En examinant l'exemple du système scolaire belge, on mesure combien il n'est pas sorcier de rendre heureux les enfants et... l'avenir d'un pays. Si les élèves algériens savaient. Le débat sur l'obligation de réussir à l'examen du BEM pour pouvoir accéder au cycle de l'enseignement secondaire, suscité après l'intervention du président de la République lors de sa visite à Sétif, est révélateur de l'abîme qui sépare les concepteurs des pédagogies et programmes scolaires des réalités et exigences du monde moderne. Cette condition «osée» par le ministère de compétence n'est pas la première incongruité, pour ne pas dire «sabotage» de l'école algérienne, puisque l'idée a été émise, également, pour le passage du cycle primaire au premier palier du secondaire, soit l'examen de la sixième. Au-delà de la colère qui nous habite face au niveau de l'enseignement dans notre pays et l'angoisse qui nous saisit en s'imaginant l'avenir des enfants, notre désarroi n'a d'égal que notre stupeur lorsque l'on constate que les pays à hautes productivités scolaire et intellectuelle, suppriment de plus en plus ce genre d'examens, pour les remplacer par une évaluation par cycle du parcours de l'élève. L'exemple de la Belgique est, à ce titre, considérable, à tel point que étudiants et élèves français «migrent» -pour ceux qui le peuvent, notamment les frontaliers- vers les écoles belges. Voilà un pays où les examens nationaux de fin de cycle ne sont point la condition première de passage d'un cycle à l'autre. La fin des études primaires est bien sanctionnée par un examen national pour l'obtention d'un Certificat d'études de base (CEB), mais il ne conditionne pas le passage au collège. C'est beaucoup plus un diplôme d'honneur attribué lors de grandes cérémonies où élèves, parents et professeurs, élus locaux...festoient l'événement. Les enfants heureux repartent avec cadeaux et livres sous les bras. En Belgique, il est interdit d'exclure un élève à la fin du primaire, quels que soient ses résultats scolaires. Car au cycle suivant, le secondaire, c'est un travail sérieux de suivi permanent de chaque élève aussi bien par les professeurs que par les équipes pédagogiques et sociales présentes sur les lieux d'enseignement. En plus, de la signature d'un cahier journalier (chaque soir à la maison) de l'élève par les parents, ces derniers sont obligés d'assister à des réunions et à un contact régulier avec le corps d'enseignant. Sans rentrer trop dans les détails, le cycle secondaire d'une durée de six ans est sanctionné par un Certificat d'études secondaires (CES), qui lui, n'est pas national. Il porte sur les programmes d'études de la sixième année. Là encore, il n'y a pas en Belgique d'examen national, type baccalauréat, comme condition première pour l'accès aux études universitaires. C'est le parcours de tout le cycle secondaire, particulièrement les trois dernières années qui sont prises en considération dans le quitus pour des études supérieures. A ce niveau des études, l'exigence de qualité et de niveau s'affinent davantage, et conditionnent les orientations des étudiants. Par ailleurs, l'unité pédagogique (la durée d'un cours) est dans le primaire de 45mn. Les après-midi sont en grande partie, réservés aux activités ludiques: théâtre, jeux, musique, informatique...Les cours débutent à 08h30mn et se terminent à 15h30mn en général. En Allemagne, les cours à ce niveau finissent à 13h00! Il n'y a pas en Belgique des écoles primaires de 600 où 700 élèves. Ce sont des écoles qui dépassent rarement 150 ou 250 élèves, avec pas plus de 18 élèves par classe. C'est la loi. La plupart des classes contiennent pas plus de 12 où 16 élèves. L'astuce est simple: installer une petite école dans chaque quartier, au lieu d'une grande pour plusieurs quartiers. Chaque Belge trouve une école primaire dans son rayon proche d'habitation. Passons sur les activités parascolaires, telles les sorties, les voyages sur d'autres régions du pays et, pour le secondaire, vers d'autres pays européens. Voyons plutôt, une autre question fondamentale ayant trait à la citoyenneté et la liberté. En Belgique, les élèves de quatrième primaire apprennent la déclaration universelle des droits de l'homme! Ils apprennent la deuxième langue du pays, le néerlandais. Au secondaire, des classes de langues étudient, en plus des deux langues officielles que sont le français et le néerlandais, jusqu'à trois autres langues en même temps, comme l'anglais (obligatoire), l'allemand, l'espagnol...Avec un tel système, les Belges ont été reconnus par l'Unesco comme l'un des premiers pays au monde maîtrisant plusieurs langues étrangères, et son université de Louvain a été classée, cette année, troisième en Europe après deux université anglaises qu'on vous laisse deviner. Et c'est un Algérien, Kouider Benaoum, enseignant les mathématiques dans cette université prestigieuse de Louvain la Neuve, consulté par le ministère algérien de l'Enseignement supérieur sur la méthode LMD (licence, master, doctorat), qui m'a appris une chose étonnante. «Mon père était inspecteur d'académie en Algérie, il m'a dit que pour un seul centre d'examen, j'avais un budget de 800 millions de centimes pour les corrections. Songez qu'il y a des centaines de centres d'examens, peut-être plus importants, vous imaginez où va l'argent de l'éducation?». Peut-être dans l'exclusion des enfants et adolescents du système scolaire, puisque même les mômes de 12 ans doivent réussir la sixième, sinon... Pauvres petits.