Les Echelons locaux constituent le socle unique et unifié de l'espace national viable. Le citoyen algérien se demande souvent, pour ne pas dire toujours, que son bien-être - pour tout dire sa vie - est lié à la vitalité économique, sociale et culturelle de l'espace où il est censé s'établir, faire oeuvre humaine. L'ouvrage Algérie, histoire d'une construction spatiale: 1960-2005 (*) d'Ahmed Tessa de l'Université Mouloud-Mammeri, nous ramène à cette réalité forte et pesante que nous venons d'évoquer. Le rêve, de chacun de nous, doit se situer définitivement, logiquement, devant nous. Au reste, ce n'est pas de rêve qu'il s'agit, mais bel et bien de l'existence raisonnable que les Algériens, dans l'union indéfectible, ont la volonté de se construire. Les particularités régionales -qui, heureusement, sont multiples, claires et pures- favorisent, autorisent toutes sortes de possibilités pour que chaque citoyen s'épanouisse selon son rythme, selon sa vocation, selon l'ombre qu'il se donne proprement. Il y a certainement une pédagogie, non une démagogie, à s'enseigner à soi les voies de l'existence. Tout être vivant a droit à un territoire; il n'est pas nécessaire ici, je pense, d'étayer cette réflexion par des exemples... Ahmed Tessa, enseignant chercheur et doyen de la faculté des sciences économiques et des sciences de gestion, lève un coin du voile qui semble cacher le secret du juste développement de notre pays; il écrit, en effet, «L'Etat doit rester encore entrepreneur en matière de dotation en équipement public tout en engageant un processus de décentralisation et de renforcement des pouvoirs locaux. La rente pétrolière, revenu principal de l'Etat, ne doit pas constituer un facteur incitatif à la centralisation, mais au contraire il doit inciter l'Etat à léguer certaines de ses prérogatives aux échelons locaux.» Ainsi le territoire est une poésie qui ne meurt jamais, car l'homme y invente son destin: sa reproduction, sa survie, sa continuité, son ambition d'homme. Sans doute, on pourrait y voir là une élévation d'esprit hors saison. Mais justement, la saison d'être, la raison d'être sont une seule et même chose. Si les espaces ne sont pas définis, ne sont pas analysés, ne sont pas traités, comment pourrait-on prendre «conscience des implications territoriales dans la problématique du développement» et comment oser prendre en charge le «volet "aménagement du territoire"» si la politique ne se consacre pas, avec la force de toute son autorité, à la mise en oeuvre des différents plans de développement économique qu'elle a elle-même élaborés? Pourtant, il faut bien reconnaître avec Ahmed Tessa que «L'aménagement du territoire en Algérie est le fait essentiel de l'Etat. Bien que ces dernières années, l'initiative du secteur privé soit reconnue, les grands aménagements restent toujours le fait des pouvoirs publics. Parfois, dans le sens de décentralisation, l'initiative de la prise en charge de décisions est cédée aux élus, mais généralement bloquées par les représentants de l'administration centrale (ministre, wali, chef de daïra,...» Les disparités sont toujours là et, avec le temps, prennent de l'ampleur; faute de n'avoir pu rattraper le retard, s'accumulent d'autres retards. Un équilibre criant à configurer, à réaliser sur le territoire, reste en face de nous. L'Algérie est un immense chantier qui a besoin de tous les cerveaux et de tous les bras de ses enfants pour sortir d'urgence du marasme que tout citoyen de bonne foi observe, et généreusement pardonne. Pourtant, il suffit de se convaincre que, dans la confiance, tout peut être créé: le bonheur de vivre dans n'importe quelle région de notre pays; la dynamique de la solidarité: interpeller, aider, rassurer les citoyens qu'en quelque lieu qu'ils se trouvent, ils ont maison, travail, école, hôpital, transport, sécurité. Car enfin la bonté et l'amour de notre Terre maternelle, l'Algérie, n'est pas une utopie. Certes, la problématique est politique, mais elle est aussi économique et sociale. Osons mettre en place cette idée très juste d'Ahmed Tessa: «À notre sens, l'enjeu de la construction régionale s'exprime en terme de la relation de pouvoir entre le centre, le local et le régional. [...] Cette oeuvre régionale suscite la mise en place d'une articulation aux niveaux: national / régional, régional / wilayal, communal / wilayal et communal / systèmes productifs locaux / société civile.» Toute la sainte responsabilité de chacun de nous est là. Dans son étude, très courte, mais très dense, technique mais très lisible, Algérie, histoire d'une construction spatiale: 1960-2005, Ahmed Tessa relate, tout en l'analysant, un vécu et une possibilité immédiate d'aller de l'avant à la conquête de l'espoir du citoyen algérien. L'ouvrage est en librairie. (*) ALGERIE, HISTOIRE D'UNE CONSTRUCTION SPATIALE: 1960-2005 de Ahmed Tessa Editions PUBLISUD, Paris, 2007, 127 pages.