Il descend dans l'arène, écoute et ausculte. Avant de poser son diagnostic, qu'il veut juste et complet, sur un corps médiatique souffrant, le ministre de la Communication poursuit sa série de rencontres marathoniennes avec les acteurs du secteur. Après les représentants des chaînes de télévision privées et des sites électroniques, Mohamed Laagab, s'est réuni dans l'après-midi d'avant-hier, au siège de son département, avec les directeurs de publication et des représentants de la presse écrite privée. Avant d'ouvrir le débat avec ses hôtes, le ministre a dressé un constat de son secteur dans une brève allocution. Il a survolé plusieurs aspects du problème dont l'incontournable dossier de la publicité, l'impression et le fonds d'aide à la presse et aux journalistes. Tout en prenant le soin de souligner qu'il est disposé à aider à l'épanouissement de la presse écrite, Laagab a cependant, appelé les responsables de ces publications à s'orienter vers «la transition numérique, mettant en avant la forte concurrence que connaît actuellement la presse électronique». «C'est une nécessité technologique», a-t-il affirmé. Lors des débats avec le ministre empreints d'une grande franchise, les responsables des médias n'ont pas été avares en doléances. Leur listing a été long, aussi long que le nombre de problèmes dans lesquels se débat un secteur totalement laissé à l'abandon. Alors qu'elle était la fierté du pays durant les années 90, symbole d'une démocratie enviée et dynamique, le fer de lance d'une guerre sans merci contre l'obscurantisme, la presse écrite algérienne agonise. Le développement de la presse écrite est un des indicateurs les plus significatifs quant à la singularité du champ médiatique algérien. Il s'est révélé comme un des secteurs culturels qui a le plus bénéficié de l'ouverture démocratique au début des années 1990. Cette dynamique a mis en perspective une forte diversification tant dans les orientations idéologiques que dans les contenus.Les jeunes journalistes qui se sont engouffrés dans cette brèche, l'appelaient «l'aventure intellectuelle». Elle fut fascinante. Captivante jusqu'à s'offrir des dizaines de martyrs. N'est-il pas regrettable pour le pays que d'abandonner l'une des plus belles expériences intellectuelles qui a séduit le monde? Sans gans, les invités de Laagab se sont donnés à coeur joie à ce moment de franchise où tout a été dit: la distribution de la manne publicitaire, l'incroyable anarchie qui règne dans la diffusion des journaux, la nécessité de réduire les taxes et les charges, les blocages bancaires, la formation, et le rôle que doit jouer cette presse dans un contexte régional et international fragiles. La question a été redondante: «Que veut faire l'Etat de cette presse écrite? Quelle est sa stratégie médiatique?» Le ministre Mohamed Laagab s'est félicité de la teneur des échanges et a promis, sous le sceau du ferme engagement, d'oeuvrer à la résolution de tous les problèmes qui ont été soumis lors de cette rencontre, riche et utile à tous points de vue. «Aidez-moi à relever ce défi et je vous garantis que 80% de ces problèmes seront résolus à travers le parachèvement des lois régissant le secteur et l'installation des institutions à même de l'encadrer», à l'instar de l'Autorité de régulation de la presse écrite, ainsi que le Conseil de déontologie de la profession qui auront un rôle important dans l'organisation et le développement du secteur. Le soutien de la presse étant acquis, reste le débat devant la représentation populaire. C'est une tout autre histoire et Laagab doit se battre devant les députés. Il saura se battre pour un nouvel ordre médiatique.