Belkhadem a souligné que l'Algérie était prête à «développer des relations entre Etats souverains». Et de trois pour Sarkozy, qui après deux visites successives en Algérie, comme ministre de l'Economie et des Finances, est attendu aujourd'hui en tant que ministre de l'Intérieur et surtout de candidat à la présidentielle de 2007. L'escale d'Alger de M.Sarkozy, comporte deux chapitres: celui lié à ses responsabilités officielles, à savoir la lutte contre le terrorisme et l'immigration clandestine et le volet inhérent à la prochaine échéance électorale, à savoir l'élection présidentielle en France. D'ailleurs, les dernières déclarations de M.Sarkozy dans les colonnes de Jeune Afrique, au sujet de suppression de l'autorisation préalable de visa, estimant que les Algériens ne doivent plus être les seuls au Maghreb à supporter cette mesure «vexatoire», ainsi que le sempiternel dossier controversé du traité d'amitié entre Alger et Paris, sont les principaux axes de la campagne du candidat Sarkozy, en direction des pays du Maghreb et par ricochet des émigrés. Sarkozy débarque, donc, à Alger avec une nouvelle conception de la refondation des relations entre les deux pays. Celle qui s'inscrit dans la durée et non motivée par un simple traité qui sera jeté aux orties au gré des conjonctures politiques. Même si les tensions du passé pèseront de tout leur poids sur cette visite. D'ailleurs, lors de sa dernière prestation télévisée, le chef du gouvernement, M.Abdelaziz Belkhadem, a demandé à la France de reconnaître ses crimes durant la colonisation de l'Algérie (1830-1962). «Il faut que la France reconnaisse les crimes commis en Algérie», indique Belkhadem «pas seulement le nombre des victimes, le pillage des richesses, mais également l'effacement de l'identité nationale», a-t-il précisé. C'est dire que M.Belkhadem, qui est aussi l'un des initiateurs d'un projet de loi condamnant la loi du 23 février 2005, ne manquera pas de réitérer les positions de principe de l'Algérie par rapport à ce fâcheux épisode qui a envenimé les relations entre les deux capitales. Belkhadem, tout en s'appuyant sur la déclaration du président français, Jacques Chirac, lors d'une visite en Arménie, selon laquelle un Etat se grandit en reconnaissant ses erreurs, a lancé indirectement un appel au chef de l'Etat français afin de donner lui même l'exemple. Il s'interroge: «Est-il concevable qu'un Parlement aille jusqu'à glorifier la colonisation?» en référence à la loi française du 23 février 2O05 dont un article, abrogé par la suite, évoquait un côté positif de la colonisation. Le chef du gouvernement a, toutefois, souligné que l'Algérie était prête à «développer des relations entre Etats souverains» avec la France dans «l'intérêt commun» des deux pays. Après celle effectuée en avril par le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, qualifiée d'«échec» par la presse, la visite du ministre de l'Intérieur, numéro 2 du gouvernement et présidentiable virtuel, est «très attendue des deux côtés» de la Méditerranée, assure-t-on au ministère, à Paris. Elle a été «préparée en étroite relation avec son homologue Yazid Zerhouni, les deux hommes s'étant parlé et vus à plusieurs reprises depuis avril», justement. Ils auront un nouvel entretien lundi après-midi. Sarkozy, qui séjournera pendant deux jours en Algérie, s'entretiendra avec le président Abdelaziz Bouteflika et le Premier ministre Abdelaziz Belkhadem. Il visitera le Monument des martyrs, le cimetière chrétien de Bologhine (Saint-Eugène) et la basilique algéroise de Notre-Dame d'Afrique. A noter qu'au volet des entretiens bilatéraux, Sarkozy évoquera, avec son homologue algérien, le renforcement de la coopération contre le terrorisme et l'immigration irrégulière. En somme, la visite de Nicolas Sarkozy, très attendue au niveau des deux rives de la Méditerranée, est porteuse d'une nouvelle conception de l'amitié. Celle qui balisera le terrain aux futures générations de Français et d'Algériens. A condition que la France accepte d'assumer son passé colonial et les crimes commis contre le peuple algérien.