«Nous voulons combattre la corruption par l'arme que nous maîtrisons le mieux: l'intelligence», selon Benbitour. Voilà des hommes et des femmes déterminés à en découdre avec un phénomène combien puissant et dévastateur. Benbitour, Mahsas, Me Benbraham, le fils de Benboulaïd, Bensaïd et beaucoup d'autres, ont pris la décision de prendre le taureau par les cornes: s'attaquer au phénomène de la corruption sans moyens appropriés. Ils savent tous que le phénomène s'est banalisé, qu'il s'est généralisé dans le comportement du citoyen jusqu'à faire partie des moeurs, qu'il laisse des victimes sur son passage. «Non, disent-ils à l'unisson, il ne faut pas baisser les bras. Ce n'est pas une fatalité». Ils ont tenu, hier, une conférence de presse pour communiquer leur idée à l'opinion publique. Ils ont mis leur initiative sous le titre générique «Sauvegarde des intérêts des générations futures». La déclaration lue par Benbitour énonce «une initiative de passage de la dénonciation de la corruption à la mise en place des remèdes». Mais, en réalité, les remèdes ne sont pas palpables. On insiste là-dessus. Benbitour répond: «Nous n'avons pas d'outils mais nous allons utiliser l'arme que nous maîtrisons le mieux: l'intelligence.» On s'organise d'abord dans le cadre de la société civile, on mobilise les citoyens autour du projet. Me Benbraham prend le relais: «Nous proposerons des idées aux législateurs qui en feront des lois.» L'idée commence à prendre forme. Les initiateurs du projet veulent créer un espace de réflexion, une sorte de laboratoire d'idées, ouvert à l'élite en particulier pour suggérer des propositions dans la finalité de mobiliser la société, sans pour autant se substituer aux institutions. Le groupe de Mahsas veut apprendre à la société comment s'organiser. Il est hébergé chez l'Académie de la société civile (Asca). Si les conditions sont réunies, le groupe organisera une assemblée générale suivie de trois autres régionales pour mieux imprégner la société de l'idée qui anime ses auteurs. Il est vrai que pour beaucoup de gens le phénomène est une fatalité. Ils lui opposent la résignation ou l'indifférence. On ose toutefois poser la question: est-ce que le phénomène a des origines historiques? Mahsas dit que non. «Le phénomène est nouveau dans la société algérienne». Il insiste: «Le peuple algérien est connu pour sa solidarité. NON, il n'était pas ainsi avant», martèle-t-il. Benbitour le met sur le compte de la transition et des individus qui se sont substitués à l'Etat, ainsi que les richesses du pays. «Ce n'est pas le fait du hasard si la corruption prospère dans les pays riches», relève-t-il. Il y avait également Abderahmane Chibane, président de l'association des Ulémas, qui soulève le côté moral en estimant que la gangrène a atteint des pans entiers de la société. Enfin, tout le monde veut passer à l'action sans savoir trop comment. «Si la volonté politique existait on n'en serait pas là», rétorque Benbitour. Mais il y a un début à tout, même si on n'y croit pas beaucoup. La corruption est en train de ronger la société. On est impuissant devant le phénomène. Mais il ne faudrait pas que les futures générations la subissent. Voilà le message que veulent transmettre les initiateurs du projet aux gens disposant d'une conscience.