C'est un 31 mars 1957 que le colonel Ali Mellah rejoignit la grande liste des martyrs. Le mois de mars fut le mois du grand dénouement, celui de la victoire du peuple algérien sur le colonialisme. C'est, en effet, le 19 mars 1962 que le cessez-le-feu consacra la fin de 130 ans d'asservissement et de lutte. Le mois de mars fut, également, celui durant lequel un grand nombre de chefs et pionniers de la guerre de Libération nationale tombèrent au champ d'honneur: Mustapha Benboulaïd, Larbi Ben M'hidi, Ali Boumendjel, le colonel Amirouche, le colonel Haouès, le colonel Lotfi, le commandant Lakhdar, le commandant Ferradji, le commandant Zeghloul et c'est un 31 mars 1957 que le colonel Ali Mellah rejoignit la grande liste des martyrs. Le colonel Si Chérif de son vrai nom Ali Mellah, était d'origine modeste; son père était imam du douar Taka à M'kira, dans la commune de Draâ El Mizan, en Grande-Kabylie. Né en 1924 au douar Taka, il reçut de son père une éducation arabo-islamique et fréquenta les écoles coraniques et les zaouias. A l'âge de 21 ans, il adhéra au PPA et ne tarda pas à devenir responsable de Kasma (secteur) dans son douar. En 1947, il se heurta pour la première fois à l'administration coloniale, à l'occasion de la campagne électorale à laquelle il prit part en faveur du Mtld. Depuis lors, recherché par la police, il résolut de vivre dans la clandestinité. Condamné à mener une vie de fugitif, il dut un jour attendre, caché sur un olivier, à bonne distance de chez lui, qu'on vienne lui annoncer la naissance de son fils, Amar en 1948. Ce fut son unique enfant. Afin de le soustraire aux recherches de la police, le parti le muta, tour à tour de, 1948 à 1954, à Tigzirt-sur -mer, à Aïn Bessem et plus tard comme responsable de la région de Dellys, Sidi Daoud et Baghlia. Quand il prit part au déclenchement du 1er Novembre 1954, il était à la tête des deux régions de Tigzirt et Azzazga. En 1955, bien que contraint de se replier à Aïn El Hammam à cause d'une blessure à la jambe, il continua, en étant encore sous traitement, à diriger son secteur. Une fois rétabli, il reprit son commandement et entreprit de favoriser la pénétration de la Révolution dans le Sud en commençant par les régions de Sour El Ghozlane et Ksar El Boukhari.Il prit une part active dans la préparation du congrès de la Soummam et devait assister à ses assises comme représentant du Sud (le Sahara), mais il dut rebrousser chemin pour faire face à une urgence signalée dans son secteur. C'est Amar Ouamrane, chef du maquis algérois qui le représenta au congrès et lut le rapport sur le Sud que le colonel Si Chérif avait préparé. Au terme de ce congrès, le Sahara fut érigé en wilaya VI, placée sous le commandement de Si Chérif, nommé colonel, membre suppléant du Cnra (Conseil national de la révolution algérienne), le colonel Ali Mellah était un homme de coeur. Bon, généreux et sensible, il était aussi un excellent orateur. Il saisissait chaque occasion, au cours de ses déplacements, pour réunir les moudjahidine et leur donner des conférences d'orientation politique et religieuse.Sur son chemin de retour de la vallée de la Soummam vers la wilaya VI, il s'est permis un bref arrêt nocturne dans son douar pour rendre visite à sa petite famille. Une visite qui s'avéra être la dernière. Comme son fils était couché, il n'osa pas le réveiller et se pencha pour l'embrasser avant de quitter le domicile. Un fils qui avait atteint l'âge de huit ans et qu'il n'avait pas vu grandir. C'est alors que quelques larmes tombèrent sur le visage de l'enfant et le réveillèrent. Voyant les yeux de son père inondés de larmes, le fils se mit à pleurer. C'est sur cette scène que le colonel Si Chérif quitta sa famille, pour ne plus jamais la revoir puisqu'il devait tomber au champ d'honneur, sept mois plus tard.