Le FFS, qui a réuni son conseil national pour fixer définitivement sa position concernant les législatives du 30 mai, a choisi le grand espace de la télévision et l'émission «Ousboue El Djazaïr» en particulier, pour annoncer officiellement et publiquement sa non-participation aux élections. Cette décision a été annoncée pendant cette émission où le premier secrétaire du FFS, M.Ahmed Djeddaï a réussi à piéger la journaliste Ghania Oukazi et fait passer tous les messages et toutes les revendications de son parti. Ainsi, M.Djeddaï, fidèle à ses habitudes d'homme politique rusé et fin, a justifié la non-participation de son parti par l'existence d'un sondage qui a été réalisé, selon les propos du responsable du FFS, par le pouvoir et qui indiquait que 18% des Algériens souhaitaient participer à ces élections. Le FFS a justifié aussi son boycott des législatives du 30 mai par la situation politique et sécuritaire dans le pays et plus particulièrement en Kabylie. M.Djeddaï a profité de son audience médiatique pour accuser ouvertement le pouvoir d'être derrière la dégradation et le pourrissement de la situation en Kabylie. Saisissant toujours cette opportunité de passage à l'Entv, Djeddaï a ignoré les rappels à l'ordre de la journaliste de l'émission et a réussi à faire passer ses appels à l'opposition. Ainsi, le FFS appelle à une dissidence électorale, populaire et pacifique, comme il a appelé à une grève générale des fonctionnaires chargés des opérations électorales. Interrogé sur cette fuite en avant, le premier secrétaire du FFS a déclaré que son parti a des racines populaires comme il y a des partis qui ont des liens avec le pouvoir. Le FFS, ajoute M.Djeddaï, se met aux côtés du peuple pour demander un changement radical. Questionné sur la garantie demandée par le FFS pour participer aux élections, M.Djeddaï exige la levée de l'Etat d'urgence, la consécration de la citoyenneté nationale et l'ouverture du champ politique et médiatique. M.Djeddaï conclut son intervention politique très spéciale en mettant en garde le pouvoir contre une éventuelle dégradation de la situation en Kabylie, qui pousserait certains radicaux de la région à prendre les armes et donner le point de départ à une nouvelle guerre civile. Ainsi cette décision paraît comme une volte-face du FFS tant les militants et les cadres de ce parti étaient motivés par une participation active aux élections législatives. Mais les débats qui ont secoué le conseil national étaient tels que la tendance qui a prôné le boycott a fini par remporter la décision. Ahmed Djeddaï et les membres du conseil national avaient déjà tenu près de 40 heures de réunion, en l'espace d'une semaine, pour pouvoir dégager une position qui risque, toutefois, de provoquer une grosse frustration au niveau de la base. Il semble évident que les derniers développements en Kabylie, notamment la vague d'arrestations au sein de la Cadc et de la CICB, ont fait basculer la décision vers un refus d'aller aux législatives. Même si le parti d'Aït Ahmed s'est toujours montré critique, voire virulent, contre l'organisation des ârchs, qu'ils soient dialoguistes ou radicaux, il n'en demeure pas moins qu'au regard des principes politiques du FFS, il n'était pas question d'aller aux élections dans un contexte aussi agité. D'ailleurs, dès mardi, la décision d'un boycott du FFS mûrissait après que Djeddaï eut dénoncé dans un communiqué une «énième opération provocation et fait porter au pouvoir l'entière responsabilité dans l'enlisement de la crise nationale», en qualifiant les arrestations des délégués des ârchs d'expéditions punitives et de «coups de force». La décision du FFS est, de ce fait, en contradiction avec les intentions affichées des cadres et des militants qui ne voulaient pas s'aligner sur la décision de boycott du RCD de Saïd Sadi, ni sur celle à laquelle ont appelé Ali Gherbi, Belaïd Abrika ou Ferhat Mehenni. Dans ce sens, le FFS prend à défaut l'ensemble des observateurs qui voyaient en sa stratégie politique une temporisation à des fins de négociations avec le pouvoir. La fameuse politique des quotas annoncée et que les milieux politiques fixaient à une cinquantaine de sièges pour le FFS, en misant sur la Kabylie (récupération des sièges du RCD) et quelques régions du Centre, est, de ce fait, démentie. Même si la porte demeure ouverte à une révision exceptionnelle de cette décision où l'empreinte d'Aït Ahmed n'apparaît pas officiellement. Et même si Djeddaï l'a annoncé, c'est d'ailleurs du leader historique que l'explication de texte devrait intervenir.