L'éventuelle participation algérienne au prochain sommet de la francophonie revêtira un aspect plus que symbolique. L'envoyé spécial du président roumain, M.Christia Preda, ministre adjoint des Affaires étrangères, est porteur d'un message adressé au président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika, afin de l'inviter à prendre part au prochain sommet de la francophonie qui doit se tenir en septembre prochain en Roumanie. Une bonne opportunité pour développer les relations déjà excellentes qui unissent les deux pays, a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères roumain. Cette invitation est loin d'être fortuite. Bien au contraire, l'Algérie, considérée comme le deuxième pays francophone au monde et dont 17 Algériens viennent de prendre part à l'université d'été consacrée à la francophonie, est courtisée depuis de nombreuses années afin d'adhérer à cet espace qui, à l'origine, était destiné à la promotion de la langue et de la culture françaises. Un peu à l'étroit dans cet habit, qui prenait de forts relents néo-coloniaux, et pour s'adapter aux nouvelles donnes géographiques qui secouent l'ensemble de la planète, l'organisation a dû modifier ses statuts pour en faire un espace plus élargi, basé en priorité sur des formes de solidarité plus concrètes, dont doivent bénéficier en priorité les pays les plus fragilisés sur le plan économique, tels que le Niger ou le Mali en Afrique subsaharienne, et les anciennes colonies françaises d'Afrique. Cette initiative aux décisions louables, au demeurant, à défaut d'impulser un élan d'adhésion à cet espace, a connu quelques grincements de dents, et non des moindres, provoqués certes par des lobbies qui continuent de voir d'un mauvais oeil un éventuel réchauffement des relations franco-algériennes compromettant l'entrée pleine et entière de l'Algérie dans l'espace francophone. Nostalgiques de l'Algérie française et tenants notoires d'un esprit revanchard, le cercle influent de la politique de l'Hexagone s'oppose farouchement à tout assainissement ainsi qu'à une écriture saine et juste de l'Histoire dramatique et commune qui tient ces deux pays de la rive de la Méditerranée. Au mois de mars 2003 les présidents algérien et français se sont engagés à faire aboutir à brève échéance un traité d'amitié entre leurs deux pays respectifs, l'Algérie et la France, et tout le monde a retenu son souffle. Ce traité d'amitié qui devait être signé avant la fin de l'année 2005 s'est retrouvé court-circuité par la loi du 23 février 2005. Adoptée par le Parlement français, exaltant les bienfaits de la colonisation française en Afrique du Nord et en Algérie en particulier, votée à la veille de la célébration du 51e anniversaire des événements du 8 mai 1945, date symbole des sanglantes répressions commises par l'armée coloniale contre les manifestations pacifiques d'un peuple qui ne faisait que revendiquer son droit à la liberté et qui se sont soldées par 45.000 morts. Les villes de Sétif, Guelma et Kherrata s'en souviennent. La crise ivoirienne qui a, par ailleurs, suscité un fort ressentiment anti-français, n'a-t-elle pas vu le voyage que devait effectuer son président Laurent Gbagbo pour fêter le premier anniversaire des accords de Marcoussis, accouchés au forceps à Paris, repoussé. Si tous ces facteurs de tension ne compromettent pas totalement l'adhésion de l'Algérie à l'organisation internationale de la francophonie à la tête de laquelle se trouve un Africain, en l'occurrence, Abou Diouf ancien président de la République du Sénégal, il n'en demeure pas moins qu'ils sont du genre à exacerber certaines sensibilités. Les relations franco-algériennes ont de tout temps été complexes et ambiguës. La dernière conférence de la francophonie qui s'est tenue au Canada les 13 et 14 mai sur la prévention des conflits et la sécurité humaine représente un vecteur d'intérêt commun aux deux pays et leurs positions sur la plupart des grandes questions internationales sont convergentes et ne souffrent d'aucun équivoque. L'histoire étant ce qu'elle est -et selon une formule célèbre la langue française étant un butin de guerre-tout porte à croire que la présence algérienne au prochain sommet de la francophonie revêtira un aspect plus que symbolique.