Les Etats-Unis ont toujours été réticents à ce qu'ils appellent «un surarmement en Afrique du Nord». Le complexe industriel de défense de la Fédération de Russie a -curieusement - demandé de remettre à une date ultérieure la fourniture de chasseurs bombardiers Sukhoï, dont la commande a été passée avec les autorités algériennes depuis l'année 2001. «La partie russe a déjà soumis des propositions pour l'Algérie afin de prolonger le terme de l'accomplissement du contrat de la fourniture de bombardiers du type Su-24MK», a rapporté l'agence militaire russe Interfax-AVN. L'agence a noté que la durée du contrat pour la fourniture de 22 avions chasseurs Sukhoï Su-24MK, a été constamment prolongée depuis 2002. Pour cette «reconsidération» du délai de livraison, aucune raison n'a été invoquée par l'agence russe. En tout cas, il ne s'agit pas d'une difficulté financière qui serait exprimée par le client. Avec un matelas financier des plus avantageux, l'Algérie est à même de payer rubis sur l'ongle son matériel, une fois livré à destination. Il ne s'agit pas non plus d'un problème de saturation ou autres difficultés au niveau des usines d'armement russes. Ces dernières qui carburent à plein régime, viennent de conclure un contrat similaire avec le Venezuela. Reste une dernière hypothèse, relative à la pression qui serait exercée par les Américains sur Moscou, la convaincant de reconsidérer son contrat avec Alger. Déjà pour le Venezuela, Washington a vivement conseillé Moscou de suspendre le contrat au prétexte que le président vénézuélien, Hugo Chavez, représente une menace si son arsenal militaire est renforcé. Au grand dam des Américains, M.Chavez a conclu jeudi dernier, avec son homologue russe Vladimir Poutine, de gros contrats pour renouveler son arsenal militaire. Les contrats signés entre Caracas et Moscou, portant notamment sur 24 chasseurs Sukhoï Su-30, une trentaine d'hélicoptères et la construction d'une usine de fusils Kalachnikov au Venezuela, devraient atteindre trois milliards de dollars. Le ministre russe de la Défense, Sergueï Ivanov, a rejeté les appels de Washington demandant à Moscou de reconsidérer ces ventes. Il a déclaré que la Russie honorerait ses contrats de livraison d'avions de chasse et d'hélicoptères. Ainsi, l'idée que les Américains ont fait de même pour le cas algérien n'est pas à écarter. D'abord, les Etats-Unis ont toujours été réticents à ce qu'ils appellent «un surarmement en Afrique du Nord». Ensuite, il y a le lobby juif marocain très puissant aux Etats-Unis. Emballé par la vente d'armes à l'Algérie, le puissant ministre américain à la Défense, Donald H.Rumsfeld redoute en revanche, la réaction des membres du Congrès. Il craint une opposition contre ce projet à cause de la sensibilité de la région du Maghreb et surtout en raison des soutiens dont jouit le Maroc dans les hautes sphères américaines, étant donné qu'il est considéré comme l'un des plus sûrs alliés de Washington en Afrique du Nord. En février 2006, Rumsfeld a affirmé avoir évoqué la question avec les autorités militaires algériennes. Il s'est dit favorable à une vente d'armes mais la conclusion d'un contrat n'a pas été acquise ou du moins passée sous silence. Car juste après cette visite, le Sénat américain a reçu une communication de la branche exécutive du département d'Etat en rapport avec l'exportation des armes vers Algérie et l'Espagne. En effet, le secrétaire adjoint pour les Affaires législatives américaines a transmis, conformément à l'acte de contrôle d'exportation de l'armement, la certification d'une licence proposée pour l'exportation d'articles militaires pour un montant de 50 millions de dollars. Aucune suite médiatique n'a été donnée à ce contrat. «Si l'Algérie avait à demander à renforcer la coopération militaire, y compris l'achat d'armement, à ce moment-là cette question sera examinée quant au fond, à la substance», a déclaré à la presse, David Welch, lors de sa brève visite à Alger, en mars dernier. Le représentant du département d'Etat a précisé que les demandes seront étudiées au cas par cas «des nécessités exprimées», a-t-il répondu. Seulement, l'Algérie a toujours demandé l'importation des armes notamment pour la lutte antiterroriste. Depuis la visite du président Poutine à Alger en mars dernier et l'annonce de la vente d'armes russes à Alger, le royaume du Maroc a été en effervescence. Jugeant menaçant le parc aérien algérien, le Royaume a déployé toute son artillerie diplomatique pour faire avorter les contrats algériens. Les sollicitations du département d'Etat via ses relais juifs ont été particulièrement accentuées depuis l'acquisition par les forces aériennes algériennes de bombardiers russes Sukhoï 24 Fencer et le développement des techniques de ravitaillement en vol. C'est dans ce contexte qu'il faudrait inscrire cette demande de reconsidérer la livraison des avions commandés par l'Algérie aux Russes.