«Un problème clairement énoncé est à moitié résolu» dit l'adage. On ne sait pas grand-chose sur le phénomène harraga. Il était temps de commencer à étudier le phénomène. Enfin, les autorités daignent organiser un colloque sur le phénomène des harraga. Jusqu'à ce jour, on avait l'impression que ce problème ne nous concernait pas et qu'il n'intéressait que quelques martiens d'une planète lointaine, peut-être située dans une autre galaxie. Non, les gens qui prennent une barque de fortune, au péril de leur vie, ne sont pas des Algériens. Ils sont venus on ne sait d'où, et s'ils fuient ce pays, c'est pour des raisons que le commun des mortels ignore. En tant que Martiens, ils sont libres d'aller et venir, de prendre le bateau, de mourir au large, de pourrir dans un centre de regroupement à Lampedusa. N'étant pas de chez nous, ils sont donc autorisés à quitter le pays sans expliquer leur motivation. Sans mobile apparent. La question, que vous vous posez et nous le devinons est la suivante: «Mais qui donc a eu l'idée géniale d'organiser cette rencontre». Réponse: La rencontre qui aura lieu demain est organisée par le docteur Ould Abbès au siège du ministère de la Solidarité nationale, sous le thème: «Débat autour des jeunes expulsés d'Europe et des harraga». Les textes suivants seront, nous dit-on, débattus: présentation de l'état des lieux à partir de témoignages vivants. Echange d'informations et de données sur le phénomène d'immigration clandestine et de séjours irréguliers. Définition des principales causes de l'immigration clandestine et de ses effets sur les jeunes. Plaidoyer pour un plan de sensibilisation et d'information des jeunes et de leur entourage immédiat. Présentation de la stratégie d'action de lutte contre le départ des jeunes vers l'étranger, clandestinement. Les organismes qui sont invités à participer à cette rencontre sont différents instituts de recherche, parmi lesquels le Cnes, l'ONS, le Crasc, le Cread, l'ETF, l'IMF, l'Onlct, les représentants de différents ministères et institutions de l'Etat, des associations, des consultants et de jeunes témoins. Avec une telle assistance, on peut dire que ce n'est pas une rencontre réduite. Si toutes ces instituions de la République et tout cet aréopage de chercheurs et de penseurs se penchent sur la question, on risque enfin, pour une fois de savoir le fin mot de l'affaire, n'est-ce pas? comme disait ce vieil instituteur, qu'«un problème bien énoncé est déjà à moitié résolu?» On peut légitimement espérer qu'après avoir étudié le problème sous toutes les facettes et dans toutes ses coutures, on finira bien par trouver des solutions. Cela dit, vous remarquerez que le terme employé est celui de l'immigration, c'est-à-dire les gens qui viennent chez nous en Algérie, et non pas ceux qui s'en vont clandestinement. Déjà à ce niveau, il y a quelque chose qui cloche. Soit on confond les deux problèmes, soit c'est fait sciemment, et là ça pose d'autres questions, tout aussi pertinentes. Quant à savoir pourquoi c'est au ministère de la solidarité qu'échoit l'étude d'un dossier aussi épineux, c'est une paire de manches! Les harraga et les migrants clandos dans le couffin et la chorba du Ramadhan, il fallait le faire. Les harraga sont-ils des assistés? En fait, on voit bien qu'ils refusent obstinément l'assistanat de M.Ould Abbès, puisqu'on continue de repêcher leurs corps dans les eaux de la Méditerranée.