Les 7,3 millions d'inscrits peuvent confirmer leur choix de mars en donnant une majorité parlementaire au président Bassirou Diomaye Faye et à son Premier ministre, Ousmane Sonko. Ils passeront à nouveau par les urnes, suivant une longue tradition démocratique alors qu'ailleurs en Afrique de l'Ouest des militaires ont imposé par la force des agendas qu'eux aussi disent souverainistes et panafricanistes. La cohabitation forcée avec une majorité parlementaire hostile a montré pendant quelques mois que, sans le soutien du législatif, l'Exécutif aurait du mal à tenir la promesse de transformer l'Etat, instaurer la justice sociale, combattre la corruption et rétablir l'indépendance d'un pays aux partenariats politiques et économiques diversifiés, mais qui aurait, selon eux bradé, ses intérêts à l'étranger. Le Président a dissous l'Assemblée, dès qu'il a pu, en septembre. L'ampleur de la victoire est aussi en jeu. L'Exécutif a besoin d'une majorité des trois cinquièmes pour réviser la Constitution, comme promis, sans passer par le référendum. Idem pour mettre en accusation l'ancien président Macky Sall. L'opposition met en garde contre le danger de confier un pouvoir hégémonique à un pouvoir, selon eux, extrémiste ou incompétent. «Nous faisons face à un système qui n'est pas encore mort», a dit Sonko en meeting mercredi soir. Les Sénégalais confirment historiquement aux législatives leur vote de la présidentielle, rappellent les analystes. «La présidentielle, c'était pour ou contre Macky Sall ; ici, ça va être pour ou contre Ousmane Sonko», dit l'enseignant chercheur El Hadji Mamadou Mbaye. Or, «Ousmane Sonko continue de surfer sur sa popularité de la présidentielle, et les gens ont compris qu'il est nécessaire de leur donner la majorité pour pouvoir mettre en œuvre les politiques publiques». L'opposition est dispersée. Cependant, une partie a réussi à constituer des coalitions, note Maurice Soudieck Dione, professeur de science politique. L'opposition claironne qu'en huit mois Sonko a beaucoup parlé et peu agi. Le chômage est à plus de 20%, la vie est chère. Des centaines de Sénégalais continuent à tenter de rallier l'Europe en pirogues. Les comptes publics sont dans le rouge et le Fonds monétaire international vient de suspendre un programme d'aide. Différents projets sont bloqués et le privé attend le paiement des créances de l'Etat. «Il peut y avoir un avertissement de la part des électeurs», envisage Dione Ousmane Sonko, Premier ministre, tête de liste du Pastef, son parti. Il aurait pu être président si sa candidature n'avait été invalidée au terme de trois années de confrontation avec le pouvoir. Il a fait élire Faye. Dans un système historiquement hyper-présidentiel, il est un super vice-président en puissance. Il continue à souffler sur les braises comme quand il appelle en pleine campagne à venger ses militants agressés, avant de se radoucir. Macky Sall, ancien président (2012-2024), est parti sans gloire en avril à destination du Maroc. Il a rompu avec la coutume de réserve post-présidentielle en acceptant la tête de la coalition Takku Wallu Sénégal. Il fait campagne à distance. Son retour in extremis, malgré le risque d'être inquiété par ses successeurs, aurait un retentissement considérable.