Les services de renseignements occidentaux évoquent même un «embrasement terroriste». L'attentat à Casablanca au Maroc où l'explosion accidentelle d'une bombe dans un cybercafé qui a fait un mort, le kamikaze, et trois blessés parmi les clients, a permis de mettre à jour une cellule opérationnelle de quatorze jihadistes qui s'apprêtaient à passer à l'acte. Le jeune homme venait prendre des instructions sur la cible choisie en consultant un site internet. Cela, tout le monde le sait, mais à la question de savoir qui donnait les ordres et les instructions, personne ne peut répondre. Un signal fort de la menace terroriste qui pèse sur la région. En Algérie, il n'y a qu'à voir le dispositif policier et les maillages sécuritaires qui quadrillent la capitale de façon quasi-hermétique pour se rendre compte que la menace du Gspc-Al Qaîda est non pas uniquement forte, mais commence à devenir réellement lancinante. La Tunisie, pays jusque-là épargné par la menace terroriste, avait vécu en fin décembre et début janvier 2007, une histoire en deux actes, avec une cellule terroriste composée d'une trentaine d'éléments, et qui avaient, malgré l'échec de leur entreprise, fait entrer la Tunisie dans le cercle très ouvert des «pays sous menace». Les services de renseignements occidentaux évoquent même un «embrasement terroriste». De ce fait, la CIA américaine vient de renforcer son dispositif au Maroc ainsi qu'en Algérie, où les services français sont déjà très présents. Inquiétude réelle donc parce que c'est vrai, même amplifiée dans le cadre d'un «tout-préventif», et même si les autorités sont toujours très discrètes, il ne se passe pas une semaine sans que les groupes islamistes, au Maroc, en Algérie ou en Tunisie, passent à l'action ou tentent de le faire. On peut ainsi révéler, et la presse de Rabat donne l'information, et c'est une information inédite, que juste avant l'attentat raté de Casablanca, la police marocaine a identifié un groupe de 21 Algériens arrivés dans la région de Marrakech. Un groupe armé, manifestement prêt à commettre des attentats. Huit de ces hommes ont été arrêtés, les autres sont activement recherchés. Selon des informateurs locaux, les Algériens qui, à travers l'ex-Gspc, groupe rebaptisé Al Qaîda au Maghreb, servent un peu de fer de lance aujourd'hui dans cette offensive terroriste, et servent de ciment pour fédérer et pour rapprocher les groupuscules très actifs installés au Maroc et en Tunisie. On parle, en termes de stratégie contre le terrorisme, que le Gspc se trouve en pointe pour piloter des actions qui vont, c'est clair, s'intensifier. C'est certainement sur la base de documents et d'écoutes secrètes de la CIA que l'ambassade des Etats-Unis à Alger a mis en garde ses ressortissants sur l'éventualité d'une attaque terroriste contre un avion transportant des travailleurs occidentaux en Algérie, dans un message d'alerte diffusé lundi soir sur son site. «Il y a des informations selon lesquelles des extrémistes pourraient être en train de préparer une attaque contre un avion commercial transportant des travailleurs occidentaux en Algérie. Dans l'immédiat, aucune information supplémentaire n'est disponible sur le transporteur (visé) ni sur la date d'une telle attaque» (éventuelle), ajoute cependant ce message, qui renouvelle les mises en garde antérieures aux ressortissants américains concernant les voyages en Algérie. L'Algérie a connu, ces dernières semaines, plusieurs attaques de groupes islamistes affiliés au Gspc, notamment contre un transport de personnel d'une société américaine BRC, à Bouchaoui, près d'Alger, et en Kabylie. Ces actions ont été revendiquées par le Groupe salafiste pour la prédication et le combat affilié à Al Qaîda, lequel affirme qu'il agit désormais au nom de l'organisation d'OBL. Washington souhaite depuis des mois transférer son commandement militaire pour le Maghreb et l'Afrique, sans trouver un «point de chute». L'ambassadeur américain, Robert Ford, disait récemment, que «le grand commandement militaire se trouve à Bruxelles, où il y a une filiale qui s'occupe de la région du Maghreb et de tout le continent africain, et qui se trouve à Stuttgart, en Allemagne. Ce commandement est dirigé par le général Ward. La question qui se pose est la suivante: va-t-on rester en Allemagne? Va-t-on déplacer le siège? C'est possible...Le Congrès n'a pas encore donné le financement nécessaire pour l'opération», a encore précisé Robert Ford, précisant: «Les Etats-Unis ont des intérêts stratégiques dans le Maghreb, le Sahel et l'Afrique de l'Est. Par conséquent, nous avons beaucoup de travail dans la région, ce qui nous pousse à vouloir canaliser nos ressources, et donc à réfléchir sur la question de séparer les commandements...» Concernant les mises en garde de la CIA et les «travel warning» donnés par l'ambassade aux ressortissants américains, il a confirmé: «Si vous consultez nos sites gouvernementaux officiels, vous remarquerez que nous avons donné des consignes de sécurité à nos ressortissants. Nous avons dit qu'il fallait prendre toutes les précautions possibles pour se déplacer, et nous avons insisté sur le danger que présentait l'est de la capitale. Aussi, nous avons formé une commission mixte avec les entreprises américaines installées en Algérie en vue d'échanger nos informations et de nous tenir au courant de tout ce qui se passe en matière de sécurité. J'ai visionné la vidéo de l'attentat de Bouchaoui, et je trouve pénible de s'en prendre à des civils, car les auteurs de l'attaque savaient qu'ils allaient toucher des civils». Le coup d'éclat de Bouchaoui a certainement agi comme un coup de semonce, mettant aussi bien les services de sécurité algériens que les ressortissants américains sur le qui-vive.