest), selon des vidéos partagées sur Twitter. Des commerçants se seraient mis en grève à Saghez, la ville natale de Mahsa Amini dans la province du Kurdistan (nord-ouest), et à Mahabad (nord). Des jeunes ont également manifesté dans les universités de Téhéran, d'Ispahan (sud) et de Kermanshah (nord-ouest), selon des images partagées en ligne. Les manifestants répondaient à un appel de militants à des protestations massives. Ces militants ont encouragé les Iraniens à manifester dans des endroits où les forces de sécurité ne sont pas présentes. Lors d'un rassemblement samedi de «retraités» des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique, un commandant des Gardiens a déclaré que trois membres de sa milice paramilitaire Bassidj avaient été tués et 850 blessés à Téhéran, depuis le début de la «sédition», a rapporté l'agence Irna. La contestation a suscité des rassemblements de solidarité à l'étranger et la répression, qui a fait plus de 100 morts, selon des ONG, a été condamnée par la communauté internationale. Au moins 108 personnes ont été tuées dans la répression, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo. Et des centaines de personnes ont été arrêtées. Vendredi, le président américain Joe Biden, dont le pays est ennemi de l'Iran, a affirmé se tenir «aux côtés des courageuses femmes d'Iran», appelant le pouvoir à «mettre fin à la violence». Les dirigeants iraniens accusent les Etats-Unis de chercher à déstabiliser leur pays en fomentant des émeutes. Alors que l'Union européenne s'apprête à imposer lundi des sanctions à l'Iran, le chef de la diplomatie iranienne Hossein Amir-Abdollahian a appelé l'UE à adopter une «approche réaliste». Les manifestations en Iran sont les plus importantes depuis celles de 2019 contre la hausse du prix de l'essence dans ce pays riche en pétrole.